Moissons en berne : l’AGPB réclame des prêts garantis par l’Etat et une véritable ambition

Aux prises à la pire récolte depuis 40 ans, les céréaliers désespèrent un « gouvernement des affaires urgentes » apte à répondre au mur des trésoreries exsangues, et au-delà, à cesser de les désarmer face à des compétiteurs sans entrave.

Trois milliards d’euros : c’est le manque à gagner des céréaliers à l’issue de la moisson 2024, selon l’AGPB. La triple peine : c’est celle constituée par la chute des rendements et de la production, la hausse des charges et des cours au plus bas. Bilan ? « Il manque aujourd’hui entre 50.000 euros et 100.000 euros par exploitation pour financer la prochaine campagne », alerte dans un communiqué Eric Thirouin, président de l’Association générale des producteurs de blé et autres céréales à paille (AGPB).

La plus faible récolte de blé depuis 40 ans

Le dénominateur commun au marasme annoncé n’est autre que la météorologie, « une des campagnes les plus compliquées à gérer sur une période aussi longue » selon Arvalis, avec des pluies régulières et continues du semis jusqu’à la récolte (+40% en moyenne en France par rapport aux 20 dernières années), une forte pression des adventices et des maladies, et pour finir, une baisse du rayonnement affectant une grande partie du territoire (-7% en moyenne sur la France par rapport aux 20 dernières années et jusqu’à -15%). Résultat : avec une prévision 26,3Mt en 2024, la récolte de blé tendre pourrait être la plus faible jamais enregistrée depuis 1983 (24,5 Mt), en retrait de 24,9% sur un an (avec 10,8% de SAU en moins) et de 23,9% par rapport à la moyenne quinquennale 2019-2023. Le blé tendre ne fait malheureusement pas exception, l’orge pointant à -15,3% (10,4Mt), le blé dur à -8,3% (1,2Mt).

Des prêts garantis par l’Etat

Pour faire face au mur de trésorerie, l’AGPB réclame « dans les plus brefs délais » la mise en place de prêts garantis par l’Etat. « Pour les céréaliers, les aléas climatiques ne relèvent évidemment pas de la responsabilité des pouvoirs publics, mais celle-ci sera en revanche immense pour activer tous leviers possibles qui permettrons aux céréaliers de sortir la tête de l’eau et de surmonter cette crise , affirme le  président des céréaliers de France. Après sept semaines de gouvernement des affaire courantes, l’AGPB appelle ainsi à un "gouvernement des affaires urgentes" ».

En finir avec les entraves à la compétitivité

Au-delà de la situation conjoncturelle, les céréaliers attendent des mesures de fond de nature à restaurer la compétitivité de la filière, mise à mal par « les impasses techniques et agronomiques qui se multiplient sous le coup de réglementations, restrictions et interdictions successives (...) Les céréaliers français ne jouent plus à armes égales avec les principaux pays producteurs et exportateurs de céréales à paille et en paient aujourd’hui le prix fort sur leur compétitivité », juge l’AGPB qui évoque des moyennes de rendements de blé tendre qui « dévissent progressivement » depuis 2015 et une sole qui a abandonné plus d’un million d’hectares en dix ans. « Doit-on se résigner à laisser sombrer une filière d’excellence qui contribue à la souveraineté alimentaire de notre pays et à son influence dans le concert des nations ? Les céréaliers attendent du futur gouvernement, autant que des élus de la Nation, des actes forts : de la reconnaissance et la préservation du potentiel économique, nourricier, géopolitique et sociétal de la filière céréalière », conclut Eric Thirouin.