Elle transforme les brins de seigle en pailles à boire

Jeune agricultrice de 27 ans et entrepreneuse dans la Sarthe, Cassandra Bourmault recycle les brins de seigle de l’exploitation familiale en pailles à boire. Son idée, baptisée Végépaille, permet de lutter contre l'utilisation du plastique, et a reçu le prix Espoir Start-up, dans le cadre du Prix de l’Initiative, concours organisé par le Crédit Agricole Anjou Maine.

Comment est né ce projet ?

Mes parents sont exploitants agricoles à Mansigné, près de La Flèche privilégiant une production diversifiée : culture et élevage. Je suis moi-même installée à Luché-Pringé avec 100 hectares. Depuis au moins quatre générations, nous cultivons une céréale, le seigle, qui sert à l’alimentation et au paillage des bêtes, bovins et volailles. Un jour en 2019, une entreprise nous a contactés pour trouver un transformateur de paille de seigle, capable d’automatiser la découpe afin de trouver une alternative biodégradable aux pailles en plastique.

Aucune entreprise ne pouvait répondre à ce besoin ?

De fait, non. Je me suis d’abord tourné vers un Esat, atelier protégé, mais la production de ces pailles restait artisanale et fastidieuse. Mais cela m’a donné envie de creuser et j’ai découvert qu’il n’existait alors pas de solution technologique, ni en France, ni dans le monde pour fabriquer un produit biodégradable à grande échelle.

De là, est née votre entreprise ?

Oui, en 2019, a germé en moi l’idée de développer ce projet Végépaille pour répondre à ce besoin. En 2020, nous avons créé une société familiale, avec mes parents et mon frère, pour transformer les brins de seigle de l’exploitation en pailles à boire d’autant plus que peu de temps après, le 1er janvier 2021, nombres d’objets en plastique, comme les pailles, cotons-tiges, gobelets et autres ustensiles jetables allaient être interdits à la vente.

Il a fallu concevoir une machine de production spécifique ?

Oui et ça n’a pas été facile. Près de six mois de recherche ont été nécessaires. Il a fallu dans un premier définir un prototype définissant la partie de la plante dont le diamètre était compatible avec l’usage souhaitée. J’ai eu beaucoup de difficultés à trouver une entreprise en mesure de fabriquer une machine capable de transformer le brin de seigle en paille à boire selon nos critères retenus. Une seule a répondu, elle est située dans le Nord de la France. Son bureau d’études a conçu des plans et ce fameux prototype capable de produire ces pailles à boire dont la fabrication reste bien sûr secrète. Nous avons investi 400 000 € pour développer cette machine qui enfin vient de nous être livrée.

Et la suite ?

La production débute vraiment maintenant au rythme de 8 millions de pailles sur une année complète. L’industrialisation de la fabrication va s’intensifier. Nous prévoyons ensuite d’investir dans de nouvelles machines. L’objectif, c’est six machines pour pouvoir répondre à une demande de 50 millions de pailles d’ici cinq ans pour une demande annuelle actuelle de 3,2 milliards en France. Nous venons de recruter quatre salariés, et faire l’acquisition d’une nouvelle machine supposera la création de deux nouveaux emplois.

En décembre 2020, le projet Végépaille a été récompensé lors du Concours Vegepolys Valley 2020-2021 pour son innovation en faveur de la production végétale de demain, au même titre que trois autres start-up. Cassandra a reçu 10 000 €. Elle a reçu aussi le prix Espoir Start-up, dans le cadre du Prix de l’Initiative, concours organisé par le Crédit Agricole Anjou Maine destiné à soutenir des projets de jeunes étudiants ou start-up : 1 000 € supplémentaires lui ont été attribués.