Space : se comprendre entre générations, c’est possible

Le Space de Rennes a accueilli plus de 100 000 visiteurs professionnels du 17 au 19 septembre dernier. L’une des thématiques majeures était le renouvellement des générations d’éleveurs, et, dans ce cadre, une table-ronde s’est tenue sur le thème « Se comprendre entre générations et travailler ensemble ».

Le Space de Rennes a fermé ses portes la semaine dernière après avoir accueilli plus de 100 000 visiteurs, 1200 exposants, mais… pas de ministre, ni de l’agriculture ou ni de ministre tout court, une première depuis 30 ans. Malgré cette vacance, ce
salon professionnel a tenu toutes ses promesses, avec ses animaux de prestige, ses innovations technologiques, ses stands très animés surtout à l’heure de l’apéro et ses nombreuses délégations internationales.
Au-delà de la technique et des échanges commerciaux, le Space s’intéresse aussi de plus en plus au « facteur humain », puisque c’est ce dernier qui va conditionner l’avenir de l’élevage français. C’est pourquoi cette 38 e édition du Space a beaucoup misé sur la jeunesse, notamment avec son « Espace pour demain », l’un des espaces phare du salon.

La Gén Z veut un métier qui a du sens : ça tombe bien pour l’agriculture !

Au sein de cet espace, une table-ronde était organisée, le mardi 17 septembre, sur la thématique « Se comprendre entre générations et travailler ensemble ». Ce n’est pas un secret, la génération qui va arriver en agriculture, dite génération Z (les personnes nées entre 1995 et 2010), est assez différente des précédentes, en particulier sur son rapport au travail. Pour mieux connaître et comprendre ce rapport au travail, l’Anefa (Association nationale pour l’emploi et la formation en agriculture) du Finistère a réalisé récemment une grande enquête auprès de 840 jeunes en formation agricole. « Ce qu’ils demandent en premier lieu, c’est d’exercer un métier qui a du sens et à ce titre, les métiers agricoles sont particulièrement bien placés », relate Louise Maurice, animatrice à l’Anefa.

Véronique Vannier, chargée de mission travail à la chambre d’agriculture de Bretagne et Louise Maurice, animatrice de l’Anefa, estiment que le secteur agricole peut attirer la génération Z, particulièrement attachée au sens du travail. photo Catherine Perrot

Autres facteurs importants sur leur rapport au travail : cette génération n’est pas très branchée « hiérarchie autoritaire » : « ils veulent plutôt une relation d’égal à égal, leur patron idéal est compréhensif et gentil ». Ces jeunes sont aussi en attente
d’autonomie et de liberté. C’est pourquoi ils peuvent ne pas hésiter à changer d’entreprise si quelque chose ne leur convient pas. « C’est la fin du culte du CDI qu’avaient les générations précédentes », souligne Louise Maurice. Enfin, cette génération se caractérise aussi par une culture de l’immédiateté. « N’oublions pas que ce sont des gens qui sont nés à l’ère du smartphone ».

La valeur travail ne prend plus le pas sur tout

Mais alors comment attirer, comment fidéliser cette génération qui ne voue pas le même « culte au travail » que les précédentes ? Déjà en acceptant cette différence. « Ça a du bon de se remettre en cause », décrit Véronique Vannier, chargée de mission travail à la chambre d’agriculture de Bretagne. « Chez les anciennes générations, la valeur travail prenait le pas sur tout. Les jeunes ont envie de s’épanouir, d’adapter leur charge et leurs conditions de travail. Cela nous pousse à repenser l’organisation du travail, à trouver des façons de faire différentes. Et l’amélioration des conditions de travail, est bénéfique pour tout le monde ».

Pour Louise Maurice et Véronique Vannier, en dehors de la mise en place de techniques, d’équipements ou d’organisation du travail nouvelles, l’un des enjeux principaux pour bien travailler avec la génération Z, est de mieux communiquer.
« On se rend compte que, parfois, la transmission des consignes n’est pas claire. Et les jeunes sont en recherche de feedback sur leur travail ». « Le management, cela s’apprend », poursuit Véronique Vannier, « la pédagogie, ce n’est pas inné ». De nombreux organismes para-agricoles proposent ainsi des formations qui permettent de mieux communiquer au sein d’un collectif de travail : « On peut s’exercer, progresser. Apprendre à écouter les besoins, s’adapter, se mettre à la place de l’autre pour se rendre compte de l’impact de ce que l’on dit, savoir mieux valoriser le travail de ses salariés et de ses associés ».

Une bonne image de marque qui donne envie

L’Anefa et la chambre d’agriculture sensibilisent aussi les éleveurs, qu’ils soient employeurs ou en recherche d’associés, « à mettre en avant leur marque employeur ». Il s’agit en effet de « donner envie de travailler », et cela passe par un soin apporté aux abords de la ferme, aux bâtis, aux chemins d’accès, et, bien sûr, à l’existence d’une salle de pause chauffée avec cuisine, sanitaires et vestiaires : « Les exploitations porcines sont très en avance sur ce point » soulignent les spécialistes.

Catherine Perrot
Louise Maurice : «  20 % des jeunes qui sont en formation agricole sont venus à la suite d’un stage de découverte ». photo Catherine Perrot

Donner envie de travailler, c’est aussi savoir accueillir des stagiaires, et pas uniquement des stagiaires en formation agricole ou issus du milieu. L’enquête de l’Anefa 29 montre en effet que 20 % des élèves qui sont en formation agricole ont choisi cette voie après un stage de découverte. Les agriculteurs ont donc tout intérêt, aujourd’hui, à prendre un peu de temps pour accueillir des jeunes de troisième ou de seconde : leurs futurs salariés ou futurs associés figurent peut-être dans leurs rangs !