La robotique pénètrera de plus en plus les exploitations, mais sous quelle forme ?

L’actualité de l’année passée a été riche dans le domaine de la robotique et de l’automatisation agricole : acquisition de Raven par CNH Industrial et de Bear Flag Robotics par John Deere, partenariat entre Pellenc et Agreenculture, etc. Plus récemment encore, John Deere présentait au CES de Las Vegas un tracteur autonome prêt pour la production et la commercialisation en Amérique du Nord. Alors que la première révolution agricole fut celle du machinisme et la seconde celle de l’agrochimie, la troisième révolution agricole sera-t-elle celle du robot ?

Encore très largement cantonnées aux univers fermés des élevages, les solutions robotisées devraient progressivement gagner du terrain dans les espaces ouverts des vignes et des champs, au-delà de l’automatisation déjà présente dans les machines commercialisées. Ce n’est d’ailleurs pas une robotique agricole mais des robotiques agricoles qui existeront tant la diversité des solutions est grande face à la diversité des cultures et des pratiques.

Pour ce faire, tant les acteurs établis (les tractoristes et équipementiers) que les nouveaux entrants (les start-up de l’agtech) devront prouver aux agriculteurs la fiabilité et la rentabilité de leurs solutions, afin de les convaincre. En parallèle de cette évolution « aux champs », c’est toute la chaîne de valeur du machinisme agricole qui sera impactée, en complément d’une nécessaire évolution de la réglementation afin d’accompagner cette mutation.

L’innovation du machinisme agricole est continue

L’agriculture est riche d’innovation, pour preuve, en un siècle, elle est passée de la fourche au robot. Pour autant, cette innovation est davantage incrémentale que de rupture, c’est-à-dire que les produits sont progressivement enrichis de nouvelles fonctionnalités afin de les rendre toujours plus performants et efficients. Ainsi, si l’on se penche sur un Massey-Harris de l’aprèsguerre, la silhouette n’est pas si différente de celle d’un tracteur actuel (hormis l’échelle) mais leurs capacités sont à mille lieues l’une de l’autre. Pendant longtemps, cette évolution fut principalement mécanique (la puissance notamment) avant de basculer dans une logique davantage technologique à l’orée des années 2000. Aujourd’hui, tractoristes et équipementiers proposent tous des solutions pour automatiser le travail agricole, que l’on se place dans le cadre des grandes cultures, de l’élevage, de l’arboriculture, de la viticulture ou du maraîchage. Ainsi, les tracteurs proposent des fonctionnalités comme l’autoguidage ou le demi-tour automatique en bout de champ et l’opérateur n’a plus qu’à jouer du joystick pour enclencher le travail et surveiller son bon déroulement. Les équipementiers, dans une logique complémentaire, proposent des fonctionnalités comme la gestion par caméra ou l’Isobus, qui permet de gérer la communication entre les tracteurs, les logiciels et les machines des principaux constructeurs, permettant ainsi l’échange de données et d’informations via un seul terminal de commande situé dans la cabine du tracteur.

Dans ces deux cas, l’humain reste présent dans la machine alors que demain il pourrait s’en charger à distance, faisant franchir un nouveau pas à l’agriculture : celui de la robotisation, grâce à des technologies de positionnement et de détection toujours plus efficaces. Un pas loin d’être franchi dans les champs français car à peine quelques centaines de robots y opèrent. Mais ce pas, les élevages bovins laitiers ont déjà commencé à le franchir avec la diffusion croissante des robots de traite. Ils sont estimés à plus de 8 000 en France soit une pénétration au sein d’environ 12 % des élevages laitiers, un chiffre qui dépasse largement les 25 % aux Pays-Bas. Si les élevages sont en avance dans ce domaine, l’explication est simple : la stabulation libre est un environnement favorable à la robotisation car fermé et facilement aménageable, contrairement aux champs, espaces ouverts et diffus avec des milieux très variables (adhérence, végétation, pentes, etc.). Parallèlement aux robots de traite, l’alimentation et le nettoyage des bâtiments peuvent également être robotisés.

 

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