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« Ceci n’est pas un steak » : les organisations agricoles à l’assaut des dénominations trompeuses
Afin de lutter contre les dénominations telles que « saucisse végétarienne » ou « burger végétarien », de nombreuses organisations professionnelles agricoles se mobilisent, à coup de campagnes de communication et d’actions en justice.
Alors que le Parlement européen doit se prononcer le mois prochain sur la reconnaissance juridique de dénominations telles que « burger végétarien » ou « saucisse végétarienne », plusieurs organisations européennes d’éleveurs, d’industriels et de bouchers se mobilisent contre l’utilisation de ces dénominations de viandes et produits laitiers pour les imitations végétales.
Afin de sensibiliser les eurodéputés à « l’impact et aux conséquences de la généralisation de tels termes », le Copa Cogeca (Syndicat européens des agriculteurs et de leurs coopératives), le Clitravi (Industries européennes transformatrices de viandes), l’Effab (Forum européen des éleveurs d’animaux de reproduction), l’Avec (Association européenne des transformateurs et négociants de volaille), l’IBC (Fédération internationale des bouchers) et l’UECBV (Union européenne du commerce de viande et de bétail) ont lancé le 6 octobre une campagne de communication intitulée « Ceci n’est pas un steak ». Elle propose notamment des affiches détaillant les ingrédients que l’on retrouve dans les produits végétaux transformés.
Un "marketing végétal" à trouver
« Pour le secteur européen de l'élevage, il ne s’agit pas d’une lutte, mais simplement d’un appel à la juste reconnaissance et au respect du travail fourni par des millions d'agriculteurs européens et de travailleurs du secteur de l’élevage. Je n’ai pas peur de dire que nous sommes clairement face à un détournement culturel », affirme Jean-Pierre Fleury, président du groupe de travail « Viande bovine » du Copa-Cogeca.
Tout en rappelant que les agriculteurs européens « ne s’opposent pas à la production de protéines végétales pour les produits végétariens », le syndicat européen estime que les imitations à base de végétaux qui tendent à copier les dénominations et caractéristiques des produits laitiers ou carnés « doivent trouver leur propre voie ».
« Plutôt que d’investir dans des activités de lobbying, ces entreprises doivent se pencher sur de nouveaux concepts de marketing, afin de gagner la confiance des consommateurs et de trouver une solution au paradoxe fondamental du secteur végétal que constitue l’imitation par des produits à base de végétaux », indique-t-on au Copa-Cogeca.
"Les nouveaux fermiers" assignés en justice
En France, c’est notamment la start-up « Les nouveaux fermiers » qui est dans le viseur des interprofessions de l’élevage. L'entreprise, dont le crédo est de « démocratiser la viande végétale », a récemment lancé son usine de substituts végétaux à la viande.
Le 29 septembre, les interprofessions Anvol, Inaporc et Interbev ont annoncé qu’elles assignaient les « Nouveaux Fermiers » en justice, « pas seulement pour garantir aux professionnels de nos filières la protection à laquelle ils ont droit, mais aussi pour permettre aux consommateurs d’accéder à une information non-trompeuse, fiable, objective et transparente ».
Les interprofessions estiment que l’entreprise enfreint la loi n°2020-699 du 10 juin 2020 relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles et alimentaires, en commercialisant et promouvant des « steak », des « aiguillettes » et des « nuggets » qui ne contiennent pas de viandes, quand ces dénominations doivent désormais être réservées aux produits carnés.
L’article 5 de cette loi stipule en effet que « les dénominations utilisées pour désigner des denrées alimentaires d’origine animale ne peuvent être utilisées pour décrire, commercialiser ou promouvoir des denrées alimentaires comportant des protéines végétales ». Le même article précise qu’un décret (à venir) doit fixer « la part de protéines végétales au-delà de laquelle cette dénomination n’est pas possible ». Ce décret définit également les modalités d’application du présent article et les sanctions encourues en cas de manquement.
"Délit de tromperie"
Le 7 octobre, la Confédération paysanne a indiqué qu’elle portait elle aussi plainte contre « Les nouveaux fermiers », pour « délit de tromperie et pratiques commerciales trompeuses ». Au-delà de l’utilisation du vocabulaire carné pour des produits végétaux, c’est l’usurpation du terme « fermier » qui fait grincer des dents le syndicat.
« Lors du débat sur la loi Egalim, la Confédération paysanne a bataillé pour défendre la mention « fromage fermier » et réuni plus de 40.000 signatures autour de sa pétition. Malgré nos alertes, cette mention a pourtant été affaiblie par le gouvernement et le Parlement en mars dernier. Aujourd’hui, les usurpations du terme « fermier » se poursuivent », alerte le syndicat.
Pour la Confédération paysanne, la start-up « Les nouveaux fermiers » représente un exemple-type de « ces acteurs de l’agrobusiness » qui « vendent un imaginaire autour du produit local, du fermier, du travail paysan, déconnecté de leurs réelles pratiques ».
Avec cette plainte, la Confédération paysanne espère « alerter l’opinion et susciter la réaction du gouvernement et du législateur pour que soit rapidement conçu un cadre réglementaire complet qui protège le terme « fermier » pour toutes les productions ».