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Vendredi 05/12/2025

Désherbage : les PPAM cherchent de nouveaux leviers face à l’impasse chimique

Face à l’impasse chimique, la filière des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) cherche de nouvelles technologies de désherbage et remet à l’étude ses itinéraires techniques. Lors de la 6ème édition des rendez-vous d’Herbalia, les équipes de l’Iteipmei, institut technique en charge des PPAM, présentaient les premiers résultats.

Comme toutes les productions végétales, les cultures de plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) sont confrontées au retrait des matières actives. Au détail près que la filière représente 59.400 ha pour 300 espèces cultivées. Lavande, basilic, mélisse, artichaut, menthe ou encore œillette… La liste est longue. Autant dire que l’Iteipmei, l’institut de recherche qui leur est dédié, doit faire dans la dentelle pour résoudre les impasses rencontrées par chaque production. « Il y a une grande diversité de systèmes de culture », évoque Léonie Challant, chargée de mission en protection des cultures.

Les PPAM pérennes ou annuelles, implantées en semis ou en plantation sur des lignes ou en planche avec des interrangs plus ou moins larges, représentent autant d'itinéraires techniques qui appellent des solutions différentes de gestion de l’enherbement. « Actuellement, le principal problème des producteurs, c’est le séneçon commun car il produit des alcaloïdes toxiques. Nous estimons que 3 à 10 pieds par hectare peuvent suffire à faire déclasser un lot », évalue Julie Egon, également chargée de mission au sein de l’Iteipmei.

L’agronomie est aussi appelée à la rescousse, avec la gestion de couverts, ici aux côtés du thym
L’agronomie est aussi appelée à la rescousse, avec la gestion de couverts, ici aux côtés du thym

Les agroéquipements novateurs en relai de la chimie

Deux projets actuellement en cours, dénommés HO’PPAM’alt et Adhemar, doivent permettre de trouver des solutions aux problématiques d’enherbement de la filière. Les nouvelles technologies développées par les agroéquipementiers sont l’un des leviers étudiés dans le cadre d’Adhemar et du PARSADA. Au premier rang des innovations technologiques, l’Iteipmei a testé avec ses partenaires la détection par drone et la reconnaissance via intelligence artificielle des adventices. « L’entreprise Telespazio fait de la détection de datura par drone. Dans le cadre d’Adhemar, il développe la même chose pour le séneçon », détaille Léonie Challant. L’objectif est de pouvoir cibler les interventions dans la parcelle pour gagner du temps. Une approche qui nécessite encore quelques réglages. Les petites dimensions du séneçon obligent à un vol à basse altitude du drone pour les détecter. Ce qui entraîne un débit de chantier trop important pour le moment.

Détecter la culture plutôt que les adventices

Toujours en s’appuyant sur une caméra et une identification par IA, le robot Farming GT propose une autre approche. Il reconnaît la culture et bine tout le reste de la parcelle, incluant les zones couvertes d'adventices. Les résultats prometteurs devront être confirmés l’an prochain, tout comme ceux obtenus avec le robot Farmdroïd déjà bien présent sur le marché. « Les robots sont bien adaptés sur les petites surfaces qui représentent une partie de la production des PPAM, car ils peuvent repasser régulièrement », souligne Léonie Challant. L’an prochain, le robot Zauberzeug devrait également être testé. Son fonctionnement repose sur un foret qui vient détruire avec précision les adventices identifiées par l’IA.

Le laser, grand espoir du désherbage

Le projet Adhemar ne pouvait pas passer à côté du laser. En France, un producteur de PPAM est déjà équipé du LaserWeeder de l'Américain Carbon Robotics. Problème, cet équipement représente un coût d’acquisition très élevé. Dans le cadre d’Adhemar, Léonie Challant a pu observer une démonstration sur légumes de la marque grecque Terra Robotics qui affiche un prix bien moins élevé. « Mais je n’ai pas pu faire de comptage. Je ne me prononcerai pas sur l'efficacité », précise-t-elle. L’an prochain, c’est le robot avec laser Caterra conçu en Suisse qui devrait être testé par l’Iteipmei.

Avec l’implantation de la camomille en quadrillage 70X70 cm, le binage inter-rang se confond avec le binage inter-plant
Avec l’implantation de la camomille en quadrillage 70X70 cm, le binage inter-rang se confond avec le binage inter-plant

Bouger les lignes des itinéraires techniques

Les agroéquipements ne sont pas l'alpha et l’oméga des alternatives à la chimie. De nombreux leviers existent au sein des pratiques culturales pour la gestion des adventices. Le projet HO’PPAM’alt s’est ainsi intéressé à l’enherbement de trois cultures pérennes, la menthe, le thym et la camomille romaine. « Ce sont des cultures qui se salissent d’année en année et dans lesquelles il n’est pas possible de biner au-delà des interrangs », détaille Julie Egon. Un essai de paillage de miscanthus sur menthe en cours de culture a obtenu des résultats intéressants. « Il reste à évaluer le coût économique pour le producteur. Nous avons également constaté une faim d’azote sur la culture », explique la chargée de mission de l’Iteipmei. L’utilisation de toile de géochanvre pose les mêmes questions de coût. « Mais on nous avait indiqué une durée de 7 mois, et elle est toujours présente après 2 ans », se satisfait-t-elle.

Autre approche innovante, des essais ont été menés en quadrillage de 70 cm x 70 cm, plutôt qu’en planche, pour couvrir une plus large avec le binage. « Quand la camomille s'étale, le centre a tendance à dépérir, ce qui laisse de la place aux adventices pour se développer. Avec ce type de quadrillage, le centre reste vigoureux », constate Julie Egon

L’enjeu des couverts

À l’image des autres productions végétales, la maîtrise des couverts pérennes ou simplement durant l’hiver, représente un levier non négligeable pour la gestion des adventices. Les deux projets se sont penchés sur la question. « Nous avons implanté du trèfle souterrain dans la menthe. Il est intéressant car il a un cycle décalé avec la culture. Il se développe à l’automne et en hiver, et reste présent sous forme de graine dans le sol au printemps et en été », analyse Julie Egon. Cependant, dans le cadre d’ HO’PPAM’alt, comme d’Adhemar, l’Iteipmei a rencontré à plusieurs reprises des problèmes d’implantation de cette espèce. Ces résultats laissent toutefois entrevoir des pistes pour les producteurs à cours de solution. « Pour nous la suite, c’est de reproduire et d’adapter les itinéraires testés dans le cadre d’ HO’PPAM’alt, mais sur l’ensemble des cultures, sans se cantonner aux pérennes », souligne Léonie Challant.