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La forêt des Landes : royaume du poulet fermier en liberté
Dans le Sud-Ouest, l’élevage de volailles ne ressemble pas toujours à ce qu’on imagine. Depuis plus de 60 ans, un système atypique s’est installé dans le paysage agricole local. Sur le terrain, Bernard Tauzia perpétue une méthode de production singulière, où des cabanes mobiles ont transformé la manière d’élever… et de goûter.
Sinuant à travers la forêt des Landes, Bernard Tauzia, éleveur de volailles Label Rouge, nous guide vers son champ : il souhaite nous faire découvrir une méthode d’élevage ancestrale de Gascogne. Avant même d’atteindre la prairie, un concert assourdissant de cancanement se fait entendre. Au loin, à l’ombre, sept petits mobil-homes se succèdent, juxtaposés à la forêt des Landes. Quelques-unes picorent le sol sableux entre les aiguilles de pin et les fougères, d’autres restent à l’abri dans leur poulailler.
Un modèle né dans les Landes …
Ici, les gallinacés ne grandissent pas dans des bâtiments fixes, mais dans des cabanes mobiles, appelées localement “marensines”, utilisées depuis les années 60 et déplacées tous les ans. Ce type d’élevage, propre à la région, a été valorisé par la création du tout premier Label Rouge : volailles fermières des Landes en 1965 puis par une Indication Géographique Protégée obtenue en 1998. Sur son exploitation de 190 hectares située à Campagne, au cœur des Landes, Bernard Tauzia perpétue ce modèle de production “comme nos aînés l’ont fait”.
… Au service de la qualité
Outre la liberté totale dont jouissent les poules pour explorer, gratouiller le sol forestier et se muscler les pattes, cette mobilité permet au site de se régénérer : la végétation repousse et les insectes reviennent. Une sorte de jachère volaillère. De plus, ce système améliore le bien-être animal : “elles ne sont que 1000 par cabane de 60 m2, contre 4000 dans les autres élevages”. Chaque année, ce sont plus de 20 000 volailles élevées sur l’exploitation. Les 14 700 poulets fermiers des Landes sont accueillis par lots de trois, élevés dès leur premier jour à leur 88e jour environ. "Nous fabriquons les aliments sur place, les volailles sont nourries à base de maïs, soja, tournesol et colza”, poursuit Bernard Tauzia. De plus, “le prix de la vente des volailles est indexé sur les cours de l’aliment, à savoir le blé, le maïs etc… - ce qui nous permet de conserver une marge stable, même en période de hausse. C’est une vraie sécurité.”
L’élevage en plein air présente aussi quelques désagréments
“Nous avons subi une crise d’influenza aviaire particulièrement sévère dans la région pendant presque 5 ans. Une année, nous n’avons pas pu produire de chapons car ils grandissent en liberté. Heureusement les dindes ont été rentrées juste avant le confinement, ce qui a permis tout de même d’assurer la production. Depuis 2 ans, tout va bien, la vaccination a bien fonctionné”. Mais avec l’élevage en plein air, il faut aussi composer avec les tempêtes qui endommagent parfois les cabanes et la prédation. “Nous sommes très amis avec les chasseurs”, plaisante Bernard Tauzia. “Quand les renardes ont des petits, nous sommes particulièrement vigilants. Mais les poulets ne vont jamais au-delà de 150 m et ils restent constamment groupés. En échange, ils bénéficient d’une totale liberté, ce qui leur donne un goût de la chair unique, et ça, ça n’a pas de prix !”
La volaille de fête, un produit d’exception
Fils d’un éleveur de canards, il s’est tourné exclusivement vers l’élevage avicole et la production de volailles de fêtes en 1984 qui sont prisées par les restaurateurs et la filière. Le résultat se goûte à table : plus ferme, plus parfumée, la viande développe une texture et un goût inimitables. "Ce mode d’élevage redonne au poulet son vrai goût. Une chair ferme, juteuse, avec un grain plus fin", assure-t-il. C’est également le cas de ses 8000 pintades chaponnées destinées aux fêtes de fin d’année. Élevées et nourries comme les poulets, elles reçoivent en fin d'engraissement un complément de poudre de lait pour affiner la viande et la rendre plus moelleuse. Elles atteignent environ 2,8 kg avant d’être envoyées dans un abattoir de la région autour du 10 décembre. A 64 ans, Bernard Tauzia ne se lasse pas de leur goût. “Si vous avez l’occasion d’y goûter, vous verrez, c’est très très bon”, dit-il avec un grand sourire. Reste à savoir si l’on commence par l’aile ou la cuisse.