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Crise viticole : l'Etat annonce une campagne de distillation en soutien à la filière
Le ministre de l'Agriculture a annoncé le 6 février une campagne de distillation, dotée de 160 millions d'euros, pour soutenir les viticulteurs confrontés à une crise de surproduction, une mesure qualifiée de "poudre aux yeux" par un collectif bordelais, qui réclame une prime à l'arrachage.
"La filière vitivinicole traverse actuellement une crise conjoncturelle dans le contexte d'inflation lié à la guerre en Ukraine qui exacerbe des difficultés structurelles dans certains bassins viticoles et couleurs de vins", écrit le ministre Marc Fesneau dans un communiqué.
Dans le Bordelais, plus grand vignoble AOC de France, avec ses 110.000 hectares cultivés dont 85% en rouge, les appellations les moins prestigieuses souffrent particulièrement de l'effondrement des prix et de la surproduction évaluée à un million d'hectolitres.
Pour accompagner la filière, "majeure pour l'économie française", "une campagne de distillation" sera engagée "dès cet été" grâce au déblocage "dans la limite des montants autorisés par les dispositions européennes" de "40 millions d'euros de crédits nationaux complétés de 40 millions de l'enveloppe de financements européens (FEAGA)", indique M. Fesneau. Une seconde campagne de distillation pourra être organisée "à partir d'octobre (...) pour atteindre un maximum de 160 millions d'euros en 2023", détaille le ministre.
La dernière campagne de distillation mise en place à l'été 2020 avait aidé les viticulteurs français à écouler les excédents constitués au début de la pandémie de coronavirus en raison de la fermeture des bars et restaurants dans le monde entier. Ils avaient été transformés en alcool pour fabriquer du bioéthanol, des parfums ou du gel hydroalcoolique.
PGE prolongés
Le ministre rappelle par ailleurs que le gouvernement a étendu et prolongé le dispositif de prêt garanti par l'Etat (PGE) jusqu'à la fin 2023. Deux nouveaux guichets d'aide aux investissements de protection face aux aléas climatiques dotés d'"un total de 40 millions d'euros" ouvriront également "dans les prochains jours".
Des pistes sont aussi "à l'étude autour de la mobilisation des outils du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural) sur la diversification agricole, du renouvellement de générations, et de l'arrachage sanitaire dans le cadre d'un programme interprofessionnel d'enrayement de la flavescence dorée" pour aider les viticulteurs "dès 2023", notamment dans le Bordelais.
Un vigneron bordelais sur trois se déclare "en difficulté", selon une étude publiée fin janvier par la Chambre d'Agriculture de Gironde après une manifestation ayant rassemblé plus d'un millier de personnes à Bordeaux début décembre. Le collectif "Viti 33", qui réclame l'arrachage d'au moins 15.000 hectares de vignes, avec une prime de 10.000 euros/hectare, considère que la distillation "ne résoudra absolument pas la situation dans le Bordelais" avec "24 mois de stockage dans les chais".
"Ca va faire un peu de beurre dans les épinards, quelques milliers d'euros pour tenir 2-3 mois de plus mais c'est tout", a déclaré à l'AFP son président Didier Cousiney. Selon lui, s'il n'est pas décidé de réduire la "production à Bordeaux, on court à la catastrophe l'année prochaine ou dans deux ans" avec "des drames familiaux et humains" à la clé, suite aux dépôts de bilan. "La distillation, c'est de la poudre aux yeux pour nous faire patienter. On caresse le chien pour qu'il ne morde pas", ajoute encore M. Cousiney, qui assure que les vignerons bordelais sont déterminés à se faire prochainement de nouveau entendre.