Régénération des agriculteurs : 6 recommandations pour installer plus et mieux

Et si les dispositifs de préparation et d’accompagnement à l’installation portaient une part de responsabilité dans le défaut de renouvellement des agriculteurs ? Le CGAAER s’est livré à un diagnostic et propose des ajustements de la politique d’installation, beaucoup plus inclusive, tant au niveau des profils des candidats que des acteurs mobilisés.

« Un tiers seulement des porteurs de projets accueillis au Point accueil installation (PAI) parviennent à l’installation tandis qu’un tiers seulement des nouveaux installés ont bénéficié d’un Plan de professionnalisation personnalisé (PPP) validé » : en une phrase, le Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux (CGAAER), dans un rapport d’inspection commandité par le ministère de l’Agriculture, pointe la faille des dispositifs de préparation et d’accompagnement à l’installation.

Un début d’explication ne tarde pas : 60% des candidats à l’installation accueillis en PAI sont des Non issus du milieu agricoles (NIMA) et 50% des candidats sont dépourvus de capacité́ professionnelle. « Ces changements dans les profils et les projets nécessitent une plus grande diversité et personnalisation des parcours d’installation, lesquels devront s’ouvrir davantage aux différents acteurs impliqués pour bénéficier de toutes les compétences et apporter des réponses appropriées aux porteurs de projets », relève la mission.

Revoir la gouvernance

La mission d’inspection ne remet pas fondamentalement en cause l’architecture des dispositifs, pilotés depuis 2015 par le Comité national de l’installation et de la transmission (CNIT) et ses déclinaisons opérationnelles régionales (CRIT), sous l’égide des Préfets et des Régions. Mais elle estime leur gouvernance perfectible, jugeant que les CRIT ne s’approprient pas suffisamment leurs missions de conception, d’animation et d’évaluation du dispositif d’installation.

Les CRIT « devraient également s’assurer du respect, dans les départements, de la pluralité des acteurs de l’accompagnement et de l’offre de formation ». La mission du CGAAER entérine ainsi les critiques de certaines OPA se plaignant de dysfonctionnements dans la mise en œuvre des cahiers des charges des PAI, des Centres d’élaboration du plan de professionnalisation personnalisé (CEPPP) et du stage collectif de formation de 21 heures, le tout financé par le Programme d’accompagnement à l’installation et à la transmission en agriculture (PAITA).

Fusionner PAI et CEPPP, intégrer les projets émergents peu matures

Pour renforcer l’accompagnement des porteurs de projet, le CGAAER propose de fusionner les PAI et les CEPPP dans un guichet unique départemental, garantissant le pluralisme des compétences et la transparence sur l’information et les offres de formation. Dans deux tiers des départements, les Chambres d’agriculture sont du reste labellisées pour les deux fonctions.

La mission propose par ailleurs d’intégrer une nouvelle compétence au PAI/CEPPP, à savoir l’appui à l’émergence de projets d’installation peu matures, sans solutions d’accompagnement en l‘état actuel car situé en amont du parcours à l’installation. « Il n’est plus possible d’ignorer cette phase, sous peine d’écarter dès le premier contact avec le PAI un grand nombre de porteurs de projet », estime la mission.

Poursuivre la labellisation ou désigner les Chambres comme guichet unique ?

La mission propose que les Chambres d’agriculture demeurent la clé de voute du dispositif, en vertu de leur rôle d’accueil et d’information des porteurs de projet, réaffirmé dans sa nouvelle Convention d’objectifs et de performance (COP), signée en novembre dernier. Le CGGAER propose le choix entre deux approches, la première consistant à maintenir le processus de labellisation triennal (intégrant les recommandations énoncées plus haut), la seconde désignant les Chambres comme guichet unique d’accueil et d’élaboration du PPP, associant tous les acteurs et moyennant conventionnement et suivi annuel. Ce second scénario pourrait être déployé à titre expérimental dans certaines régions, sous la supervision de l’Etat et des Régions.

La mission d’inspection mise sur « la bonne intelligence » et le « volontarisme » de toutes les parties prenantes pour rénover le dispositif, avec en ligne de mire le transfert aux Régions des aides à l’installation le 1er janvier 2023, conformément au Plan stratégique national.

Les 6 recommandations du CGAAER

- mettre en place, à partir de 2023, sur un échantillon de points d’accueil, un suivi de cohorte depuis l’entrée en PAI jusqu’à la sortie du dispositif soit par abandon, soit par l’installation, aidée ou non aidée, afin d'évaluer la capacité du dispositif à accompagner efficacement la diversité des porteurs de projet

- assurer une information coordonnée et transparente sur le dispositif préparatoire à l’installation auprès de tous les candidats porteurs de projet, avec le regroupement de toute l’information régionale sur un même site Internet (présentation simplifiée du parcours, coordonnées des PAI et CEPPP, liste, compétences et spécificités de l’ensemble des acteurs, offre de formation...), conçu et actualisé par les Chambres, sous le contrôle du Comité régional de l’installation et de la transmission (CRIT)

- renforcer la personnalisation des parcours en fonction des besoins des porteurs de projets : intégration de l’appui à l’émergence et de l’acquisition d’une expérience pratique dans le PAITA pour permettre le financement d’un socle de base d’actions et assurer un statut aux personnes concernées, mobilisation de l’ensemble des ressources disponibles, y compris les dispositifs alternatifs et émergents en les intégrant au PPP, développement d’une diversité de modalités d’acquisition de la capacité professionnelle agricole telle que VAE et formation à distance, suivi par le référent du besoin de formation post-installation

-  mettre en place une Conférence des financeurs (État, Région, Pôle emploi, Vivea, Ocapiat, autres collectivités), inventorier, diversifier, mobiliser et diffuser les financements des formations

- mettre en place un dispositif d’accueil et d’accompagnement unique par département (fusion des PAI et des CEPPP intégrant les questions d’accueil, d’orientation, de formation et de transmission), assorti d’une ouverture au pluralisme des compétences

- renforcer la gouvernance régionale (CRIT) au service d’une information transparente, du respect de la diversité des acteurs et de l’offre de formation