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Trump, le retour d’un carnivore en politique
[Edito] La victoire du milliardaire républicain Donald Trump à l'élection présidentielle américaine a provoqué une onde de choc sur la scène internationale, ravivant les craintes de certaines filières agricoles, en particulier celle du vin. Face à un Trump plus déterminé que jamais à mener une politique protectionniste et à défendre les intérêts américains de manière agressive, l'Europe saura-t-elle s'unir pour protéger efficacement ses secteurs économiques vulnérables et affirmer sa souveraineté ?
« Le monde est fait d'herbivores et de carnivores. Si on décide de rester des herbivores, les carnivores gagneront et nous serons un marché pour eux ». Cette métaphore pour le moins agraire a été utilisée par Emmanuel Macron lors du sommet de la Communauté politique européenne à Budapest le 7 novembre 2024, au lendemain de l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis. « Je pense qu'au moins ce serait pas mal de choisir d'être des omnivores », a-t-il tempéré, appelant l’Europe à agir pour défendre ses intérêts, sa souveraineté et son autonomie stratégique.
C’est peu dire que la victoire de Donald Trump est un séisme géopolitique et une source d’inquiétude pour plusieurs secteurs, notamment agricoles. Sa politique protectionniste « America first » avait déjà eu un impact significatif sur le commerce mondial lors de sa précédente présidence (2017-2021).
Les droits de douane, l'arme ultime de Trump
Le secteur viticole est celui qui en a fait le plus les frais. En 2019, Trump avait imposé des droits de douane punitifs de 25% sur certains vins et spiritueux français, entraînant une chute drastique des ventes vers les Etats-Unis (les plus gros clients de la filière à l’export) et ayant coûté environ 600 millions d'euros au secteur viticole français, avant d’être suspendus par l'administration Biden. La réélection du milliardaire nationaliste fait craindre aux viticulteurs le retour de ces fameuses « taxes Trump », alors que la filière est déjà en butte aux affres climatiques et à la déconsommation.
Le président-élu a déjà affiché son intention de mettre en place des mesures protectionnistes, en évoquant une augmentation des droits de douane sur les produits importés, allant de 10 à 20% sur l'ensemble des produits étrangers entrant aux Etats-Unis. Dans une interview récente, il a d'ailleurs qualifié les droits de douane comme étant « les plus beaux mots du dictionnaire »... Un traitement particulier est réservé à la Chine, son grand rival : Trump menace d'imposer des droits de douane allant jusqu'à 60% sur les produits chinois importés aux États-Unis.
Lors de sa mandature précédente, la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine avait perturbé les marchés agricoles mondiaux, en particulier ceux du soja et du maïs. Les exportations de grain américain vers la Chine avaient chuté, Pékin s’étant tourné vers d’autres fournisseurs. Les « farmers » américains, bien que victimes de cette guerre commerciale, adhèrent largement à l’approche protectionniste de Trump et l’ont soutenu massivement lors de l’élection présidentielle, tout comme lors de ses précédentes candidatures (2016 et 2020). Il faut dire que pour compenser les pertes des agriculteurs américains, l'administration Trump avait mis en place un programme d'aides record, atteignant jusqu'à 32 milliards de dollars par an. En 2024, l’homme d’affaires new-yorkais a remporté la plupart des États ruraux et agricoles, comme l'Iowa, le Kansas, le Nebraska, les Dakotas, et le Montana.
Bien que la viticulture soit la plus exposée au possible regain de protectionnisme américain, c’est par ricochet l’ensemble des filières exportatrices françaises qui pourraient être impactées. Il faudra attendre le 20 janvier 2025, date officielle de l’investiture de Donald Trump, pour savoir quelles seront les décisions prises par le nouveau président. Et à quelle sauce il décidera de manger ses « partenaires » commerciaux.