Volailles de chair : vers des allégations européennes fantaisistes et trompeuses ?

L’Anvol et le Synalaf dénoncent le projet de la Commission européenne d’intégrer de nouvelles mentions relatives au mode d’élevage, limitées aujourd’hui à cinq expressions dûment cadrées. Avec près d’une volaille sur cinq concernée, le France serait l’Etat membre le plus pénalisé en l’état du projet.

« Poulets des champs », « Poulets de plein vent », « Poulets libres », « Poulets à l’air libre »... : telles sont les allégations qui pourraient figurer prochainement sur les emballages des volailles produites au sein de l’Union européenne. La Commission européenne a en effet décidé de rénover les normes et les mentions caractérisant le mode d’élevage des volailles. Datant de 1991, le règlement 1538/91 fixe cinq mentions, à savoir « Alimenté avec x % de … », « Elevé à l’intérieur - système extensif », « Sortant à l’extérieur », « Fermier - élevé en plein air », « Fermier - élevé en liberté », chacune de ces mentions étant strictement définie dans le règlement en question, qui prévoit aussi les dispositifs de contrôles des éleveurs et des abatteurs.

Des mentions hors-sol

Selon l’interprofession de la volaille de chair (Anvol) et le Syndicat national des labels avicoles de France (Synalaf), la Commission européenne a décidé de voler dans les plumes de ce règlement. « En évitant la confusion et les abus, ces normes ont établi une segmentation et un étiquetage clairs et ont permis aux productions de volailles alternatives d’être mieux connues des consommateurs, et de trouver une place sur le marché et de se développer grâce à des conditions de concurrence équitables pour tous les producteurs européens, défendent les deux organisations. Le projet de nouvelles normes présenté par la Commission européenne fin 2022 change complètement les règles actuelles en supprimant l’exclusivité de cette liste fermée de cinq mentions, qui deviennent facultatives. Tout opérateur européen pourra désormais utiliser n’importe quelle autre mention de mode d’élevage sans aucun contrôle ».

Types de volailles élevées en Europe en fonction de leur mode d’élevage (Source : Itavi)
Types de volailles élevées en Europe en fonction de leur mode d’élevage (Source : Itavi)

La filière française particulièrement impactée

Selon l’Itavi, les productions « fermières - élevées en plein air/en liberté » représentent au moins 17% de la production française, notamment via les productions AOC, Label Rouge et bio, soit davantage que tout autre Etat membre. La France, qui compte environ 20% de volailles bénéficiant d’un accès à l’extérieur, loin devant l'Italie (7%), est donc potentiellement le pays le plus impacté par cette évolution du règlement, « qui  va à l’encontre de toutes les annonces faites en France au sujet de « la montée en gamme » et en Europe concernant « le Green deal » et la « Farm to fork strategy », visant à soutenir la production locale et durable, dénoncent l’Anvol et le Synalaf. Ce projet est une aberration en termes d’information des consommateurs, de protection des agriculteurs et de durabilité ».

L’Anvol et le Synalaf demandent à la France d’opposer son veto au changement des règles actuelles. Le temps presse puisque la discussion entre la Commission européenne et les Etats membres prendra fin le 2 février prochain.