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Emissions de méthane, protoxyde d’azote, ammoniac… : l’agriculture sur la bonne trajectoire
Depuis 2019, les émissions de gaz à effet de serre du secteur suivent une trajectoire compatible avec le budget provisoire SNBC-3 pour 2029-2033. Il en est de même pour les émissions de polluants atmosphériques, sous réserve, dans les deux cas, que les tendances se maintiennent. Mais 2023 et 2024 marquent un ralentissement de la réduction des GES.
Le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa), l’organisme en charge de l’inventaire des gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques, a publié le 16 juin son rapport annuel dressant le bilan définitif des émissions pour l’année 2023 et une première estimation pour l’année 2024. Tous les indicateurs sont globalement orientés à la baisse, qu’il s’agisse des gaz à effet de serre (CH4, NO2) et des polluants atmosphériques (NH3, NOx, particules, composés organiques volatils). « Les émissions agricoles suivent depuis 2019 une trajectoire qui semble compatible avec le budget provisoire SNBC-3 pour 2029-2033 si les tendances se maintiennent », lit-on dans le rapport. En ce qui concerne les émissions de polluants atmosphériques, relatives à 2023 toujours, avec des émissions totales de NH3 inférieures de 19% au niveau de 2005 et des émissions inférieures de 64% pour les PM2,5 (particules de diamètre inférieur à 2,5μm), « les objectifs sont bien respectés ».
20% des émissions totales de GES en 2023
L’agriculture est un contributeur important de ces différentes émissions puisque responsables de 81% du N2O (protoxyde d’azote), 71% du CH4 (méthane), 96% du NH3 (ammoniac), 57% des TSP (particules en suspension), 41% des COVNM (composés volatils organiques), 24 % du NOx (oxyde d’azote), 19% des particules PM10 (particules de diamètre inférieur à 1μm).
En 2023, l’inventaire national des émissions françaises de GES attribue à l’agriculture 20% de ses émissions, soit 76 Mt CO2e, en baisse de 1% sur un an. L’élevage concentre 60% des émissions de GES, devant les cultures (27%) et les engins, moteurs et chaudières en agriculture et sylviculture (13%).
La Stratégie national bas carbone (SNBC) révisée en 2018-2019 vise à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 tous secteurs confondus. Pour l’agriculture, la stratégie vise à réduire les émissions de 18% en 2030 par rapport à 2015, puis de 46% en 2050. En termes de rythme de réduction, cela suppose une accélération par rapport au passé, indioque le Citepa : -1,4% par an environ seront nécessaires sur la période 2020-2030 en comparaison des -0,7% par an observés sur la période 2010-2020. En 2023 et 2024, les émissions de GES agricoles ont baissé respectivement de 1% et 0,4%.
Le budget carbone ajusté dans la SNBC-2 couvrant la période 2019-2023, de 81,2 MtCO2e/an, est au-dessus du niveau moyen observé de 79,3 MtCO2e/an sur la période, ce qui signifie que l’agriculture a fait davantage d’efforts que demandés. A horizon 2030, le secteur agricole doit atteindre 70,7 MtCO2e d’après la SNBC-2 ajustée soit une réduction attendue de 1,1% par an. La SNBC-3 provisoire renforce cet objectif, avec un budget de 65 MtCO2e.
Méthane : -19% sur la période 1990-2023
La principale source d’émissions de CH4 est l’élevage (fermentation entérique et gestion des déjections animales), le solde correspondant aux émissions des rizières, du brûlage de résidus et des engins agricoles. Entre 1990 et 2023, ces émissions ont diminué (-19%) du fait notamment de la baisse du cheptel des vaches laitières (- 2,1 millions de vaches laitières soit - 40%).
