- Accueil
- « Mercosur, mort à coup sûr » : face à la tour Eiffel, la Confédération paysanne en appelle à Emmanuel Macron
« Mercosur, mort à coup sûr » : face à la tour Eiffel, la Confédération paysanne en appelle à Emmanuel Macron
Des centaines d'agriculteurs, étudiants et défenseurs de l'environnement ont défilé le 14 octobre à Paris à l'appel de la Confédération paysanne contre le projet d'accord entre l'UE et le Mercosur, considéré comme « mortifère pour les paysans », d'Occitanie comme d'Amazonie.
« UE-Mercosur, c'est pas du fumier, mais ça pue pareil et ça fait rien pousser », a chanté une foule joyeuse partie des Invalides en fin de matinée et arrivée dans l'après-midi aux pieds de la Tour Eiffel pour « un grand pique-nique solidaire ». Sous le soleil d'automne, l'ambiance était bon enfant, l'encadrement sécuritaire léger et les manifestants donnaient de la voix contre un accord « catastrophique », selon la Confédération paysanne, à l’initiative de cette manifestation. Dans le cortège, les nombreux drapeaux jaunes du syndicat côtoyaient ceux du Modef, de Terre de Liens, d’Attac, de Greenpeace, de la CGT, et des autres organisations ayant rejoint l’appel.
Seuls quatre tracteurs ont été autorisés par la préfecture, mais ils ont fièrement campé devant le Champs de Mars en affichant les slogans « Mercosur Mort à coup sûr », « Pour des prix rémunérateur », « Le libre-échange affame, l’agriculture paysanne nourrit »… Le parcours a été ponctué par les prises de paroles des différentes organisations ayant rejoint l’appel à manifestation.
Pour la Confédération paysanne, membre du mouvement paysan altermondialiste Via Campesina, cet accord va mettre en concurrence les paysans européens et latino-américains et faire encore baisser les revenus des producteurs. « L’accord est aussi une catastrophe pour les petits paysans du Mercosur, qui sont exploités pour nous nourrir à bas coût », dénonce l’ONG Max Havelaar, présente à la manifestation.
Le "pire accord" de l'UE
Alors que le Premier ministre présentait son budget, les manifestants appelaient le président Emmanuel Macron à « tenir ses engagements », en défendant les agriculteurs contre ce qu'il avait lui-même qualifié début 2025 de « mauvais texte ». Pour tenter de rassurer la France, la Commission a proposé début septembre des clauses de sauvegarde « renforcées », en cas de brusque hausse des importations ou baisse des prix, avec un « suivi renforcé » des « produits sensibles ». Mais pour le syndicat, ni « clauses de sauvegarde », ni mesures « miroir miracles » ne sauraient garantir un rééquilibrage de cet accord.
Venue en soutien de la Confédération paysanne, la député européenne LFI Manon Aubry a estimé que cet accord était « le pire signé par l'UE ». « C'est un accord qui va tuer l'agriculture, qui va nous empoisonner - un tiers des pesticides autorisés au Brésil sont interdits dans l'UE », a-t-elle déclaré à l'AFP, précisant que sa délégation au Parlement européen allait « déposer un recours devant la Cour de justice de l'UE pour vérifier la compatibilité de l'accord avec les traités européens ».
Prenant le micro à la tribune, une représentante de Terre de Liens a rappelé le scandale des produits phytosanitaires que l’Europe exporte alors qu’elle les interdit sur son territoire. Récemment, un rapport des ONG Public Eye et Unearthed a mis en lumière, grâce à des données de l'agence européenne des produits chimiques (Echa), l’exportation par l’Union européenne de « pesticides interdits », notamment à destination du Brésil. « Or, ça nous revient en boomerang puisqu’on importe les produits traités avec ces pesticides interdits chez nous », déplore Terre de Liens.
Défendre les droits humains
Pour la Confédération paysanne, « combattre ces accords de libre-échange mortifères », « c'est aussi défendre les droits humains ». Citant les accords UE-Israël ou UE-Maroc, la porte-parole Fanny Métrat a dénoncé « des accords qui ne respectent pas le droit international et qui favorisent la colonisation du Sahara occidental et de la Palestine ».
En charge du sujet des outre-mer pour le syndicat, Christophe Van Hoorne, trésorier de la Confédération paysanne, rappelle que les agriculteurs des Antilles et de Guyane, déjà fragilisés par un traité de libre-échange noué entre l’Union européenne et des Etats des Caraïbes, sont en première ligne. « C’est dramatique pour les apiculteurs notamment, car l’accord prévoit la suppression de droits de douane pour 45.000 tonnes de miel par an », indique-t-il.
Le syndicat espère rencontrer Annie Genevard cette semaine, « si elle reste » dans le gouvernement.
Alors que la FNSEA s'était mobilisée fin septembre, la Confédération paysanne a choisi la date du 14 octobre en soutien à deux de ses membres, jugés dans l'après-midi au tribunal judiciaire de Paris. Ces militants syndicaux comparaissent pour « violence et rébellion » lors d'une manifestation contre une réunion d'acteurs du commerce des céréales organisée au Grand Palais en décembre dernier.