Une loi Alimentation au goût amer

Deux ans après l’adoption de la loi Egalim, 30 organisations, parmi lesquelles des syndicats agricoles (Confédération paysanne, Fnab, Unaf…), des ONG de protection de l’environnement (Greenpeace, FNE…), des associations de bien-être animal (CIWF, Welfarm…) et de consommateurs (UFC-Que Choisir) dressent un bilan amer de cette loi promulguée le 1er novembre 2018 et censée améliorer le revenu des producteurs.

« La quasi-totalité des indicateurs est au rouge et des reculs sont à noter », déplore le collectif dans un communiqué diffusé le 3 novembre. Il en est ainsi du premier objectif affiché par le gouvernement avec la loi Egalim : celui de « payer le juste prix aux producteurs, pour leur permettre de vivre dignement de leur travail ».

« Le revenu paysan n'est pas revalorisé, les profits de l'industrie et de la distribution continuent d'augmenter, les prix au consommateur aussi », affirme le collectif, qui s’appuie sur une étude de l’UFC-Que Choisir réalisée il y a un an, montrant que le relèvement du seuil de revente à perte (SRP) dans la grande distribution « a déclenché une inflation des prix alimentaires qui est venue accroître les marges de l’industrie agroalimentaire et de la distri­bution, sans revalorisation des prix pour les producteurs ».

L’examen de la construction des prix pour deux produits bruts (viande de bœuf et lait de consommation) montre une augmentation des marges de l’industrie et de la distribution et une baisse des prix payés aux producteurs.

Évolution de la décomposition du prix d’un kg de boeuf vendu en grande distribution.

Le collectif pointe également l’écueil de la loi concernant les négociations commerciales, « pas plus encadrées qu'avant » et qui « subissent même des tensions croissantes ».

Concernant le deuxième objectif de la loi Egalim affiché par le gouvernement, qui était de « renforcer la qualité sanitaire, environnementale et nutritionnelle des produits », le collectif d’organisations déplore notamment une baisse des ambitions en matière de réduction de pesticides, ainsi qu’un « recul notable : le retour des néonicotinoïdes ».

"Maintenir la pression"

Autre objectif de la loi Egalim : 50% de produits durables ou sous signes d'origine et de qualité dans la restauration collective publique à partir du 1er janvier 2022, dont 20% de bio. Malgré une forte croissance de la consommation des produits bio, notamment en restauration collective, « la part de ces produits n’est que de 4,5 % en 2019 », constate le collectif. A moins d’un « coup d’accélérateur important et généralisé sur l’ensemble du territoire », l’objectif de 20% d’ici 2022 sera difficilement atteint.

Les organisations, qui avaient déjà alerté l’an dernier sur « le manque de volonté et de moyens » pour assurer la mise en œuvre d’une loi « déjà peu ambitieuse », craignent que « le gouvernement confortera l'immobilisme ».

« La position de la France dans le cadre de la réforme de la PAC et notamment le Plan Stratégique National reste un des derniers leviers de ce quinquennat pour agir en faveur d’une transition agroécologique. Et le plan de relance français dans son volet agricole ne doit pas, lui, aller à son encontre », concluent les organisations, bien décidées à « maintenir la pression ».