3 leviers pour réduire la consommation électrique en élevage laitier

Comment réduire la consommation électrique des élevages laitiers ? Face à la hausse des tarifs énergétiques, des solutions existent grâce à l'investissement d'équipements : pré-refroidisseur, récupérateur de chaleur ou la mise en place de micro-capteurs.

Le 18 juin dernier, la chambre d’agriculture des Pays de la Loire organisait à Baugé en Anjou, dans le Maine et Loire, une journée sur la thématique de la consommation énergétique en élevage dans une exploitation. L’un des thèmes abordés avec les participants était la réduction de la consommation énergétique, en particulier dans la production laitière

La consommation électrique d'un tank à lait

Sébastien Bordereau, du service énergie de l’organisme consulaire en Mayenne, a listé les principaux postes de consommation. « Le fonctionnement du tank à lait représente 43 % de la consommation et 27 % de la production d’eau chaude. Il faudra essayer d’agir sur ces deux postes qui représentent 70 % de la facture électrique » détaille-t-il. Pour permettre à chacun
d’identifier son potentiel de réduction de la consommation énergétique, il donne des indicateurs chiffrés. « Si vous êtes à plus de 150 kWh/1000l, il y a sans doute des choses à faire pour réduire la consommation » relève-t-il. Un chiffre à mettre en parallèle avec les exploitations les plus performantes à moins de 30 kWh/1000l.

Du robot de traite au tank à lait, investissez dans un pré-refroidisseur

Le refroidissement du lait est responsable de près de la moitié de la consommation électrique. Une alternative serait l'installation d'un pré-refroidisseur, un échangeur thermique (à plaques ou tubulaire) où l'eau froide et le lait chaud, circulent à contre-courant dans des circuits adjacents. Durant le processus, le lait va se refroidir et l’eau se réchauffer. Ainsi, au lieu d'arriver à 35°C dans le tank, la température du lait entrant se situe entre 17°C à 23°C. Selon l'Institut de l'élevage, une réduction de 1°C du lait, entraine une baisse de la consommation du tank de 0,5 Wh/litre. Les besoins en électricité diminueraient de 30 à 50 %. Autre atout, selon l'institut avec le GIE Elevages de Bretagne "en diminuant les chocs thermiques lorsque le lait est introduit dans le tank, le pré-refroidissement du lait entraîne également une réduction de la lipolyse induite. En cas de panne du tank, le lait pré-refroidi sera soumis à moins de risques de dégradation de la qualité, jusqu’à la remise en route des groupes frigorifiques."

Sur la ferme expérimentale de Derval en Loire-Atlantique (44), propriété de la chambre d'agriculture des Pays de la Loire, l’installation d’un pré-refroidisseur a permis de réduire la consommation du tank à 6,9 kWh/1000l en 2021 contre 12,6 kWh/1000l en 2018. « C’est un modèle qui fonctionne si la stabulation est à proximité et que l’éleveur peut récupérer l’eau pour l’abreuvement des vaches. Si c’est pour mettre l’eau à l’égout, ça n’a pas de sens » alerte Gilles Beaujean, également du service énergie de la chambre d’agriculture, mais sur la Sarthe et l’Est du Maine-et-Loire.

Le récupérateur de chaleur

« Pour faire du froid, un frigo doit faire du chaud. C’est pareil avec le tank » explique Sébastien Bordereau. Le récupérateur de chaleur s'installe sur le condenseur du tank. Le principe consiste à transférer les calories du lait vers l'eau plutôt que de les évacuer dans l'air via les condensateurs du tank à lait. L'eau préchauffée va directement dans le chauffe-eau, qui n'a plus à fournir autant d'énergie pour porter l'eau à température de consigne. 
Sur la ferme de Derval, le récupérateur de chaleur installé en 2013 a permis de diviser par trois la consommation électrique pour la production d’eau chaude, passant de 17,1 kWh/1000l en 2013 à 5kWh/1000l en un an à peine. Ces installations ont évolué au fil des années. « Aujourd'hui, les récupérateurs de chaleur sont moins complexes, plus efficaces et moins intrusifs. Il est possible de monter la température de l’eau à 55°C, contre 40°C auparavant, grâce au nouveau gaz frigorigène » assure-t-il.  Sébastien Bordereau met toutefois en garde sur l’installation de ce type de système intrusif sur le tank dans le cas où il n’appartient pas à l’éleveur. « Certaines laiteries traînent des pieds, car elles sont souvent propriétaires du tank » relève-t-il.

Sébastien Bordereau chargé de mission énergie à la chambre d'agriculture de Maine et Loire crédit Tanguy Dhelin

Identifier les anomalies

La mise en place d'équipements pour réduire la consommation électrique ne suffit pas toujours. Grâce aux compteurs individuels, les techniciens ont constaté une hausse conséquente de la consommation électrique, malgré l'installation d'un récupérateur de chaleur. Après examen, c'était l'installation qui s'était entartrée. Pour le conseiller énergie, cette anecdote illustre le besoin de connaître la consommation poste par poste des installations de la ferme afin d’identifier les potentielles anomalies. « C’est comme conduire sans tableau de bord. C’est possible, mais c’est quand plus simple avec un indicateur de vitesse et un niveau de jauge » illustre Gilles Beaujean.

Pour permettre aux éleveurs d’accéder à une analyse détaillée de leur consommation, la chambre d’agriculture étudie actuellement des solutions de micro-capteurs temporaires qui puissent être installés sur quelques jours. Au-delà des capteurs, les conseillers énergies préconisent des actions de « bon sens » pour réduire la facture énergétique. « Une chose simple à réaliser, c’est de nettoyer la grille derrière le tank. C’est une première étape pour réduire la consommation » souligne Gilles Beaujean. L’environnement de la laiterie est également important. « En hiver, 5°C de plus dans la laiterie, c’est 10Wh de plus au litre de lait » assure-t-il. Pour y remédier, il préconise de mettre les installations de froid à l’extérieur pour éviter que la chaleur produite ne réchauffe la pièce.

Combiner le pré-refroidisseur et le récupérateur de chaleur

Les deux technologies peuvent-elles être combinées ? En effet, la question se pose. Si le pré-refroidisseur réduit le besoin de refroidissement du tank, celui-ci générera également moins de chaleur pour chauffer l’eau chaude. La réponse dépend de la quantité de lait produite et donc du niveau de fonctionnement du tank. « À moins de 300 000l, il vaut mieux privilégier le récupérateur de chaleur. Entre 300 000 et 600 000l, c’est le pré-refroidisseur qui s’avère l’option la plus intéressante. À plus de 600 000l, il est possible de combiner les deux » détaille Gilles Beaujean