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Vendredi 05/12/2025
MACF : l’équation perdante pour les agriculteurs français
[Edito] Face à l’entrée en vigueur progressive du MACF, les agriculteurs français voient se profiler un bouleversement majeur : hausse des coûts, complexité accrue et incertitudes sur leur compétitivité. Un mécanisme pensé pour protéger l’Europe… mais dont les effets pourraient peser lourdement sur le monde agricole.
Le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), pierre angulaire de la stratégie européenne de décarbonation, entre progressivement en vigueur. Officiellement, il vise à rétablir une concurrence équitable en imposant aux produits importés un coût carbone similaire à celui supporté par les producteurs européens. Une intention louable : empêcher que les efforts climatiques de l’Europe ne soient contournés par des importations à bas coût environnemental. Mais pour les agriculteurs français, ce nouvel outil soulève plus de questions que de certitudes alors que la commission Européenne souhaiterait appliquer la taxe carbone sur les engrais azotés à partir du 1er janvier 2026.
Premier impact, et non des moindres : les engrais azotés. Directement inclus dans le périmètre du MACF, ils représentent pour de nombreuses exploitations une part conséquente des charges. Leur renchérissement potentiel inquiète fortement, car il intervient dans un contexte déjà marqué par la volatilité des marchés, la pression sur les marges et la hausse du coût de l’énergie. Pour certains exploitants, chaque augmentation supplémentaire fragilise l’équilibre économique de l’exploitation. C’est dans ce cadre que la FNSEA et les associations des grandes cultures - AGPB (blé), AGPM (maïs), CGB (Betteraves), FOP (Oléoprotéagineux) et UNPT (Pommes de terre) - ont appelé à la suspension de ces mesures dont l’impact serait de 500 millions d’euros. Une demande entendue par la Ministre, en attendant que des mesures concrètes soient prises.
Au-delà des intrants, le MACF vient également questionner la compétitivité globale de l’agriculture française. Si l’objectif est de protéger les producteurs européens, la crainte est aussi que le mécanisme provoque un décalage entre les exploitations encore capables d’absorber les coûts d’adaptation et celles déjà largement éprouvées par les crises successives. Le risque d’accentuer les disparités structurelles est bien réel.
L’incertitude porte aussi sur l’avenir du dispositif. Son périmètre pourrait évoluer, et certains craignent qu’il ne s’étende progressivement à d’autres éléments des chaînes agricoles ou agroalimentaires. Or, chaque extension signifierait une complexité réglementaire supplémentaire, un suivi administratif plus lourd, et potentiellement des surcoûts additionnels pour les exploitants.
Dans ce contexte, les agriculteurs demandent de la visibilité, de la cohérence et un accompagnement réel. Le MACF ne doit pas devenir un nouvel étage dans la superposition réglementaire que la profession subit depuis des années. Les transitions sont un défi incontournable, mais elles ne peuvent réussir qu’avec ceux qui nourrissent le pays, et non malgré eux.