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Haies agricoles : les clés d'un entretien réussi
Que ce soit par leurs essences, leurs méthodes de conduite ou encore le nombre de strates qui les composent, les haies agricoles présentent une diversité qui doit être prise en compte lors de l’entretien et de l’exploitation du bois. À l’occasion d’une journée organisée sur le sujet par le Syndicat mixte du bassin de l’Authion et de ses affluents, les différentes techniques de taille et de recépage ont été passées en revue.
Si les haies offrent un certain nombre d'avantages face au vent et aux intempéries, elles n’ont été d’aucun secours pour la quinzaine d’agriculteurs venus assister sous une pluie battante à une démonstration d’entretien et de valorisation d’un linéaire de saule le 19 novembre dernier. L’événement, qui s'est tenu sur la commune des Bois d’Anjou dans le Maine-et-Loire, a été l’occasion pour la chambre d’agriculture des Pays de la Loire et l’association Eden de rappeler les avantages des haies et les bonnes pratiques d’entretien. « Une haie de 50 cm d’épaisseur, ce n’est pas une haie. Il faut au moins 4 mètres d'épaisseur pour un développement satisfaisant ! », martèle d’emblée Armelle Vinet, conseillère spécialisée bocage paysage agroforesteries au sein de la chambre d’agriculture.
Si les arbres têtards sont habituellement les stars de ce type de formation, cette fois c’est l’ensemble des strates de la haie qui a été passé aux cribles. Face aux exploitants, venus essentiellement dans le cadre de leur formation sur les Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC), la conseillère a rappelé qu’une coupe latérale régulière de la strate arbustive et buissonnante toujours au même endroit empêche la haie de se densifier et amène inévitablement une dégradation et un éclaircissement du linéaire. « Idéalement, il faut revenir tous les 3 ans avec un lamier mais ne jamais faire la coupe au même endroit pour éviter que l’arbre fasse des réserves à cet endroit et s’ajoure ailleurs », précise-t-elle. Pour encourager le développement de cette strate intermédiaire, il est également important de couper régulièrement les branches basses des arbres de haut jet. « Si ce n’est pas fait, la haie s'éclaircit et c’est la ronce qui prend la place le jour où la lumière revient », renchérit-elle. Ce bois, type aubépine, peut être valorisé en plaquette, au même titre que les têtards, mais tous les 35 à 40 ans.
Taille des haies : ne pas négliger la coupe à ras du sol des cépées
Lors de cette journée de démonstration, la SAS Moreau a réalisé une coupe à blanc d’un linéaire de cépée de saule de plus d’une dizaine de mètres de hauteur. L’intervention a été réalisée à l’aide d’un grappin équipé d’une tronçonneuse pour permettre une coupe nette des branches.
« Avec de l’espace et de l’eau, le saule peut prendre 1,5 mètre par an. Le développement peut aller très vite », souligne Armelle Vinet. Contrairement aux têtards, les cépées stockent leurs réserves, d’où partiront les nouveaux bourgeons, dans le sol. Ce type de coupe à blanc permet donc de densifier la haie sur la durée. « Comme le saule, les espèces de bois blanc cassant sont bien adaptées aux cépées. Mais l’utilisation entre également en compte. Un châtaigner peut-être mené en cépée pour les piquets ou en haut-jet pour la récolte de châtaigne », témoigne-t-elle.
Ce type d’entretien a également un impact positif dans le cadre du stockage du carbone dans le sol. « Lorsque l’arbre perd des parties aériennes, il laisse mourir une partie de son racinaire. Cela va créer des failles remplies de matières organiques dans le sol, dans lesquelles pourront se redévelopper les racines de l’arbre. C’est pour cela que nous ne comptabilisons que la partie des haies dans le sol pour le calcul du stockage du carbone, et pas les parties aériennes », retrace-t-elle.
En créant ces fissures à l’emplacement des anciennes racines, la valorisation du bois de haies concourt également à une meilleure infiltration de l’eau dans le sol.
Les têtards, rois difformes des haies bocagères
Contrairement aux cépées, les arbres têtards stockent leurs réserves, d’où partiront les nouveaux bourgeons, à la hauteur choisie pour étêter l’arbre lors de la première coupe. C’est cette conduite qui leur donne cet aspect difforme si reconnaissable. « Pour former un têtard, il faut le laisser partir comme un arbre de haut-jet durant 5 à 10 ans. Puis une première coupe de la tête est nécessaire. Cette période sera plus courte pour les arbres à croissance rapide tels que les frênes ou les ormes et plus longue pour les chênes », détaille Armelle Vinet. Elle préconise une seconde coupe de la tête après 5 ans pour créer la zone de réserve.
Historiquement la taille était ensuite réalisée tous les 9 ans, une période correspondant à l’ancienne durée d’un bail agricole. Aujourd’hui Armelle Vinet conseille de s’adapter au sol et aux essences. En bord de cours d’eau, elle estime un retour possible pour exploitation du bois tous les 9 à 10 ans, alors qu’en plaine sur des sols superficiels, cette durée peut s’allonger à 20 ans. Mais une chose est certaine pour elle : « Si vous laissez filer un têtard pendant 30 ou 40 ans, il va déplacer ses réserves dans ses branches charpentières. C’est particulièrement vrai pour les chênes. Pour le conserver en têtard, il faudra laisser une branche, appelée tire-sève, lors de la taille », avertit la conseillère. La branche tire-sève doit être choisie idéalement sur le côté afin de pouvoir l’enlever après 3 ans lorsque de nouvelles branches se sont formées, sans les endommager.
Elagage : une gestion de territoire global
« Ce sont des opérations assez impressionnantes en termes d’impact sur le paysage. C’est pourquoi nous évitons d’intervenir sur des linéaires trop longs », explique Maxime Quignon, technicien de la Scic Maine-et-Loire Energie en charge de l’organisation des chantiers et de la valorisation des copeaux de bois obtenus. Il explique également prendre en compte la continuité du linéaire écologique des linéaires de haie lors de la taille lorsque plusieurs exploitants souhaitent intervenir sur leurs haies dans un même secteur. Cet exercice de gestion prend en compte l’impact visuel, la continuité écologique, les périodes d’interventions les moins dommageables pour la biodiversité mais également les besoins des agriculteurs en fonction des cultures en place et de l’accessibilité des parcelles. « Nous proposons des plans de gestion pour identifier les linéaires qui nécessitent les interventions les plus urgentes », précise la conseillère de la chambre d’agriculture.
Des financements en baisseAlors que le plan haie mis en place en 2024 bénéficiait de 110 millions d’euros, l’enveloppe a été largement rabotée en 2025. Dans sa version initiale, le budget présenté par le gouvernement ne propose plus que 30 millions d’euros. Si ce budget n’a pas encore été voté, en l’état actuel, les acteurs sur le terrain se posent des questions. « Il va y avoir des coupes, mais nous sommes dans l’incertitude car nous ne savons pas où. C’est très compliqué pour programmer les chantiers 2025 », commente Laurent Dertrais de l’association Eden. |