« Avec son PSN, l’État s’achète la paix sociale agricole »

La Confédération paysanne continue de porter le fer pour infléchir le Plan stratégique national, aligné selon elle sur « le corporatisme agricole ». Le syndicat s’arc-boute sur le paiement redistributif, l’aide aux petites fermes et un écorégime distinguant bio et HVE.

Le Plan stratégique national (PSN), présenté par Julien Denormandie le 21 mai dernier, serait-il autre chose qu’un programme destiné à ménager la paix sociale agricole ? C’est en tout cas le point de vue de Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne, pour qui « le ministre de l’Agriculture a voulu s’éviter la fronde de la frange dure du monde agricole qu’il ne maîtrise pas ».

La Conf’ n’abdique pas pour autant. Elle essaie de continuer de peser dans la négociation, en tentant de faire descendre le président de la République dans l’arène, par l’entremise d’une lettre ouverte ou encore d’un rendez-vous avec son conseiller agriculture.

Signal politique manqué

Depuis le début des concertations, la Confédération défend notamment, aux côtés du plafonnement des aides, deux mesures emblématiques que sont le relèvement du paiement redistributif d’une part et l’aide forfaitaire aux petites fermes d’autre part. Deux points sur lesquels elle n’a strictement rien obtenu et qu’elle considère comme une erreur politique de la part de l’exécutif. « Le relèvement du paiement redistributif et l’aide aux petits fermes enverraient un signal politique en terme d’emploi, de diversification et de relocalisation », argumente Nicolas Girod.

La Conf' serait disposée à voir ses exigences à la baisse, en défendant un paiement redistributif à 15% sur les 52 premiers hectares (contre 20% dans sa demande initiale) et une aide forfaitaire aux petites fermes de 1250 euros (contre 5000 euros). La Conf’ considère l’aide couplée au petit maraichage (10 millions d’euros), une nouveauté du PSN, trop restrictive dans ses champ et modalités d’application (plancher d’accessibilité, plafond d’exclusion).

« Oui à de nouveaux entrants en bio »

En ce qui concerne l’agriculture biologique (AB), la Conf’ soutient la position de la Fnab, qui défend un écorégime distinguant la bio de la HVE (Haute valeur environnementale), assorti d’une très nette revalorisation de l’aide. Dans l’état actuel du PSN, bio et HVE permettent sans distinction d’accéder au niveau supérieur de l’écorégime, dont le montant pourrait s’établir à 70€/ha, un montant non confirmé par le ministère de l’Agriculture. La Fnab réclame 145 €/ha pour la bio, arguant des bénéfices de la bio sur les écosystèmes et sur la santé, et compensant pour partie l’abandon définitif de l’aide au maintien le 1er janvier 2023, encore distribuée dans certaines Régions.

"Le marché n’est pas suffisamment rémunérateur dans tous les secteurs pour permettre à tous de rester en bio"

S’agissant de la bio, le ministère de l’Agriculture concentre son effort sur la conversion pour favoriser la transition du plus grand nombre et répondre à la demande du marché. Le ministère se fixe pour horizon un taux de SAU en bio de 18% à fin 2027. « Être ambitieux sur la conversion n’empêche pas d’être ambitieux sur le maintien via l’écorégime, déclare Nicolas Girod. Contrairement aux allégations du ministre, ce n’est pas l’arrivée de nouveaux entrants que redoutent les historiques de la bio mais le risque de désengagement des convertis. On a beau nous dire que c’est le marché qui va rémunérer le bio, le marché n’est pas suffisamment rémunérateur dans tous les secteurs pour permettre à tous de rester en bio ».

Après la manifestation du 27 mai au siège de Pôle Emploi à Paris, la Confédération paysanne compte bien faire entendre ses revendications dans les jours et semaines à venir.