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Trois p’tits trucs en trop
[Edito] Le gouvernement finissant a renoncé à modifier les règles entourant les élections aux Chambres d’agriculture, au grand dam de la FNSEA et des JA. Un des rares trophées, avec le désarmement des agents de l’OFB et le retour des néonicotinoïdes, que les deux syndicats n’ont pas accrochés à leur tableau, en cette mandature si fructueuse.
Le compagnonnage entre les ministres macronistes - en attendant la nomination et la couleur du prochain locataire de la rue de Varenne - et les syndicats majoritaires s’est achevé sur une frustration, doublée d’une vexation. Le jour même où le président de la République acceptait la démission du gouvernement Attal, réduit à gérer les affaires courantes (plus sûrement marchantes), le Journal officiel se fendait d’un décret relatif à l’organisation des élections aux Chambres d’agriculture. La date de clôture du scrutin mise à part, fixée au 31 janvier 2025, rien si ce n’est du menu fretin. « Regrettable » et « grave » ont fulminé la FNSEA et les JA.
Du pluralisme syndical…
Les deux syndicats, qui gèrent 97 Chambres sur 101 avec 55% des suffrages obtenus au dernier scrutin de 2019, attendaient une modification de la clé de répartition du financement public des organisations représentatives des exploitants agricoles. Le partage des subsides découle en effet des résultats des élections aux Chambres, en vertu de la loi de 2001 relative au pluralisme syndical. En l’état actuel des choses, la loi flèche 75% des financements sur la base du nombre de voix obtenues et 25% sur le nombre de sièges. Les syndicats majoritaires attendaient, prétendue promesse « Attalienne » post-crise agricole, un ratio de 50/50 qui, au vu du ratio évoqué plus haut (97/55) aurait tôt fait d’enflammer en leur faveur une calculette à plus de 14 millions d’euros annuels, au détriment de la Coordination rurale et de la Confédération paysanne, qui pèsent peu ou prou le même poids que la FNSEA et les JA… séparés. De l’opportunité des alliances, en ces temps si mouvants.
… au pluralisme politique
Le ministère de l’Agriculture a donc opté pour le statu quo, s’évitant un inévitable recours devant le Conseil d’Etat qui, en 2013, avait donné raison à Stéphane Le Foll, lequel avait mis fin à une décennie de ratio 50/50. Cette très corporatiste revendication est remisée au champ d’honneur des causes au moins momentanément perdues, une des rares du prolifique millésime 2024, rejoignant le non-désarmement des agents de l’OFB et le non-retour des néonicotinoïdes. Trois p’tits trucs en trop. Une paille, comparée à la moisson des 70 engagements pris par le gouvernement Attal, dont « 67% réalisés, 19% avancés et 14% engagés », selon le dernier décompte du ministère de l’Agriculture daté du 5 juin. Autant d’acquis légitimes et profitables au plus grand nombre. Mais la crise agricole fut celle aussi d’une lutte d’influence à bas bruit entre syndicats, à moins d’un an des élections aux Chambres. Jusqu’au fracas de la dissolution de la Chambre basse. Et à la revisitation, forcée, du pluralisme.