Les Chambres d'agriculture pas couchées devant le gouvernement

Les Chambres dénoncent l’attentisme du gouvernement qui rechigne à signer le Contrat d’objectifs et de performance (COP), gage de visibilité budgétaire pour les trois ans à venir. « L’État souhaite-t-il laminer les missions et les services des Chambres d’agriculture », s’interroge le président de l’APCA.

« C’est une déception majeure et profonde », lâche en conférence de presse Sébastien Windsor, président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA). En 2020, nous avons commencé à mettre en œuvre notre projet stratégique avec des objectifs chiffrés dans 16 domaines d’activité à l’horizon 2025, validés par le ministère de l’Agriculture. Sur l’année 2020, nos collaborateurs ont rencontré 15000 des 16000 agriculteurs de plus de 57 ans, ont réalisé 8500 conseils stratégiques dont 1500 conseils globaux afin de se roder à l’exercice, ont accompagné plus de 52 000 agriculteurs dans leur projet de conversion en AB, ont déposé 174 projets de recherche et développement, ont contractualisé avec 300 collectivités dans le cadre de Projets alimentaires territoriaux etc. etc. etc. Et aujourd’hui, on n’a aucune visibilité budgétaire sur les trois exercices à venir. C’est à croire que l’État veut nous couper les ailes. ».

"Il en va du maintien d’un conseil indépendant accessible à tous, , à l’heure où on a plus que jamais besoin d’accompagner les agriculteurs dans les transitons"

Pour le président de l’APCA, l’attentisme sur la signature du COP, qui relève du Premier ministre, traduit une volonté déguisée du gouvernement de rogner le budget des Chambres. « On demande simplement un engagement de stabilité sur trois ans pour poursuivre la modernisation de notre réseau, pour réaliser les missions supplémentaires qui nous sont demandées, pour accompagner les politiques publiques et les agriculteurs dans les transitons ». Et de citer l’engagement du réseau dans l’appréhension des crises (Covid, grippe aviaire, gel d’avril dernier...), dans la mise en œuvre du Plan de relance ou encore les efforts de pédagogie autour de la réforme de la Pac. A titre d’exemple, l’APCA vient de mettre en service un outil numérique d’aide à la décision permettant à chaque agriculteur de jauger son éligibilité au futur écorégime, en prévision des futurs assolements.

Le réseau veut aussi s’investir dans l’identification électronique des animaux, moyennant la refonte de la base de données, dans les diagnostics carbone au-delà des seuls nouveaux installés ou encore dans le futur conseil stratégique. « Il en va du maintien d’un conseil indépendant accessible à tous, à l’heure où on a plus que jamais besoin d’accompagner les agriculteurs dans les transitons », prévient Sébastien Windsor.

"Tout le monde a de l’ambition pour l’agriculture mais personne n’a d’ambition pour les personnes qui accompagnent les transformations"

Les Chambres perdent aussi patience sur un autre dossier relatif au statut de ces salariés, dont l’évolution est conditionnée à une ordonnance souffrance de la loi Asap, adopté en décembre 2020. « Le statut de nos collaborateurs n’a pas évolué depuis 1952, déplore Christophe Hillairet, président de la Chambre régional Ile-de-France. Ce statut ne prévoit ni la mobilité au sein du réseau, ni la possibilité d’octroyer des primes sur objectifs. C’est très très compliqué de recruter des jeunes diplômés dans ces conditions ». « En Normandie, je n’arrive pas à recruter les neuf techniciens requis pour réaliser le conseil stratégique », abonde Sébastien Windsor. « Tout le monde a de l’ambition pour l’agriculture mais personne n’a d’ambition pour les personnes qui accompagnent les transformations. Les agriculteurs ne peuvent pas être dans l’injonction de changer sans disposer de moyens pour les accompagner. Les Chambres d’agriculture font partie de ces moyens et je suis très fier des efforts réalisés par le réseau pour se moderniser ».

A propos du rapport d’information de décembre 2020, dans lequel une mission parlementaire formulait 30 recommandations de « mouvement », l’APCA affirme en avoir en enclenché, sinon réalisé,  26 sur 27, les trois dernières n’étant pas du ressort des Chambres.