Le SIMA, c’est fini (pour 2024)

Les organisateurs reportent à novembre 2026 l’édition initialement programmée en novembre prochain. Reste à savoir si la « marque » SIMA va survivre à un effacement aussi long, après avoir manqué le coche de sa réinvention lors de son centenaire en novembre 2022, dernière édition (en date).

« Dans le contexte actuel de baisse de marché et de crise agricole en France mais aussi en Europe, Exposima a décidé d’annuler l’édition 2024 du SIMA ». Telle est la justification donnée par les actionnaires de la société organisatrice au report, en novembre 2026, du SIMA, initialement programmé du 24 au 27 novembre. Il faut descendre un peu plus bas dans le communiqué daté du 2 février pour y dénicher une raison additionnelle, à savoir le « désistement d’acteurs majeurs du machinisme agricole », ce qui constitue plus sérieusement la raison majeure du report, alors que nombre de constructeurs annoncent des hausses d’activité à deux chiffres sur l’exercice 2023. Le premier d’entre eux, John Deere, communiquait en novembre dernier un chiffre d’affaires (61,2Md$) et un bénéfice net (3,0Md$), en hausse respective de +16% et +43% sur un an.

Des signes avant-coureurs

Dès février 2023, le même John Deere avait annoncé faire l’impasse sur l’édition 2024 du SIMA, décision motivée par la recherche de « canaux de communication alternatifs » aux salons et sa prédilection pour des « évènements clients locaux ». Ce n’est pas faire injure aux autres tractoristes que d’affirmer que le retrait de marque à « l’élan », véritable marque à « aimant », risquait fort d’entamer l’attractivité du SIMA, pénalisant pour le coup l’ensemble des exposants... tout en décomplexant d’autres constructeurs d’imiter la marque américaine.

En novembre 2022, des constructeurs et pas des moindres (Same-Deutz-Fahr, JCB, Kverneland, Manitou, Michelin...) avaient déjà fait l’impasse sur le salon parisien alors même qu’il fêtait son centenaire, sinon sa renaissance après deux reports pour cause de Covid. Les visiteurs n’ont pas suivi : ils étaient 153.000 (dont 18% d’internationaux) contre 230.000 en 2019, soit une chute de 33%, bien supérieure à l’érosion démographique. Le changement de programmation, de février à novembre, n’y a rien fait, à part se mettre à dos les organisateurs de l’Eima, occupant le créneau automnal les années paires en alternance avec Agritechnica les années impaires. En juillet dernier, Exposima avait annoncé un passage de 5 à 4 jours du SIMA. Comme un mauvais présage.

La forme olympique d’Agritechnica

Au passage, la forme olympique d’Agritechnica, dont l’édition de novembre 2023 a vu sa fréquentation progresser de 4,4% à 470.000 visiteurs (en 7 jours, dont 33% d’internationaux) par rapport à la dernière édition de 2019, semble infirmer l’idée selon laquelle les « grand messes » seraient frappées d’obsolescence à l’heure du tout numérique et de l’engouement pour les salons « outdoor » type Innov-Agri, qui s’apprête à repousser ses « murs » avec une troisième déclinaison régionale dans les Hauts-de-France.

Au-delà du visitorat, Agritechnica s’est surtout imposé comme le centre de gravité européen voire mondial du business, pour les constructeurs, importateurs et exportateurs, et où courent les constructeurs français pour tenter de corriger leur trop grande inféodation au marché domestique, fut-il énorme. Paris a raté ce virage et cherche depuis son GPS. Qui plus est, depuis un certain nombre d’éditions, des constructeurs français ne ménagent pas leurs critiques à l’égard du SIMA, dont les prestations en terme de rapport qualité-prix supporteraient difficilement la comparaison avec son cousin germain et Germanique. D’autres ont peu goûté la gestion commerciale des annulations dues au Covid, forçant à la main à la réinscription, un calcul manifestement court-termiste.

Exposima y croit encore et donne rendez-vous... en novembre 2026. Espérons que le contexte ne sera pas « compliqué » à cette échéance. « La France, premier producteur agricole en Europe, et premier marché de l’agroéquipement, reconnu dans le monde entier mérite un grand salon international de l’agroéquipement », veut croire Exposima. A l’imparfait, on a l’épitaphe.