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La salers, star en son Space
La race salers était la race allaitante à l’honneur lors du dernier Space qui s’est tenu du 16 au 18 septembre à Rennes. Dans un contexte sanitaire perturbé, le challenge national salers a mis en lumière les facilités d’élevage et les aptitudes laitières de cette race, appréciée bien au-delà de son bassin d’origine cantalien.
Avec leurs cloches tintinnabulantes, leurs poils frisés acajou et leurs cornes en lyre, les salers ont apporté un peu de l’ambiance des estives des monts d’Auvergne sur le grand ring du Space, le 16 septembre dernier.
Et de l’ambiance, ce salon professionnel de l’élevage qui s’est tenu cette semaine près de Rennes, en avait bien besoin : le contexte sanitaire, en l’occurrence la FCO qui circule abondamment dans l’Ouest, l’a privé au dernier moment d’environ la moitié des animaux prévus, qui se révélés positifs à l’un des deux sérotypes (3 et 8).
Bourrets et bourrettes sur le grand ring
Les programmes ont donc été adaptés, certains concours annulés et les ventes aux enchères se sont déroulées en partie par vidéo interposées. Heureusement, le concours salers a pu se tenir comme prévu, faisant défiler ses 36 animaux (au lieu de 70) dans des sections aux noms évocateurs de son terroir : bourrets et bourrettes, doublons et doublonnes, tersons…
Ce lien fort à sa région d’origine n’empêche pourtant pas la salers d’être élevée ailleurs en France : si les trois-quarts des effectifs français (200 000 vaches en tout) sont effectivement dans le Massif central, on trouve quand même environ 20 000 vaches dans le Grand Ouest de la France. Elle s’exporte aussi plutôt bien, puisqu’elle est présente dans plus de 30 pays sur les cinq continents. « Elle s’adapte à tous les milieux et à toutes les variations de températures », décrit Karine Champaix, technicienne de Salers évolution et animatrice du concours.
Une vache modèle : un veau par an
La salers est en effet la race rustique par excellence, capable de valoriser les fourrages, et même de prendre « sur ses réserves » pour allaiter son veau. C’est ce que les techniciens nomment « les kilos gratuits » et c’est notamment ce qui fait la rentabilité de la race. Les autres grands atouts de cette vache sont sa fertilité et ses vêlages faciles (99 %), presque toujours à l’herbe, qui en font un modèle pour le fameux principe « un veau par vache et par an ».
Race mixte, la salers peut être conduite en vache allaitante comme en vache laitière, mais cette dernière conduite devient très minoritaire : il n’existe aujourd’hui que 26 éleveurs, tous dans le Cantal, qui les traient encore. Cette branche plus laitière est néanmoins un atout, car elle apporte de la diversité génétique et l’assurance de pouvoir réaliser des croisements améliorateurs en lait dans certaines familles qui en manqueraient.
Lucie Lesieur : « Jamais sans mes salers ! »
Rustique, docile, et qui vêle toute seule, cette vache a réussi à séduire des agriculteurs de plaine, en particulier ceux qui ont des cultures de vente. C’est le cas de Lucie Lesieur, éleveuse à Ri dans l’Orne : « Nous avons 270 ha de cultures sur l’exploitation. L’Orne est le département de l’Ouest qui a le plus de salers ». Mais pour Lucie, les salers ne sont pas une production annexe aux cultures : « C’est pour elles que je me suis installée ».
Aujourd’hui âgée de 30 ans, Lucie a repris, seule, l’exploitation de son père il y a trois ans, après avoir un temps envisagé de faire une carrière dans le commerce. « Je me suis rendu compte que je n’avais pas envie de laisser partir le patrimoine familial, tout ce que mon père a bâti dans sa carrière. Ma place était là ».
« Les salers, j’ai grandi avec, car mon père a acheté ses premières bêtes il y a 30 ans, poursuit-elle. Et comme il avait choisi des animaux avec de la bonne génétique, j’ai continué dans cette voie. Aujourd’hui, j’ai environ 90 vêlages par an et je fais surtout de la sélection : je suis heureuse de vendre mes animaux pour qu’ils fassent carrière dans d’autres élevages ».
Vortex et Vibrato, mais pas Sybelle
Lucie avait préparé 9 animaux pour le concours du Space. Malheureusement, en raison du passage de la FCO qui a rendu beaucoup d’animaux positifs, elle n’a pu emmener que Vortex et Vibrato, deux bourrets (taureaux de 18 mois). Sybelle, la star de son élevage, est malheureusement restée en Normandie.
Sybelle a en effet de quoi jouer les stars : elle a été sacrée grande championne de la race au concours général agricole de 2024. Sybelle a aussi été « exceptionnelle » à un autre titre : en décembre 2024, elle a eu besoin d’une césarienne ! « 99 % de vêlages faciles, et nous sommes tombés sur les 1 % », souligne Lucie, qui voue à ses animaux un attachement profond.
« C’était le soir du réveillon, le 24 décembre. J’ai hésité à déranger les vétérinaires, mais je l’ai quand même fait. Ils ont été extraordinaires, ils ont dit : "si c’est pour Sybelle, on vient !" ». Apollon est donc né par césarienne, la nuit de Noël, un peu après minuit, dans une étable. On lui souhaite une aussi belle carrière… que sa mère.