Téléchargez la nouvelle application Pleinchamp !

Dans le Puy-de-Dôme, Mathéo 22 ans, tond à la néo-zélandaise

Pas de meuglement cette année dans les allées du Sommet de l’élevage. L’épizootie a vidé les enclos, mais pas les allées. Et au fond du hall 5, Mathéo Flandre, 22 ans, fait une démonstration de tonte de brebis avec la méthode néo-zélandaise Bowen. Un métier atypique et discret mais pourtant indispensable.

"Je suis tondeur de moutons et éleveur de brebis", annonce Mathéo Flandre. C'est la première fois qu'il tond au Sommet de l'élevage devant une bonne vingtaine de curieux rassemblés autour du plancher. Ce n'est pas tous les jours, qu'on tond devant une foule. Loin d'être impressionné, Mathéo manie sa tondeuse avec précision. Le geste est net et rapide. On dirait presque que les brebis sourient, contentes de se débarrasser de leur laine. La tonte, souvent reléguée à l’arrière-plan des grands rendez-vous agricoles, s’est glissée cette année sous les projecteurs. 

Un métier physique mais les brebis ont l'air contentes ©LouiseDelaroa

Un métier discret mais indispensable

"C’est un métier qu’on ne croise pas tous les jours" confie Mathéo, concentré sur sa brebis, le corps en tension, les gestes précis. Dans le Puy-de-Dôme, ils ne sont qu’une petite dizaine à exercer la tonte de moutons. Un métier manuel, appris sur le terrain, parfois complété par des formations proposées par l’Association des Tondeurs de Moutons (ATM). "On se déplace chez les éleveurs avec notre plancher amovible. On est tous indépendants, mais on travaille en équipe", explique-t-il. Mathéo Flandre ne compte pas les moutons pour s'endormir mais bien pour être payé, car il est rémunéré à la tâche ! Il tond entre 500 grammes et 3,5 kilos de laine par brebis.

Mathéo Flandre, 22 ans, tondeur de brebis. ©LouiseDelaroa

Voir aussi : l'homme qui murmurait à l'oreille des Border Collie

La méthode Bowen, une chorégraphie néo-zélandaise

Mathéo ne tond pas n’importe comment. Il pratique la méthode Bowen, importée de Nouvelle-Zélande. Une technique qui allie confort animal et efficacité. « Elle permet de tondre sans comprimer les poumons, dans le meilleur confort possible, pour les éleveurs et bien sûr l'animal », explique-t-il. Le corps du tondeur devient outil : les jambes pour la contention, les bras pour la précision. Le mouvement est fluide, presque dansé. "On commence toujours par la même chose" : ventre, gigot gauche, cou, dos, deuxième côté, deuxième gigot. En quelques minutes, la brebis est déshabillée en un seul manteau avec 41 coups de tondeuse. Pas un de plus. Une toison entière, prête à être triée. « Chaque partie a sa valeur. Quand on a un seul morceau, c’est plus facile pour le tri et la valorisation de la laine», ajoute-t-il.

 

Le suint, cette graisse qui fait glisser la tondeuse

Au-delà de la démonstration technique, Mathéo Flandre partage les subtilités du métier. « La brebis a pas mal de graisse, c’est ce qu’on appelle le suint qui se situe sous la peau. Plus elle est chaude, plus la tondeuse glisse sur la peau. C’est comme le ski sur la neige. Si la brebis est froide, on peine à entrer sous la laine. » Pour favoriser cette chaleur - en particulier pendant l'hiver - les tondeurs regroupent les animaux dans des bâtiments tempérés. « Elles se réchauffent entre elles, comme des esquimaux sur la banquise. Elles transpirent, et cette transpiration fait fondre le suint. »

Une jeunesse qui tond à contre-courant

Mathéo Flandre incarne une génération qui redonne ses lettres de noblesse aux métiers de l’ombre. Sa démonstration, au Sommet, a rappelé que l’élevage, ce n’est pas que les concours. C’est aussi ces gestes précis, ces métiers de l'ombre, ces savoir-faire qui glissent entre les mains. La tonte, cette année, n’a pas fait de bruit. Elle a fait mieux : elle a fait sensation.