En revanche, les émissions de même que la production laitière ne baissent pas dans les mêmes proportions, car cette baisse du cheptel a été compensée par un troupeau de plus en plus performant, émettant en moyenne plus de CH4 par tête au fil du temps. Ainsi, les émissions de CH4 de la fermentation entérique des vaches laitières ont baissé d’environ 4,9 Mt CO2e soit - 27% sur la période. Pour le reste du cheptel bovin, les effectifs diminuent également sur la période (17%) induisant une baisse des émissions pour la fermentation entérique (3,4 MtCO2e soit -14%).
Protoxyde d’azote : -21% sur la période 1990-2023
La baisse des émissions constatée sur toute la période 1990-2023 (-5,9 MtCO2e soit )21%) s’explique par une moindre utilisation de fertilisants azotés minéraux et une diminution du cheptel bovin engendrant une réduction à la fois de l’azote excrété à la pâture et de l’azote organique à épandre
Ammoniac : -27% sur la période 1990-2023
Les émissions de NH3 de l’élevage ont globalement diminué depuis 1990 (-29%), du fait de l’érosion du cheptel bovin. Cependant, des réductions notables se retrouvent également chez les porcins, du fait de la progression de l’alimentation biphase et du traitement des effluents par nitrification-dénitrification, et enfin au niveau des volailles, avec la disparition progressive des systèmes en fosse profonde chez les poules pondeuses (systèmes très émetteurs) et l’ajustement de l’alimentation aux besoins en azote des volailles.
Sur la période 1990-2023, le secteur agricole a vu ses émissions baisser de 27%. Les émissions incluses dans le poste cultures représentent 64% des émissions agricoles de NH3 en 2023 contre 36% pour celles liées à la gestion des déjections animales au bâtiment et au stockage. La majeure partie de ces émissions est à imputer au cheptel bovin (61%), suivi des cheptels porcins (18%) et volailles (16%).
Oxydes d’azote : -76% sur la période 1990-2023
Une partie des émissions de NOx du secteur agriculture/sylviculture est générée par les moteurs des engins. La diminution des émissions de NOx depuis 1990 (- 50%) est à mettre en lien avec le renouvellement du parc de tracteurs (- 84% d’émissions sur la période 1990-2023). Les émissions NOx ont diminué de 76% entre 1990 et 2023. La baisse constatée sur la période s’explique principalement par une baisse de l’azote minéral apporté. Une faible part des émissions de NOx provient du brûlage de résidus agricoles. Le brûlage de résidus agricoles est une pratique interdite en France, sauf dans le cas de dérogations préfectorales pour des raisons sanitaires. Environ 80% des émissions de NOx proviennent du brûlage des sarments de vigne dont l’activité peut être autorisée à titre dérogatoire selon la période de l’année et sous certaines conditions selon les préfectures.
Composés organiques volatils : -13% sur la période 1990-2023
Les émissions de Composés organiques volatils (COVNM) agricoles proviennent principalement de la gestion du fumier, des entrepôts d'ensilage (fermentation des fourrages), mais aussi du fonctionnement biologique des cultures (émissions attirant les insectes pollinisateurs par exemple). En 2023, les émissions de COVNM sont équitablement réparties entre les postes élevage et cultures.
Sur la période 1990-2023, ces émissions ont diminué (-13%) du fait d’une baisse sur le poste élevage (-14%), qui s’explique majoritairement par le recul du cheptel bovin et d’un recul du poste engins, moteurs et chaudières (-85%). Pour le poste cultures, on constate une hausse des émissions (+4%) en lien avec le fonctionnement biologique des cultures, les autres postes (engrais organiques et pâture) étant globalement à la baisse, toujours principalement en lien avec la baisse du cheptel bovin.
Particules totales en suspension : -8% sur la période 1990-2023
Entre 1990 et 2023, les émissions de particules totales (TSP) en suspension du secteur agriculture/sylviculture ont globalement diminué (- 8%) du fait de légères réductions des surfaces agricoles et de l’amélioration du parc des tracteurs. 92% des émissions de TSP proviennent des cultures, loin devant la gestion des animaux en bâtiment. Les volailles sont responsables de 56% des émissions de TSP.