Outre-mer : reconquérir le foncier agricole, un « objectif atteignable » selon un rapport du Sénat

Pour garantir leur souveraineté alimentaire, les départements et régions ultra-marins doivent d'abord régler la question du foncier agricole, grignoté par l'urbanisation et la protection environnementale, un objectif atteignable selon un rapport du Sénat publié mercredi.

« Urbanisation rampante, fléau de l'indivision, prolifération des friches, transmissions bloquées, terres difficiles à travailler faute des réseaux essentiels, réchauffement climatique... Les vents contraires s'accumulent », constate à l'issue de quatre mois de travaux, et l'audition de 85 personnes le rapport de la délégation outre-mer du Sénat.

Hors Guyane, la surface agricole utile (SAU) a ainsi régressé de 7,5% en moyenne entre 2010 et 2020 en Guadeloupe, en Martinique à la Réunion et à Mayotte. En conséquence, la production agricole destiné au marché local a crû moins vite que la population, et a diminué d'environ 900 tonnes par an dans le même temps. Cependant, « malgré l'étroitesse du foncier agricole, les quantités de terres manquantes pour couvrir 100% des besoins en fruits et légumes n'apparaissent pas pharaoniques », selon les sénateurs qui expliquent que dans les hypothèses les moins favorables, « il faudrait augmenter la SAU de 10% environ ».

Les sénateurs préconisent de sauvegarder les terres agricoles exploitées notamment en renforçant les moyens financiers des Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) outre-mer, et de reconquérir les terres agricoles exploitables.

Réserves foncières

D'après le ministère de l'agriculture, il existerait un potentiel important de remise en culture en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion, avec respectivement 12.000, 9.000 et 8.000 hectares de friches. Les pouvoirs publics (État, départements, régions, communes, EPF) détiennent aussi des terrains inexploités dont il faudrait inventorier le potentiel agricole pour installer de jeunes agriculteurs, souligne le rapport.

Une autre marge de manœuvre réside dans la diversification. Les monocultures d'exportation (canne et banane) utilisent beaucoup de SAU, en particulier à la Réunion (48%), à la Guadeloupe (29%) et à la Martinique (30%). « Une meilleure rotation des cultures au profit des cultures consommées localement contribuerait à la souveraineté alimentaire », souligne le rapport. « En stoppant la déprise agricole, en déployant des techniques innovantes de culture et en développant une agroforesterie raisonnée, la souveraineté alimentaire est un objectif atteignable à horizon 2030 », se projettent les sénateurs.