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L’installation en Mayenne (1/4) : La clé des champs passe par le Café de l’installation
Rassembler tous les acteurs de la transmission et de l’installation, c’est la singularité des Cafés organisés par le Crédit agricole Anjou Maine. Où comment passer toutes les portes d'entrée et de sortie avec une seule et unique clé... des champs.
« Ne l’appelez pas farm dating », prévient Bénédicte Thoraval. Ce mercredi 16 mars, la chargée d’équipe au Crédit agricole Anjou Maine chapeaute l’organisation du Café de la transmission et de l’installation à Mayenne, une initiative testée avec succès à l’automne dernier. « Tant mieux si, autour du café, des cédants et des porteurs de projet papotent et s’échangent leur numéro de téléphone, explique-t-elle. Mais l’objectif premier du Café, c’est de permettre aux cédants et aux repreneurs d’entrer en contact avec tous les interlocuteurs concernés par la transmission et l’installation ». Chambre d’agriculture, cabinets comptables, Safer, notaires, MSA et syndicats agricoles dépêchent pour l’occasion un ou plusieurs de leurs experts (sans oublier la banque).
Pas de « farm dating » donc. Pas de PAI « bis » non plus. En Mayenne comme ailleurs, le Point accueil installation (PAI) reste la voie royale et le passage obligé pour appréhender les arcanes et les méandres de l’installation aidée. Avec la pluralité, la convivialité et la promiscuité sont les autres ingrédients de la recette.
Mais le Café offre notamment l’opportunité d’entrer en contact avec des interlocuteurs auxquels les intéressés ne songent pas forcément. « On ne pense suffisamment pas au notaire, déclare Emmanuel Houet, mandaté par la Chambre des notaires. D’ordinaire, le notaire arrive en fin de processus alors que nous pouvons faire valoir nos conseils en amont, tant pour les acquéreurs que pour les vendeurs, aux plans civil, juridique ou encore fiscal. Nous avons une vision transverse et globale de la cession ». A défaut d’être une évidence pour la plupart des entrants et sortants, Maître Houet , qui en profite pour glisser qu’il y a, en France, davantage d’études notariales que de bureaux de Poste, affirme que sa profession travaille en bonne intelligence avec tous les organismes concernés.
La synergie entre acteurs est plus que jamais indispensable pour relever le défi générationnel, pour ne pas dire existentiel de l’agriculture. Dans le département de la Mayenne, la dynamique à l’œuvre est plutôt engageante. « Nous sommes sur un ratio de deux départs pour une installation, déclare Catherine Coulon, conseillère transmission à la Chambre des pays de la Loire. La Région s’est fixée l’objectif d’atteindre les 65%. Un projet d’installation, c’est avant tout un projet de cession. Quelles sont les motivations du cédant ? Veut-il simplement « bazarder » la ferme, quand on l’entend parfois ? Veut-il vendre au plus cher ? Sa priorité est-elle d’installer un jeune et de voir son exploitation lui survivre ? ».
Pour confronter les futurs cédants à ces interrogations, la Chambre d’agriculture leur adresse systématiquement un questionnaire passé leur 55ème anniversaire. Problème : certains n’attendent pas cet âge pour abandonner le métier. « C’est un phénomène nouveau, constate Lionel Dujarrier, directeur de la Safer de la Mayenne. Et c’est un peu à l’image de la société où la mobilité professionnelle est plus forte qu’auparavant. L’avantage, lorsque les départs sont choisis, c’est qu’ils sont mieux vécus que lorsqu’ils sont contraints. Mais ce facteur a pour effet d’accélérer la rotation des exploitations. Il y a encore 5 ou 6 ans en arrière, il y avait deux ou trois acquéreurs pour un cédant. La situation s’est renversée aujourd'hui, ce qui n’est pas sans inquiéter les cédants ».
Fort de son maillage de laiteries, la Mayenne est à l’abri du risque de déprise laitière, une menace qui plane sur certains bassins en France, même si l’Est du département n’est pas totalement épargné par la céréalisation, selon la Safer.
Pour tenter de capter des repreneurs, d’ici et d’ailleurs, la Safer participe aux campagnes de publicité menées par le département. Une tâche beaucoup plus ardue que celle consistant à repérer les sortants, bien identifiés sur le territoire et dans les fichiers des uns et des autres. Et que dire des Nima, les Non issus du milieu agricole, sur lesquels reposent une partie non négligeable de l’agriculture et qui peuvent passer sous les radars des organismes professionnels ? « Ces porteurs de projet ne sont pas faciles à détecter, concède Bénédicte Thoraval. Au sein du réseau d’agences, on essaie de faire jouer « radio tam-tam » entre conseillers. Pour progresser dans l’identification et dans l’accompagnement des Nima, nous avons actuellement une élève-ingénieur qui réalise son stage de fin d’études sur cette problématique ».
Les ressources humaines à la rescousse
Une fois les Nima détectés, reste encore à faire correspondre leurs attentes avec les offres de reprise. Sans tomber dans la caricature de sortants estampillés « conventionnel, circuits long et organisation sociétaire » face à des jeunes marqués « bio, circuits courts et projet individuel », la connexion des deux mondes est un autre défi de la transmission-installation. « Intégrer un Gaec, il est clair que la démarche ne correspond pas spontanément à la volonté de tous les porteurs de projet, déclare Christophe Dessevre, responsable d’agence Cerfrance pôle agriculture à Mayenne. Ce que l’on conseille, c’est de rentrer dans des démarches de ressources humaines, en amont d’un projet d’association, pour décrypter les objectifs et le fonctionnement de chacun. On peut avoir des différences mais bien travailler ensemble ». Du côté du Crédit agricole Anjou Maine, on cultive le même optimisme. « Il n’y a pas de fatalité, il suffit d’aller dans les écoles pour constater qu’il y a plein de jeunes passionnés », fait valoir Bénédicte Thoraval.