Compétitivité des filières (7/10) : le sucre allégé mais pas trop

La montée en puissance de compétiteurs existants ou plus prégnants, tel que l’Inde et la Thaïlande, ont pour effet de fragiliser la filière française, mais pas au point de remettre en cause son leadership en Europe.

« Si l’on excepte la désastreuse récolte et production de sucre en 2020 (jaunisse, conditions climatiques), la France est, sur la période 2004-2020, le premier producteur de sucre de l’UE avec une filière betterave généralement considérée comme la plus compétitive de l’UE ». Tel est le constat, parmi d’autres, dressé dans l’analyse de compétitivité de la filière sucrière française, à laquelle s’est attelé FranceAgriMer dans le cadre de la Commission agricole et agroalimentaire, autour de toutes les parties prenantes.

Si la campagne passée (2020) est marquée par des soubresauts tant agronomiques (virose) qu’industriels (la fermeture de quatre usines), elle ne doit pas occulter les fondamentaux de la filière, à savoir : la France est le premier producteur de sucre de l’UE et le deuxième producteur mondial de sucre de betterave, le neuvième si l’on cumule sucre de betterave et de canne.

Une filière éprouvée mais résiliente

Au cours de la période analysée (2004-2°20), la filière sucrière a vu son environnement économique et réglementaire fortement évoluer, avec la réforme de l’OCM en 2006 et la réduction des quotas, qui s’est traduite par la fermeture de cinq usines, puis leur suppression totale en septembre 2017. Après une première campagne post-quotas record en termes de production (6,2 Mt) et d’exportations (1,3 Mt), les campagnes suivantes se révèlent plus difficiles. Les exportations régressent à 0,57 Mt en 2018/19 et 0,26 Mt en 2019/20 (périmètre UE28), principalement en raison de l’effondrement des cours internationaux en 2018/19, du fait d’une production importante en Inde et au Brésil. La betterave sucrière n’en a pas totalement fini avec les vicissitudes, comme en témoignent le gel d’avril 2021 qui a éliminé en germe 10% de la sole (avant re-semis) et tout récemment la décision d’arracher environ 5000 ha pour cause d’herbicide non conforme.

Balance commerciale excédentaire

Avec 2,38 Mt exportées en 2019/20, la France maintient un niveau d’exportations supérieur à la moyenne 2004-2020 (2,31 Mt). Jusqu’en 2010, la France est le 3ème exportateur mondial après le Brésil et l’Australie. À partir de 2011, l’Inde et la Thaïlande, favorisées par des soutiens publics distorsifs, supplantent la France, qui régresse en 5ème position.

Résultat : la valeur des exportations françaises en 2020 est la plus basse de la période avec 902 M€, les pics ayant été atteints en 2006 (1 375 M€), 2012 (1 475 M€) et 2018 (1 261 M€,).

S’agissant de la balance commerciale, elle évolue entre 524 M€ et 668 M€ depuis 2013 vis-à-vis de l’UE, après avoir atteint un pic de 809 M€ en 2012, pour se situer à 591 M€ en 2020.

Vers les pays tiers, après l’excédent record de 416 M€ atteint en 2018, la situation se dégrade avec un surplus de 124 M€ en 2020, reflétant autant la perte de volumes due à la crise sanitaire que les cours internationaux déprimés depuis 2019.

Points de vigilance

Dans ce travail d’introspection que constitue de l’analyse des ressorts de compétitivité par FranceAgriMer, les acteurs de la filière ont souligné, en point de vigilance, la progression des coûts de production agricole dès lors que l'on s'oriente vers un mode de production sans produits phytosanitaires et une maitrise sanitaire des cultures qui nécessitent un travail au champ et une main d’œuvre plus importants.

Or le coût de la main d’œuvre reste plus élevé en France que chez nos concurrents européens. Un point qui a été également relevé pour ce qui concerne les coûts de production industriels affectés par des distorsions sociales intra-communautaires.

Les accords de libre-échange, le cadre réglementaire différent selon les pays notamment au sein de l’UE, les normes appliquées dans les pays tiers concurrents moins exigeantes sur le plan environnemental sont des facteurs mis en avant pour expliquer la baisse de la compétitivité française. Des règles qui nécessitent parfois une mise en adéquation dans des délais courts et peuvent impacter la compétitivité selon la deuxième transformation. Enfin la logistique est un sujet prégnant notamment dans le transport des matières premières.