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Eloi : scinder l’exploitation pour mieux la céder
Pour alléger le poids de la cession et donc de la reprise, l’entreprise à mission Eloi propose aux cédants de scinder leur exploitation pour laisser la place à plusieurs repreneurs distincts, sinon de réserver une place à un repreneur porteur d’une activité de diversification. Une singularité non dénuée de bon sens et reconnue par un Sommet d’Or.
Des exploitations trop grosses et donc trop chères, dont l’orientation technico-économique ne cadre pas avec les aspirations des porteurs de projet, notamment les Non issus du milieu agricole (Nima), mais sur l’épaule desquels repose (en partie) l’avenir de de l’agriculture : tel est l’un des freins à la transmission-installation. Cette problématique a parfaitement été identifiée par Eloi, nouvel acteur de la transmission. « Nous avons développé une expertise sur les profils-types d’exploitations que les porteurs de projets aspirent à reprendre, en terme d’orientation technico-économique, de dimensionnement ou encore de budget, explique Camille Fournier, coordinatrice référente chez Eloi. On a ainsi tiré à gros traits les ateliers-types des repreneurs, que nous confrontons à l’offre des cédants. Si l’offre et la demande coïncident, on part sur une installation classique. Dans le cas contraire, nous proposons aux cédants la constitution d’une grappe ».
De la cession à la scission
Par grappe, Eloi entend la dissociation de l’exploitation en plusieurs entités qui seront reprises séparément par plusieurs porteurs de projets. « Chaque porteur de projet est propriétaire de ses bâtiments, d’un parcellaire, d’une résidence le cas échéant, explique Camille Fournier. Il gère son exploitation en totale autonomie, tout en modulant le degré de synergie souhaité avec le ou les autres membres de la grappe. C’est un fonctionnement du type « bon voisinage », qui a plus à voir avec celui de la copropriété plutôt qu’une grande colocation. La grappe permet à chaque repreneur de mener à bien le projet qui lui correspond, sans payer trop cher la ferme et sans se mettre un boulet à chaque pied dès le départ ». Le cédant s’assure quant à lui la cession de son exploitation.
A défaut de scission, la diversification
Problème : certains cédants ne sont pas forcément disposés à accepter une forme de démembrement de leur exploitation, préférant une cession en bloc. Mais encore faut-il trouver le repreneur, sinon le nouvel associé de Gaec qui acceptera de se fondre dans une exploitation qu’il ne connaît ni d’Ève ni d’Adam, une difficulté à laquelle sont confrontés les Gaec laitiers, comme l’a documenté l’Institut de l’élevage. « Chez Eloi, nous avons fait le choix de ne pas nous positionner sur l’installation au sein d’un Gaec existant car nous considérons que le risque humain est très élevé, souligne Camille Fournier. Rejoindre un Gaec revient à se marier avec des gens que l’on ne connaît pas et dont la relation au travail peut être très différente. Dans ce genre de situation, nous proposons une autre forme de grappe, consistant à céder une partie de l’exploitation à un porteur de projet. Cette situation peut correspondre à un Gaec, confronté au départ d’un associé. Elle peut aussi convenir à un exploitant individuel qui souhaite anticiper son futur départ en retraite. La grappe lui permettra de monétiser une partie de ses biens d’exploitation et d’alléger son activité. Ce faisant, le cédant se trouvera à la tête d’une exploitation plus facilement transmissible, le jour de la retraite venu ».
Candidate à réfléchir sur la future loi d'orientation
Créée en 2019, Eloi se définit comme une entreprise à vocation sociale et solidaire engagée dans la transmission et l’installation d’exploitations porteuses de transition agroécologique et sociale. Principalement présente dans le Grand Ouest, elle essaime actuellement en Auvergne Rhône-Alpes et en Nouvelle-Aquitaine. L’entreprise mise beaucoup sur le digital et sur les réseaux sociaux pour se faire connaître des cédants et des porteurs de projet, s’affranchissant ainsi de tout cloisonnement géographique.
L’entreprise affiche au compteur 50 projets de transmission, 40% le sont sous forme de grappe (à 50/50 cession/diversification) et 60% sous forme classique. Elle dispose actuellement d’un vivier de 1000 porteurs de projets, grossissant quotidiennement. « Nous ne sommes pas hors-système, prend soin de préciser Camille Fournier. Nous développons des partenariats avec tous les acteurs de la transmission et de l’installation, qu’il s’agisse des Chambres, des PAI, des centres de gestion ou encore des banques, vers qui nous orientons les porteurs de projet ». Eloi se considère comme un point-relais prenant sa part, même modeste, au défi du renouvellement des générations. A ce titre, l’entreprise fait acte de candidature pour être associée aux concertations préalables à la future loi d’orientation et d’avenir de l’agriculture, annoncée pour le premier semestre 2023.