Face à la grêle, des réponses protéiformes

Outre les leviers financiers destinés à répondre à l’urgence, le ministère de l’Agriculture mise sur l’adhésion à l’assurance récolte pour parer à des aléas dont l’accumulation commence à peser sérieusement sur le moral des producteurs. L’efficacité des dispositifs anti-grêle va faire l’objet d’une expertise.

« Le moral des agriculteurs a été particulièrement affecté suite au nouvel épisode de grêle d’une intensité exceptionnelle, un phénomène d’une rare violence, avec une grande variété de productions touchées et des pertes pouvant atteindre 100%. Après plusieurs années de calamités diverses et les conséquences de la guerre en Ukraine, le moral en a pris un coup ». Telle est l’une des observations formulées par le ministère de l’Agriculture, sur la base du compte-rendu d’une mission flash réalisée par le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) à la suite des épisodes de grêle survenus entre les 20 mai et 21 juin, affectant une soixantaine de départements.

Mobilisation générale des pouvoirs publics et des têtes de réseaux

Afin de ne laisser aucun agriculteur aux prises à des situations « dramatiques », le ministère de l’Agriculture a sonné la mobilisation générale, avec l’activation des cellules d’urgence départementales et la sollicitation des têtes de réseau pour accompagner les sinistrés. Les Directions départementales des finances publiques sont enjointes à privilégier « autant que possible » le dégrèvement d’office de la Taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB). Les Préfets vont activer les modalités prévues en cas de reconnaissance de force majeure ou de circonstances exceptionnelles seront activées dans le cadre de la Pac et de la réglementation nitrates. La MSA est invitée à mobiliser ses équipes sur le terrain afin de recenser les besoins de report et ’exonération de cotisation sociales et à apporter aux sinistrés « l’appui psychologique nécessaire ».

Le ministère de l’Agriculture a demandé aux réseaux bancaires d’être en « anticipation » en ce qui concerne les difficultés de trésorerie et les demandes d’échelonnement ou de report d’échéance et d’être par ailleurs « bienveillants » s’agissant de demandes de prolongation et d’étalement des PGE. De son côté, le ministère a dégagé un fonds d’urgence de 40 millions d’euros.

Même bienveillance requise de la part des assureurs. Les Chambres sont invitées à faire jouer la solidarité pour pallier le manque de fourrage et de paille des éleveurs impactés. Coopératives et négoces doivent examiner « avec la plus grande attention » le cas des céréaliers dans l’impossibilité d’honorer leurs contrats de vente à terme. La Fédération nationale du bâtiment doit mobiliser ses adhérents des zones indemnes pour répondre aux demandes de démolition, de réhabilitation ou de reconstruction des bâtiments endommagés, avec un accompagnement « vigilant » quant aux risques de « flambée des devis ». Les services de la protection civile sont quant à eux sollicités pour mettre en place des abris provisoires.

Un taux de couverture assurantielle surévalué ?

En date du 3 août, les services de l’Etat ne disposaient pas des données consolidées d’évaluation des dégâts. France Assureurs, la fédération réunissant l’ensemble des entreprises d’assurance et de réassurance opérant en France, évoque « avec grande prudence » la somme de 200 millions d’euros sur la base des sinistres déclarés en date du 12-13 juillet. Mais pour le ministère, « le montant global des dommages dans la sphère agricole sera bien supérieur du fait que les non assurés sont beaucoup plus nombreux que les assurés ». Sur les 14 départements visités par la mission du CGGAER, « le chiffre de 20% est évoqué sur le terrain, voire parfois moins », des chiffres à manier là encore avec « la plus grande prudence ». Même si l’échantillon n’a rien de représentatif, le chiffre de 20% interroge dans la mesure où le taux de couverture contre la grêle, en cumulant assurances monorisque et multirisque, est évalué à 60%.

Développer la culture de la gestion des risques

Le ministère de l’Agriculture mise sur la réforme de l’assurance récolte, au 1er janvier 2023, pour assurer sa montée en puissance. Le projet trouvera le soutien de la future loi d’orientation et d’avenir agricoles, programmée pour 2023, avec l’objectif de renforcer sinon de faire émerger la culture de la gestion des risques au plus grand nombre, chez les installés, chez les nouveaux installés et chez les apprenants. Le ministère va par ailleurs confier au CGAAER et l’INRAE une mission chargée d’expertiser l’efficacité des dispositifs de protection contre la grêle et, le cas échéant, de les valoriser et de les vulgariser.