Santé des sols : la directive européenne trace son chemin

L’objectif de la Commission européenne est de tendre vers des sols plus sains à horizon 2050, dans une approche « pragmatique et progressive » à la main des Etats membres, sans imposer ni aux propriétaires fonciers et ni aux agriculteurs des obligations de surveillance ou d’amélioration.

Est-ce l’enchevêtrement des crises, la menace de déclassement économique, la vague populiste et nationaliste mondiale susceptible de s’enkyster à l’intérieur de l’Union, encore relativement épargnée ? Toujours est-il qu’après avoir fait du Green deal l’alpha et l’oméga de sa politique, la Commission européenne semble vouloir en finir avec des directives et des règlements « hors-sol ».

La proposition de directive relative à la surveillance des sols et à la résilience pourrait en constituer une illustration. « Conformément au programme de simplification, l'approche progressive et pragmatique de la directive limitera la charge pesant sur les États membres (…) Les États membres qui en ont besoin pourront obtenir l'aide de la Commission pour procéder à l'échantillonnage, à l'analyse et à l'archivage des sols (...) La directive n'imposera pas non plus d'obligations de surveillance ou d'amélioration de la santé et de la résilience des sols aux propriétaires fonciers et aux gestionnaires de terres, y compris les agriculteurs ». Tel est le luxe de précautions déroulées par l’exécutif européen à l’annonce d’un accord intervenu le 10 avril, entre le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne.

Les jalons de la future directive

L’accord prévoit la mise en place un cadre de surveillance et d’évaluation de la santé des sols, « complet et harmonisé, mais souple », sur tout le territoire des pays membres, sur la base de critères communs caractérisant l'aspect physique, chimique ou biologique de l’état des sols pour chaque type de sol, et d'une méthodologie commune pour les points de prélèvement. La Commission soutiendra les États membres en renforçant son programme d'échantillonnage, LUCAS Soils. Les gestionnaires bénéficieront d’un soutien pour améliorer la santé et la résilience des sols dont ils ont la charge. Il s’agira également d’atténuer les impacts de l'occupation des sols, tels que les bâtiments et les infrastructures, sur la capacité des sols à fournir d'autres services écosystémiques « sans empêcher l'autorisation de telles activités ».

Liste des sols contaminés et des substances émergentes à risques

Dix-huit mois après l'entrée en vigueur de la loi, les états membres devront établir une liste indicative de substances émergentes susceptibles de présenter un risque important pour la santé des sols, la santé humaine ou l'environnement, et pour lesquelles des données sont nécessaires. La liste inclura notamment les pesticides ainsi que les substances poly ou perfluoroalkylées (PFAS), qualifiées de « polluants éternels ».

Dix ans après son entrée en vigueur, la nouvelle loi obligera également les États membres à dresser une liste publique des sites potentiellement contaminés par quelques substance que ce soit, et à remédier à tout risque inacceptable pour la santé humaine et l'environnement.

50 milliards d'euros par an

Le Parlement européen et le Conseil doivent encore formellement adopter la nouvelle directive avant son entrée en vigueur, les Etats membres disposant ensuite d’un délai de trois ans pour l’appliquer.

Selon la Commission européenne, dont l’objectif général est de disposer de sols de bonne qualité d’ici à 2050, conformément à l’objectif ‘zéro pollution » de l’Union, 60 à 70% des sols de l'UE sont en mauvais état. A elle seule, l’érosion est responsable d’une perte de productivité agricole annuelle estimée à 1,25 milliard d'euros, un milliard de tonnes de sols étant emportées chaque année. Les coûts liés à la dégradation des sols sont estimés à plus de 50 milliards d'euros par an au sein de l’UE. « La dégradation et la contamination des sols présentent des risques importants pour la sécurité et la sûreté alimentaires, la biodiversité, la résilience face au climat et aux phénomènes météorologiques extrêmes », rappelle la Commission.