L’obligation du Conseil stratégique phytosanitaire, c’est pour bientôt

Il ne sera obligatoire qu’à compter du 1er janvier 2024. Mais les Chambres d’agriculture, d’ores-et-déjà en ordre de marche, invitent les agriculteurs à l’anticiper pour éviter un gros embouteillage à la veille de l’échéance.

L’instauration du Conseil stratégique phytosanitaire (CSP) découle de la séparation de la vente et du conseil des produits phytos, elle-même issue de la loi Egalim du 30 octobre 2018. Avant le 31 décembre 2023, toute exploitation utilisatrice de produits phytos devoir reçu un premier conseil stratégique, à l’exception de celles en bio et en conversion (sur l’intégralité de l’exploitation) et de celles certifiées HVE. La tentation peut être forte d’attendre le dernier moment. D’abord parce que l’opération, en plus de constituer une nouvelle contrainte, va coûter un peu d’argent (entre 500 et 1000 euros). Ensuite parce que sa réalisation aura pour effet de programmer le deuxième CSP, la loi imposant la réalisation de deux CSP espacés de deux à trois ans en cinq ans.

Un risque patent d’embouteillage

Dès 2021, les Chambres d’agriculture se sont emparées du sujet, en commençant par former des conseillers et en réalisant des CSP « à blanc » pour tester le dispositif. « Aujourd’hui, notre offre est d’ores-et-déjà disponible sur 95% du territoire, déclare Sébastien Windsor, président de l’APCA. Le réseau mobilise 90 équivalents temps plein pour réaliser les CSP, ne mission qui devrait très largement échoir aux Chambres, peu d’acteurs s’étant positionnés sur cette prestation. Afin de ne pas risquer l’embouteillage à l’approche de l’échéance réglementaire, nous invitons les agriculteurs à faire preuve d’anticipation pour s’assurer d’être conformité avec la loi ».

Le conseil stratégique comporte un diagnostic des pratiques et des IFT au regard du contexte de l’exploitation et formalise un plan d’actions pour réduire l’usage et/ou l’impact des produits phytosanitaires.

Des incidences pas neutres

L’enjeu règlementaire n’est pas neutre. Outre le risque de s’exposer à une non-conformité en cas de contrôle, la détention du CSP sera obligatoire pour pouvoir renouveler son Certiphyto à compter de 2024. Les Chambres misent d’ailleurs sur les distributeurs pour porter le message, sans quoi ils ne pourront pas vendre leurs produits aux agriculteurs en défaut.

L’APCA en appelle aussi à l’Etat. Face à l’afflux d’activité que va générer la réalisation des CSP, les chambres vont devoir recruter, une opération rendue compliquée par le statut anachronique des salariés, mais promise à être levée dans les mois à venir, sous l’effet de la loi Asap. L’APCA souhaiterait par ailleurs une autre évolution statutaire, relative à la taxe d’apprentissage, dont les chambres ne sont pas exonérées dans le cadre actuel. « Quel meilleur formule que de former les jeunes par la voie de l’apprentissage, qui les rendrait opérationnels dès leur sortie de l’école », argumente Sébastien Windsor.

"Le Conseil stratégique phytosanitaire ne sera pas un document pour caler l’armoire"

Il faut dire que l’APCA s’est fixée des objectifs qualitatifs ambitieux en matière de Conseil stratégique. « L’accompagnement sera basé sur le projet de l’agriculteur, poursuit Sébastien Windsor. On va discuter avec chaque agriculteur pour évoquer les pistes de réduction d’usages de phytosanitaires et qu’il en sorte avec son propre projet, ses propres ambitions. On ne veut pas d’une prestation pousse-bouton pour satisfaire le réglementaire et produire un document qui servira à caler l’armoire ». Normande ou pas.