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Espaces-test à l’installation (4/4) : « Trois ans, un minimum pour se tester en élevage »
Éleveuse de chèvres dans l’Allier, Camille Cerisère a pu tester son projet en s’adossant à un élevage durant trois ans avant de s’installer. Une expérience concluante même si, aujourd’hui installée, les défis techniques et économiques restent quotidiens.
« Trois ans pour se former à la production, à la transformation et à la vente des formages, c’est un peu court mais je recommande sans hésitation l’expérience de l’espace-test ». Éleveuse de chèvres à Saint-Hilaire (Allier), Camille Cerisère s’est adossée durant trois ans à l’un des espaces-test d’Ilots Paysans, association basée en Auvergne et adhérente au Réseau national d’espaces-tests agricoles (Reneta). Une expérience et une chance rares car les possibilités de se frotter au métier d’éleveur, en dehors des contrats de pré-installation ou des Contrats emploi formation installation (Cefi), tels qu’en propose la Chambre d’agriculture d’Occitanie, avec le soutien financier de la Région.
« L’espace-test permet de se concentrer sur les aspects techniques de l’exploitation, sans se préoccuper des côtés financiers, explique Camille Cerisère. Le fait d’être épaulé par un tuteur permet de bénéficier des conseils dans un cadre formalisé ». La jeune éleveuse avait eu une première expérience professionnelle en élevage caprin, en tant que salariée.
Hors cadre et hors parcours à l’installation
La chance lui a de nouveau souri avant la fin de son test, avec la possibilité d’accéder à des terres et des bâtiments sur une exploitation de 17 hectares louée à Terres de liens, limitant les investissements à la portion congrue. Par souci d’indépendance, elle n’a pas souhaité s’inscrire dans le parcours à l’installation. « Les formations dispensées par la Chambre d’agriculture étaient plutôt dissuasives », commente-t-elle. Elle reste cependant éligible aux aides à l’installation, au cas où...
Toujours est-il que deux ans après on installation, Camille Cerisère a fait ses preuves, avec l’appui de Julien, son conjoint-collaborateur. Tous deux conduisent en bio un troupeau d’une soixantaine de chèvres, dont la production est transformée à la ferme, en lactiques (crottins frais, mi-frais et aromatisés), en yaourts, faisselle et tomme, avant d’être intégralement vendue en direct.
En 2020, la crise sanitaire a quelque peu perturbé la bonne marche de l’exploitation. « Pendant le premier confinement, on a très bien vendu, explique l’éleveuse. Par la suite, les ventes sur les marchés ont été moins bonnes que d’habitude, un phénomène que d’autres éleveurs ont ressenti et que l’on peut mettre sur le compte de la crise, mais qui a épargné les maraichers ».
Des questionnements sur l’avenir
Cumulant production, transformation et commercialisation, faiblement mécanisé, mais faiblement endetté, le jeune couple parvient à se dégager l’équivalent d’un Smic pour deux actifs, moyennant une charge de travail conséquente. C’est ainsi que les chèvres sont traites à la main. Par choix. « Les animaux sont moins stressés et la production est au moins égale, confie l’éleveuse. En fait, on possède une machine à traire que le technicien devait mettre en route quand le Covid est arrivé. Sa mise en service réclamerait un temps d’adaptation de la part des animaux et on aurait davantage de travail de nettoyage ».
La valorisation, ou plus exactement la sous-valorisation des jeunes mâles, est davantage problématique. L’an passé, certains animaux ont eu du mal à partir car la crise sanitaire a perturbé les enlèvements. Leur acheminement vers des unités d’engraissement conventionnel, à défaut de filière bio, pose problème au couple et ils ne sont pas les seuls à subir cette situation. « Une solution consisterait à réaliser l’engraissement nous-mêmes mais la place manque dans les bâtiments. Cette option entrainerait par ailleurs une moindre production de lait et donc de fromages, alors que la plus-value sur les fromages est bien supérieure à celle de la viande de chevreau ».
La diversification s’opérera peut-être hors du champ agricole. Camille Cerisère vient en effet d’entamer une formation de kinésiologue (gestion du stress et des émotions). Et, histoire de renvoyer l’ascenseur, elle se verrait bien accueillir, un de ces jours et sur sa propre exploitation, un espace-test pour un apprenti maraicher.