Des pyréthrinoïdes aux PFAS, des poisons à foison et à la maison

[Edito] Deux études pointent la contamination et les risques sanitaires associés à des insecticides en usage depuis presque 50 ans pour l’une, à la présence massive de polluants éternels dans les vins pour l’autre. Mais les usages agricoles ne sont pas seuls en cause.

La première étude émane de l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et concerne les pyréthrinoïdes, identifiés comme étant responsables de troubles du langage, de troubles du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité ou encore des trouble du spectre autistique en lien avec une exposition prénatale à cette famille d’insecticides, à large usage agricole et vétérinaire depuis presque 50 ans. La seconde est l’œuvre d’un collectif européen d’ONG, PAN Europe, et concerne les PFAS, ces composés perfluorés persistants, mobiles et bioaccumulables, et dont la stabilité chimique dans l’environnement leur vaut la qualification de « polluants éternels ». Bien que les effets des PFAS sur la santé humaine restent encore largement à documenter, ces substances sont soupçonnées d’être cancérogènes, perturbateurs endocriniens, de favoriser l’obésité et le diabète, d’affecter la fertilité ou encore le développement du fœtus.

Une présence massive et généralisée dans les vins européens

En mars dernier, l’Union européenne a ainsi décidé d’interdire l’usage du flufénacet, un herbicide majeur en céréales, au motif que son métabolite, le TFA (acide trifluoroacétique), a été classé perturbateur endocrinien par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) en 2024. Il se trouve que le TFA est un PFAS dont la présence ne se limite pas aux eaux souterraines, voire aux eaux de boisson. Selon PAN Europe, il est systématiquement présent dans les vins analysés et issus de 10 pays européens. Si le lien avec les pesticides est établi, la plus forte contamination des millésimes récents, ainsi que celle des vins bio, témoigne d’une pollution diffuse croissante dans le milieu. La concentration moyenne ne manque pas d’interroger : elle s’établit à 122 µg/l selon l’étude quand le seuil de non-conformité des eaux de boisson est fixé au sein de l’UE à 0,1µg/l… pour la somme des 20 PFAS jugés les plus pertinents…dont le TFA n’est pas !

L’agriculture, mais pas que

Les PFAS sont présents dans de nombreux produits manufacturés : imperméabilisants pour les cuirs et textiles, papiers et emballages traités, enduits pour textiles et peintures, détergents, semi-conducteurs, fluides hydrauliques, traitements de surface des métaux etc. Et donc dans les pesticides. Mais dans quelles proportions ? Comme pour la toxicité, le sujet est encore mal documenté, de l’aveu de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (ministère de la Transition écologique). Mais selon l’Agence allemande de l’environnement, citée dans l'étude de PAN Europe, les pesticides représentent 76% de la contamination annuelle des eaux souterraines par le TFA, suivis des émissions provenant des pluies (17%) et des stations d’épuration et du fumier (3% chacun).

En ce qui concerne les pyréthrinoïdes, l’Anses fait quant à elle état d’une utilisation domestique généralisée, ciblant notamment les insectes volants et rampants, les mites (diffuseurs) ou encore les insectes des plantes extérieures et des potagers, et contribuant potentiellement à la contamination des personnes. Et de rappeler que « la réduction des utilisations au strict nécessaire est un élément de maîtrise essentiel des risques pour les produits biocides, vétérinaires ou phytopharmaceutiques ».