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Jeudi 04/12/2025

Souveraineté alimentaire : les 10 commandements d’Interbev

L’interprofession du bétail et des viandes prend le devant sur l’organisation des Conférences de la souveraineté alimentaires en présentant ses 10 mesures « prioritaires et urgentes » pour enrayer la décapitalisation du cheptel de ruminants.

« Reconquérir la souveraineté alimentaire de la France pour la défense de ses intérêts » : tel le titre 1er de la Loi n° 2025-268 du 24 mars 2025 d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture, promulguée le 24 mars 2025. Au menu de l’article 1er ? « Assurer le maintien de l’élevage et de l’agropastoralisme en France et de lutter contre la décapitalisation, par un plan stratégique déterminant notamment les objectifs de production, en assurant l’approvisionnement en protéines animales des Français et en maintenant l’ensemble des fonctionnalités environnementales, sociales, économiques et territoriales de l’élevage ainsi que ses complémentarités agronomiques avec les productions végétales ».

C’est, entre autres, cet alinéa qui interpelle Interbev, à quelques jours du lancement, le 8 décembre à Rungis (Val-de-Marne), des Conférences de la souveraineté alimentaire, elles aussi inscrites dans la LOA, et dont la l’objectif est de fixer des trajectoires de production et de transformation à 10 ans pour l’ensemble des filières, avec une restitution prévue à la fin du premier semestre 2026. Le coup d’envoi, baptisé « Le grand réveil alimentaire », est programmé lundi au marché de Rungis (Val-de-Marne).

"Nous n’attendons plus de nouvelles consultations, mais des décisions"

Plan de filière préfigurant la loi Egalim (et le discours d’Emmanuel Macron à Rungis en octobre 2017). Plan gouvernemental de reconquête de notre souveraineté sur l’élevage présenté au Salon de l’Agriculture 2024… les plans passent, la filière trépasse : -1,2 millions de vaches perdues en 10 ans dans l’Hexagone, -17% d’abattages de veaux en 3 ans, -40% d’abattages d’agneaux français en 20 ans, -20 % d’abattages de chevreaux en 10 ans… « Nous n’attendons plus de nouvelles consultations, mais des décisions, déclare dans un communiqué Jean-François Guihard, président d’Interbev. Pour restaurer durablement notre souveraineté alimentaire, la France a besoin d’un cap clair, cohérent et interministériel. Sans cela, nous continuerons de perdre des éleveurs, des prairies, des abattoirs et notre capacité à produire notre propre alimentation. Il est temps d’agir ».

Les 10 mesures « prioritaires et urgentes »

A l’approche de l’ouverture des Conférences de la souveraineté alimentaire, initiées par le ministère de l’Agriculture, l’interprofession met sur la table 10 mesures « prioritaires et urgentes ».

- refuser la conclusion d’accords de libre-échange inéquitables, conditionner la conclusion de tout nouvel accord de libre-échange à l’application effective de mesures miroirs prévues dans la réglementation européenne, veiller à ce que toutes les importations, dans les échanges commerciaux, respectent les standards européens, afin d’assurer une concurrence loyale et de préserver la confiance des consommateurs ;

- donner, via les politiques publiques française et européenne, les moyens de maintenir leurs troupeaux, essentiels au maintien des prairies, de la biodiversité et de la vitalité économique des territoires ruraux, en sécurisant les aides couplées de la Pac et en renforçant l’aide bovine ;

- face aux vagues de maladies vectorielles (FCO, MHE, DNC), mettre en œuvre une politique sanitaire cohérente en France fondée sur la prévention et la vaccination, pour mieux protéger les cheptels et faciliter les mouvements d’animaux, et porter cette stratégie au niveau européen ;

- pour favoriser le renouvellement des générations et préserver les savoir-faire à tous les niveaux de la filière, poursuivre le développement de la contractualisation, investir dans le renouvellement et la modernisation des bâtiments d’élevage, soutenir l’attractivité des métiers de la filière élevage et viande et assurer une juste rémunération ;

- assurer une réglementation européenne pragmatique et cohérente et harmoniser son application, s’agissant notamment de la réglementation bien-être animal dans le transport des animaux et du règlement UE « déforestation » ;

- lancer (enfin) la dématérialisation des documents d’identification de manière opérationnelle, avec des garanties sur la fiabilité technique du système, un financement clair, une concertation avec les acteurs de terrain et un calendrier de déploiement respecté ;

- renforcer la présence de la viande française en restauration collective, en faisant appliquer strictement les obligations des lois EGAlim et Climat (60 % de viandes durables et de qualité et 100 % dans la restauration d’État), en revalorisant le budget de la commande publique pour permettre l’achat de viandes durables et de qualité, en formant les 7500 cuisiniers et gestionnaires de la restauration collective d’État à l’achat et à la préparation de viandes françaises durables ;

- garantir la transparence de l’origine auprès des consommateurs en rétablissant l’obligation d’indiquer l’origine des viandes utilisées comme ingrédients dans les produits transformés (renouvellement du décret qui a pris fin 2021), en étendant 'obligation d’étiquetage de l’origine aux produits tripiers et à la viande chevaline, en contrôlant strictement l’indication de l’origine dans les restaurants et en rendrant obligatoire l’information sur l’origine des viandes utilisées comme ingrédients dans les produits transformés fournis aux restaurateurs et enfin en promouvant les démarches interprofessionnelles « Viandes de France », crédibles, contrôlées et reconnues.

- définir un affichage environnemental qui prenne en compte l’ensemble des impacts, afin de refléter la durabilité réelle de l’élevage herbager et d’éviter des signaux trompeurs pour les consommateurs ;

- reconnaître la place de la viande dans les repères nutritionnels (PNNS, SNAN, restauration scolaire), assurer une cohérence des politiques publiques, aligner les hypothèses de la SNBC avec la feuille de route « Souveraineté et décarbonation » construite par la filière bovine, accompagner la mise en œuvre de cette feuille de route par un plan d’investissement public pour atteindre les objectifs climatiques tout en préservant les prairies et la capacité de production.