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UE-Mercosur : le Sénat aussi dit « non », les manifestations se poursuivent
A une majorité encore plus large qu’à l’Assemblée nationale, les sénateurs ont entériné le refus de Paris de valider l’accord de libre-échange « en l’état ». A la mi-journée mercredi, les autorités ont recensé 18 actions dans 18 départements impliquant plus de 1100 personnes et 364 engins agricoles, « des indicateurs en hausse » par rapport à mardi.
Par 338 voix sur un total de 348, les sénateurs ont apporté mercredi leur soutien au gouvernement qui refuse, « en l’état », la signature de l’accord de libre-échange que la Commission européenne négocie avec le Mercosur (Argentine , Bolivie, Brésil, Paraguay, Uruguay) depuis 1999, accord où les filières agricoles françaises ont beaucoup à perdre, et notamment la filière bovine, parmi les plus vulnérables. Les sénateurs ont ainsi emboité le pas aux députés qui, la veille, s’étaient prononcés à 484 voix contre 70, LFI se distinguant en refusant son soutien au gouvernement, réclamant l'abandon pur et simple du projet d'accord.
Ce double mandat du Parlement « est un message fort qui sera entendu » dans les autres pays européens, s'est félicité le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, pour qui « la dynamique va dans notre sens » avec le ralliement jeudi de la Pologne, autre grande puissance agricole du continent européen. « La France ne souhaite ni la fin des accords commerciaux, ni la fin des échanges agricoles », mais réclame des « garanties sérieuses pour [les] agriculteurs », qui se retrouveraient sinon « confrontés à une concurrence insupportable », a souligné la ministre de l'Agriculture Annie Genevard.
Les manifestations se poursuivent
Ce mercredi, la mobilisation, réactivée la veille par la FNSEA et les JA, après une première salve la semaine passée, s’est poursuivie, avec aussi à la manœuvre la Coordination rurale et dans une moindre mesure la Confédération paysanne.
Avec leurs tracteurs ou leurs bêtes, des centaines d'agriculteurs ont participé à nouveau mercredi à des manifestations dans plusieurs départements, comme dans l'Aveyron, où des dizaines d'entre eux ont pris position devant la cathédrale de Rodez en formant les lettres « SOS ». « Nos champs, nos étables, garnissent vos tables », proclamait une banderole à Rodez pendant que les vaches déambulent dans les rues pavées. « Mangeons français », invitait une autre pancarte près de la cathédrale. A l’appel de la FNSEA et des JA, une centaine d'éleveurs se sont rendus en « transhumance » à pied avec une dizaine de bovins jusqu'à la préfecture de l'Aveyron.
A Villecomtal-sur-Arros (Gers), c'est à l'appel de la Coordination rurale (CR) qu'une dizaine d'engins agricoles ont continué de bloquer l'entrée du site de production de Danone, où les agriculteurs se relaient depuis mardi en fin d'après-midi, a constaté une journaliste de l'AFP.
A la mi-journée mercredi, les autorités ont recensé 18 actions dans 18 départements impliquant plus de 1100 personnes et 364 engins agricoles, « des indicateurs en hausse » par rapport à mardi. Les agriculteurs contestent notamment le projet d'accord de libre-échange entre l'UE et des pays du Mercosur, pourtant qualifié mercredi d’« accord correct pour l'agriculture française » par Pascal Lamy, ancien chef de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
« Genevard que des bobards »
Dans l'Aude, une cinquantaine de membres des JA avec une dizaine de tracteurs ont bloqué pendant plusieurs heures mercredi matin le troisième port français à Port-la-Nouvelle, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Perpignan, pour demander davantage de soutien économique, a constaté un journaliste de l'AFP. « Genevard que des bobards » ont-ils inscrit sur le bitume, en référence à la ministre de l'Agriculture Annie Genevard.
En Haute-Garonne, des membres de la FDSEA31 ont bloqué un rond-point à Beauzelle, en périphérie de Toulouse, où ils ont édifié « une montagne du ras-le-bol » avec des bottes de paille, selon Axel Tran Van, membre du conseil d'administration du syndicat.
Près de 600 km plus au nord, à Nantes, une cinquantaine de tracteurs se sont garés mercredi en milieu de journée devant la préfecture, certains porteurs de banderoles proclamant « Ne brisez pas mon rêve de prendre la relève », « Pas de pays sans paysans » ou « Petit on en rêve, adulte on en crève ». Un mur en parpaings a été monté aux alentours de midi devant l'entrée de la préfecture.
« Rien n'avance »
« On est ici pour marquer le coup. On dénonce l'excès d'administratif sur tout ce que l'on fait, l'entretien des fossés, le stockage de l'eau. (...) On nous fait des promesses mais rien n'avance », a affirmé Mathieu Bouteiller, 34 ans, membre des JA à Sainte-Pazanne (Loire-Atlantique), qui produit du lait, des céréales et de la viande bovine.
A Saint-Omer (Pas-de Calais), une centaine de personnes se sont mobilisées avec une cinquantaine de tracteurs, interpellant l'institution chargée d'entretenir les canaux drainant cette zone de polder, étendue de terre gagnée artificiellement sur l'eau, où les agriculteurs ont souffert d'inondations historiques il y a un an. « On trouve que depuis un an, il n'y a pas eu beaucoup de travaux », a estimé Antoine Peenaert, responsable FDSEA du Calaisis, réclamant « un plan de curage sur plusieurs années, ainsi que des ouvrages pour augmenter les capacités » d'évacuation de l'eau.
A Laon (Aisne), selon l'Union des syndicats agricoles de l'Aisne (USAA), affiliée à la FNSEA, 250 agriculteurs ont fait une tournée des administrations, plantant notamment des buissons devant l'antenne de l'Office français de la biodiversité (OFB) pour rappeler « qu'il y a en France 14 réglementations sur la haie et qu'on n'en veut plus qu'une », a indiqué Charlotte Vassant, de l'USAA.
Après une manifestation impliquant au moins 150 tracteurs d'agriculteurs à Montauban mardi soir à l'appel de la FDSEA et des JA, le préfet a « condamné fermement » mercredi soir des « dégradations" » (« tags visant les services de l'Etat, bris de vitre, projection de fumier et d'huile sur les murs de bâtiments »...) et annoncé qu'il « déposera plainte ».