Les circuits courts font mieux que survivre à l’après-Covid

L’intérêt pour les circuits courts reste important : c’est l’un des enseignements d’une enquête réalisée par le RMT Alimentation locale, pour qui des déceptions nées de l’après-Covid ne traduisent pas une inversion de la dynamique à l’œuvre avant la pandémie. La surévaluation des objectifs ou encore la concurrence peuvent être la source de difficultés individuelles.

Des producteurs en difficulté, des magasins qui ferment ici où là : il n’en faut pas plus pour conclure à la fin d’un phénomène de mode, que la parenthèse du Covid 19 aurait portée au pinacle avant de retomber comme un soufflé. Une conclusion hâtive, selon le Réseau Mixte Technologique (RMT) Alimentation locale (Fédération Régionale des Civam de Bretagne, INRAE), qui a mené une enquête auprès de producteurs, de consommateurs, d’accompagnateurs de circuits courts, de professionnels de l'alimentation (artisans, transformateurs...) et de points de vente en circuits courts. Résultat ? « L’intérêt pour les circuits courts reste important. Cela n’empêche pas certains producteurs ou magasins d’avoir des difficultés économiques et d’être déçus que la forte demande lors du premier confinement n’ait pas perduré. Les conditions locales sont une donnée clé pour comprendre les évolutions. Enfin, la crise a suscité de nouvelles concurrences, entre les circuits courts et avec des circuits longs valorisant des produits présentés comme locaux ».

Les ventes continuent d’augmenter

Selon l'enquête du RMT, il n’y a pas de baisse généralisée des ventes en circuits courts, par rapport à la situation d’avant-crise. Si 4 points de vente sur 10 ont connu une baisse de leurs ventes, 4 sur 10 observent une hausse, tandis que 2 sur 10 ont un chiffre d’affaires équivalent. Au niveau des producteurs en circuits courts (344 réponses), le chiffre d’affaires est le même qu’en 2019 pour plus de la moitié d’entre eux, en hausse pour plus d’un quart, en baisse pour moins d’un quart. La tendance générale est donc à l’augmentation par rapport à avant la crise Covid.

Des déceptions à analyser au cas par cas

Les baisses de vente ne concernent pas certains produits en particulier, même si les produits frais semblent moins touchés, ni certains modes de vente, même si les marchés et les ventes à la ferme paraissent moins affectés, ni même certains types de territoires (urbain ou rural). Ce sont davantage les conditions locales qui permettent de comprendre les variations. A l’échelle d’un territoire, la simple ouverture d’un nouveau magasin de producteurs peut bousculer les pratiques d’achat. L’analyse globale confirme qu’aucun facteur en particulier ne caractérise les points de vente ou producteurs en difficulté. Les causes sont multiples.

Des clients volages

Les consommateurs ont bien modifié leurs achats en circuits courts depuis le début de la crise. Ceux qui consommaient déjà dans ces circuits avant la crise ont souvent augmenté leurs dépenses, d’autres, nouveaux venus, ne sont pas forcément restés, ce qui contribue à expliquer certaines baisses de vente. De plus, localement, des consommateurs ont pu changer de circuit court, préférant désormais un circuit plus près de chez eux ou plus pratique par exemple : certains circuits gagnent des clients, d’autres en perdent.

La concurrence à l’œuvre

Il n’y a pas contradiction entre les difficultés vécues par certains producteurs ou magasins et la demande persistante en produits locaux. De nouveaux circuits courts sont nés pendant la crise et les produits présentés comme locaux - pas forcément issus d’un circuit court - ont progressé dans les rayons des supermarchés. Un point de vente qui captait auparavant toute la demande doit partager sa clientèle avec un nouvel arrivant ou avec le supermarché d’à côté. Evaluer ce qui se passe au niveau d’un territoire suppose de cumuler l’ensemble des évolutions, en restant attentif aux types de circuits.

Des anticipations optimistes

Les difficultés sont souvent liées à des anticipations trop optimistes. Les points de vente en difficulté signalent fréquemment avoir pensé que la demande très forte pendant le premier confinement allait durer. Pour y répondre au mieux, ils ont investi, par des embauches ou des équipements. Une demande stagnante depuis quelques mois, alors que les frais de structure augmentent, suffit à créer un sentiment de menace, voire à mettre certains en difficulté économique.