Vers une révision du référentiel HVE

Le ministère de l’Agriculture annonce une révision de la certification Haute valeur environnementale (HVE), dont l’alignement sur la certification Agriculture biologique (AB) dans le cadre de l’écorégime de la Pac est assimilée à du « greenwashing » par plusieurs organisations.

L’arrêt de la certification de la HVE par la voie B, l’exclusion des produits classés CMR (cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques), la prise en compte des références régionales en matière d’Indice de fréquence de traitement (IFT) : telles sont quelques-unes des remises en question dont pourrait faire l’objet la certification HVE. Le ministère annonce en effet avoir engagé une révision de cette certification, qui depuis plusieurs mois fait l’objet de critiques récurrentes de la part de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab) ou encore de la Confédération paysanne, assimilant la HVE à du « greenwashing », du faux verdissement.

Ces organisations s’appuient sur plusieurs études émanant du collectif « Pour une autre Pac » ou encore de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) pointant la faiblesse des exigences environnementales de la HVE apparue il y a tout dix ans dans le Code rural, donnant alors un corpus à ce que l’on appelait à l’époque l’agriculture raisonnée.

Un référentiel rénové pour l’écorégime

Il y a quelques jours, un article du quotidien Le Monde, révélant l’existence d’une note de l’Office français de la biodiversité, établissement public, pointant lui aussi les faiblesses de la HVE, a enfoncé un nouveau coin. Ce dont n’a pas manqué de se saisir la Fnab, passablement agacée de voir cette certification élevée au même rang que l’AB dans l’écorégime, qui va capter à lui seul entre 20% et 30% du budget du 1er pilier de la Pac, soit la modique somme de 1,6 milliard d'euros par an pour la France, en retenant l’hypothèse d’un arbitrage à 25%, en cours de discussion à Bruxelles.

« Modifier le référentiel d’une certification en plein essor aurait risqué de déstabiliser les agriculteurs, explique-t-on au ministère de l’Agriculture. La Commission nationale de la certification environnementale va entamer ce travail de révision, avec des conclusions attendues d’ici à 2022, ce qui permettra de disposer d’un référentiel rénové avant l’entrée en vigueur de l’écorégime en 2023 ».

Le ministère annonce par ailleurs la création d’une certification « CE2+ », autrement dit d’une certification de niveau 2 augmentée, laquelle sera éligible au niveau de base de l’écorégime quand la HVE sera éligible au niveau supérieur. « La CE2+ intègrera des obligations de résultat », précise le ministère. Pour rappel, le niveau 1 de la certification environnementale équivaut au respect de la réglementation environnementale. Le niveau 2 implique l’adoption de techniques et de pratiques à faible impact, listées dans un référentiel balayant quatre items (préservation de la biodiversité, stratégie phytosanitaire, gestion de la fertilisation et de la ressource en eau), mais sans obligation de résultat.

Ni galvaudage, ni rabotage

Reste à savoir si une HVE révisée contentera ses détracteurs, et notamment la Fnab, qui dénonce une cohabitation inepte au sein de l’écorégime. « La bio et la HVE ne sont pas sur un pied d’égalité, défend le ministère de l’Agriculture. Elles permettent toutes deux de franchir un saut en terme de transition agroécologique. Dans le règlement actuel de la Pac, les agriculteurs certifiés AB sont automatiquement éligibles au Paiement vert. Mais pour autant, personne n’a jamais prétendu que les exigences de l’agriculture biologique étaient du même niveau que celles du Paiement vert ».

"La prochaine Pac sera plus verte que la Pac actuelle"

Le ministère en profite au passage pour défendre ses arbitrages politiques et budgétaires au sujet de la bio, qui va voir son budget croître de 30% dans la programmation 2023-2027 de la Pac, orienté à 100% sur la conversion et confirmant l’abandon définitif de l’aide au maintien, dont les reliquats proposés par certaines Régions prendront fin le 1er janvier 2023. « Les Régions conserveront la possibilité de flécher des aides à l’investissement mais plus d’aides surfaciques, qui seront du ressort de l’État », précise le ministère, qui souligne au passage que la France accorde ses aides à la conversion durant cinq ans, contre trois ans dans certains pays membres de l’UE.

La Fnab dénonce une coupe franche de 66% des aides bio, soit une perte de 132€/ha, ce que réfute le ministère, qui rappelle que la bio émarge aux droits à paiement de base (DPB), au paiement redistributif, au futur écorégime et potentiellement aux aides couplées animales et à l’ICHN pour celles concernées par ces aides, sans oublier le crédit d’impôt et le paiement additionnel jeune agriculteur, le cas échéant.

« Avec l’écorégime d’une part et l’ex-paiement vert d’autre part, qui devient le socle de la conditionnalité s’appliquant à tous les paiements directs, la prochaine Pac sera plus verte que la Pac actuelle », affirme le ministère, qui voit par ailleurs dans l’écorégime la traduction d’une promesse présidentielle, à savoir l’intronisation des Paiements pour services environnementaux (PSE).

Les PSE se distinguent des MAEC par le fait qu’ils rémunèrent expressément des services environnementaux et sociétaux, quand les MAEC ont vocation à compenser les surcoûts et/ou les manques à gagner de pratiques agroécologiques. « La France met en œuvre des Paiements pour services environnementaux : c’est l’écorégime », affirme le ministère.