Prairies : une France coupée en deux par la sécheresse

Après un début de campagne prometteur, la production fourragère s'essouffle au nord tandis que le sud maintient pour l'instant un bilan positif.

La campagne fourragère 2025 avait démarré sous les meilleurs auspices avec un excédent significatif au printemps. Mais en ce début d’été, le bilan national s'est progressivement normalisé pour atteindre un niveau légèrement inférieur à la moyenne de référence (1989-2018). Cette évolution masque toutefois d'importantes disparités régionales.

Un retour à la normale qui cache des contrastes marqués

Les dernières données du service statistique du ministère de l'Agriculture (Agreste) révèlent qu'au 20 juin 2025, la production cumulée des prairies permanentes en France métropolitaine est inférieure de 1% à la moyenne observée sur la période de référence. Ce chiffre, qui pourrait sembler rassurant, marque en réalité une dégradation progressive de la situation. L'excédent du début de campagne, qui atteignait encore 32% en avril, s'est complètement résorbé sous l'effet conjugué du manque de précipitations et des fortes chaleurs.

À ce stade de l'année, 57% de la pousse annuelle de référence est réalisée, ce qui correspond au niveau normal attendu. Cependant, sur les deux derniers mois, la production accuse un déficit de 20%, signe d'un ralentissement préoccupant de la croissance de l'herbe.

Une fracture nord-sud qui s'accentue

La carte des rendements par région fourragère dessine une France coupée en deux. Dans la majorité des régions au nord de la Loire, le manque d'eau s'intensifie depuis plusieurs mois, entraînant une baisse significative de la production d'herbe. Les Hauts-de-France et les Pays de la Loire sont particulièrement touchés avec un déficit proche de 25%.

Indicateur de rendement des prairies permanentes par région fourragère au 20 juin 2025 (Sources : INRAe, Météo France, SSP)

De leur côté, les nappes phréatiques sont bien remplies. Mais les sols en surface sont très secs, limitant drastiquement la croissance des prairies. Selon le bulletin national de situation hydrologique, l'humidité des sols sur la Normandie, les Hauts-de-France et la Champagne-Ardenne affichait déjà fin mai des valeurs comparables à celles normalement atteintes fin juillet.

Cette situation a conduit à la mise en place de restrictions d'eau dans plusieurs départements, avec, au 27 juin, 5 départements déjà placés en situation de crise et 20 autres en alerte ou alerte renforcée.

Des disparités régionales marquées

À l'inverse, la moitié sud du pays présente un bilan plus favorable. Les pluies plus fréquentes ont permis une production abondante durant la première partie du printemps. Si le manque d'eau commence également à se faire sentir dans ces régions, la sécheresse superficielle étant récente, la production cumulée reste excédentaire par rapport à la normale.

Indicateur de rendement des prairies permanentes par région au 20 juin 2025

L'analyse des indices ISOP (Informations et Suivi Objectif des Prairies) par région administrative confirme ces contrastes. Les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur (138%), Occitanie (113%) et Auvergne-Rhône-Alpes (111%) affichent les meilleurs résultats avec des productions nettement excédentaires. La Nouvelle-Aquitaine (99%) se situe dans la moyenne nationale.

En revanche, les régions du nord présentent des situations déficitaires : Pays de la Loire (77%), Hauts-de-France (79%), Normandie (84%) et Bretagne (87%) accusent des déficits significatifs. Le Centre-Val de Loire (96%), l'Île-de-France (84%), la Bourgogne-Franche-Comté (101%) et le Grand Est (97%) présentent des situations intermédiaires.