Elevage de plein air et biosécurité : top départ pour l’expérimentation

Près de 140 élevages de volailles et de porcs disséminés dans 25 départements ont été sélectionnés pour tester des protocoles de biosécurité spécifiques aux élevages autarciques. Les conclusions sont attendues pour début 2025. La Confédération paysanne, à l’initiative aux côtés du Modef, en attend beaucoup.

Pour les élevages autarciques de volailles en plein air, il y un avant et un après 30 septembre 2021. La date correspond à la publication d’arrêtés mettant fin aux dérogations permettant aux élevages comptant moins de 3200 canards d’éviter la claustration en période à risque élevé d’Influenza aviaire hautement pathogène (IAHP). Pour le Modef et la Confédération paysanne, ces arrêtés signent la mort des élevages autarciques et la tromperie des consommateurs, du fait des modifications temporaires des cahiers des charges. A l’époque, Sylvie Colas, éleveuse dans le Gers, en charge de la grippe aviaire à la Confédération paysanne, déclare : « Je ne vendrai pas du plein air claustré ».

"Nous n’opposons pas la modèles industriels et plein air mais nous faisons le constat que l’un est prédateur de l’autre"

En décembre 2022, le ministère de l’Agriculture allègera les dispositifs de mise à l’abri mais sans satisfaire complètement les éleveurs concernés. « Les élevages autarciques fonctionnent en circuit fermé et ne diffusent pas le virus, argumente Sylvie Colas, secrétaire nationale de la Confédération paysanne. Nous n’opposons pas la modèles industriels et plein air mais nous faisons le constat que l’un est prédateur de l’autre. A la Confédération paysanne, nous ne sommes pas des gens hors norme mais nous voulons simplement des normes adaptées ».

Le ministère de l’Agriculture finira par entendre les requêtes des éleveurs autarciques et annoncera, à l’été 2023, le lancement d’une expérimentation destinée à identifier et à évaluer les mesures de biosécurité spécifiques aux élevages de plein air de volailles et de porcs.

Sous l’égide du ministère, l’expérimentation sera animée par le réseau de l’Agriculture Paysanne (FADEAR), avec la caution scientifique des instituts techniques et de l’Anses, en collaboration avec les structures professionnelles des filières avicoles et porcines. A l’issue d’une entrevue avec le ministre de l’Agriculture le 9 janvier, la Conf’, le Modef et ELB (syndicat du Pays basque) se sont félicitées « de l'ouverture d'un dialogue au plus haut sommet de l'Etat sur ce modèle d'élevage ». « Il y a quelques temps, dans les réunions avec la Direction générale de l’alimentation, on ne pouvait même plus parler de plein air », relate Sylvie Colas.

90 élevages de volailles, 50 de porcs

Fondée sur des analyses de risques, l’expérimentation va concerner environ 90 élevages de volailles et 50 élevages de porcs, ces derniers étant sous la menace de la peste porcine africaine. Les restitutions sont attendues pour début 2025. Les syndicats espèrent bien évidemment qu’elles déboucheront sur un traitement différencié des normes sanitaires entre élevages industriels et autarciques, ne désespérant pas une plus grande territorialisation des mesures. « Quand un canard tousse en Vendée, pourquoi enfermer les canards du Gers et des Landes », s’interroge Sylvie Colas.

Face à Marc Fesneau, les représentants des trois syndicats n’ont pas manqué de rappeler les dégâts collatéraux inhérents aux crises sanitaires, à savoir l’impact psychologique pour les éleveurs confrontés aux abattages sanitaires, le bien-être animal mis à mal par la claustration, les incidences économiques induites les crises à répétition ou l’absence de perspectives pour les candidats à la reprise et à l’installation, le tout sur fond d’hémorragie du nombre d’élevages et d’éleveurs. « On est dans la construction et l’expérimentation est une façon d’instaurer la confiance entre les éleveurs et les autorités » conclut Sylvie Colas, qui affirme au passage que les éleveurs autarciques ont joué le jeu de la vaccination, même si le protocole vaccinal implique les passages de vétérinaires référents, d’autant plus fréquents que les bandes sont souvent très échelonnées, ouvrant un coin dans la sacro-sainte... autarcie. Mais la renommée et l’image de marque de nos volailles fermières et festives le valent bien.