Pesticides : des chiffres et des faits

[Edito] Les quantités de pesticides vendues en France évoluent chaque année en dents de scie au gré des réglementations, de la météo et du contexte sanitaire. La tendance globale n’est pas à la baisse depuis 10 ans, mais les quantités de produits phytos conventionnels diminuent tandis que celles des produits utilisables en agriculture bio augmentent.

Après la baisse drastique des ventes de produits phytosanitaires en 2019, annoncée avec tambours et trompettes par le gouvernement l’an dernier, les chiffres des ventes 2020 viennent tout juste d’être publiés, cette fois dans une plus grande discrétion. Il faut dire qu’après la hausse anticipée des achats en 2018 et la baisse qui en découlait en 2019, l’année 2020 signe une sorte de retour à la normale avec 65 341 tonnes achetées, soit le niveau de 2012. Les quantités de substances actives « conventionnelles » (hors utilisables en agriculture biologique et hors produits de biocontrôle) témoignent néanmoins d’une diminution tendancielle : la moyenne triennale 2018-2020 des quantités achetées est la plus faible depuis 10 ans. Par rapport à la moyenne 2009-2011, début du plan Ecophyto, la baisse est de 9%.

De plans en plans

Les produits utilisables en agriculture bio (soufre en tête) poursuivent, eux, leur hausse, reflétant la dynamique de conversion des surfaces bio en France qui ont doublé en 5 ans. Au global, tous produits phytosanitaires confondus, la moyenne triennale 2018-2020 des quantités achetées est en hausse de 8% par rapport à 2009-2011, bien loin des objectifs du premier plan Ecophyto. Révisé à deux reprises, celui-ci fixe désormais l’objectif de réduire les usages de produits phytos de 50% d'ici 2025 et de sortir du glyphosate d'ici 2022.

Selon les chiffres publiés par le ministère, les quantités de glyphosate vendues pour la période 2018-2020 étaient en hausse de 11% par rapport à la période 2009-2011 mais en légère diminution par rapport à la moyenne 2017-2019. Il est trop tôt pour entrevoir les effets des mesures du plan de sortie du glyphosate mis en place par le gouvernement, avec notamment les nouvelles restrictions d’usage et le crédit d’impôt de sortie du glyphosate.

Des effets déjà en cours

Les autres mesures telles que la prime à la conversion des agroéquipements du plan de relance, ou encore les écorégimes mis en place dans la future Pac pourraient contribuer à accentuer la baisse des usages des produits phyto dans les années à venir.

Les 3000 fermes pilotes du réseau Dephy constituent par ailleurs une belle vitrine des pratiques agroécologiques visant à réduire l’usage des produits phytosanitaires. Entre la date de leur entrée dans le réseau et l’année 2019, les fermes Dephy ont ainsi enregistré une réduction moyenne des Indices de fréquence de traitement (IFT), hors biocontrôle, de 30% en maraîchage, 24% en arboriculture, 19% en grandes cultures, 23% en viticulture et 19% en horticulture. L’agriculture française montre déjà que le changement est en route.