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Les œufs, une fierté française aux multiples enjeux
[Edito] Entre le chaos de la politique française et les tourments de l’actualité internationale, la journée mondiale de l’œuf, ce vendredi 10 octobre, a toutes les chances de passer inaperçue. Offrons donc un coup de projecteur sur cette filière qui - cocorico ! - fait office de bon élève en matière de souveraineté alimentaire française.
La France se positionne à la première place des pays producteurs d’œufs de l’Union européenne et le taux d’auto-approvisionnement était de 98,6% en 2024. Mais la filière ambitionne encore plus haut, avec un objectif de 101%. A ce titre, elle vise la construction de 300 nouveaux poulaillers d’ici 2030, ce qui représente un investissement de 300 millions d’euros. Fait notable : le taux de renouvellement des producteurs en élevage de poules pondeuses avoisine les 100%.
L’appétit des Français pour les œufs ne faiblit pas, bien au contraire. Depuis 2023, il s’est vendu 300 millions d’œufs supplémentaires chaque année dans les magasins, pour atteindre 7 milliards d’œufs achetés par les ménages en 2024. Inflation oblige, l’œuf représente la protéine animale la moins chère du marché et attire les consommateurs. D’après les prévisions, la consommation globale d’œufs en France devrait même progresser de façon record sur l’année 2025.
La construction de nouveaux poulaillers, nécessaire pour augmenter la production, doit aussi compenser la perte de capacité liée à la transition hors-cage, estimée à 20% des places de pondeuses. La filière s’est en effet fixé un objectif de 90% de poules en élevage hors-cage d’ici à 2030 (contre 75% actuellement), le mode d’élevage étant particulièrement plébiscité par les consommateurs et représentant le premier critère d’achat dans les sondages.
En magasins, les productions plein air, bio et Label Rouge représentent plus de 60% des achats. En restauration hors domicile (RHD) en revanche, cette proportion n’atteint que 19%. Les cages représentent encore le mode l’élevage majoritaire pour les ovoproduits à destination de la RHD ou des entreprises de l’agroalimentaire. Et sur ce secteur, le risque de la concurrence des importations à bas coût est fort : aujourd’hui, l’Ukraine, demain, le Mercosur ?
Des contraintes à déverrouiller
Une demande solide et des éleveurs intéressés par cette production : tous les voyants semblent au vert pour voir pousser de nouveaux poulaillers aux quatre coins de la France. Oui mais… Pour faciliter l’installation de nouveaux bâtiments, la filière appelle à la simplification et à l’accélération des procédures pour les projets de construction, à la fin de certaines surtranspositions françaises de règles européennes, ou encore à l’exclusion de l’élevage de la directive européenne sur les émissions industrielles, qui prévoit de considérer les poulaillers de plus de 21.500 poules pondeuses comme des sites industriels à partir de juillet 2026.
Reste aussi l’acceptabilité des riverains, qui sont nombreux à réclamer une production locale et respectueuse du bien-être animal, mais qui freinent des quatre fers lorsqu’un projet de poulailler débarque près de chez eux.
Le végétal serait il une solution ? Inaugurée cette semaine en Seine-et-Marne, une usine propose des substituts d’ovoproduits à base de pois, colza, féveroles ou pommes de terre, à des prix présentés comme compétitifs par rapport aux œufs de poules. Une façon de ne pas mettre tous les œufs dans le même panier ?