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Crise(s) agricole(s), Mercosur : la France derrière les agriculteurs mais…
Au deuxième jour d’une mobilisation nationale, qui a vu la CR rejoindre la FNSEA et les JA, l’exécutif multiplie les signes de soutien au monde agricole, mais avec davantage de prise et d’actes dans l’Hexagone que dans l’UE et au-delà.
« J’entends la colère, les tensions, l’incompréhension des agriculteurs sur le projet d’accord UE-Mercosur. La France y est fermement opposée. C’est pourquoi, dans le cadre des dispositions de l’article 50-1 de notre Constitution, j’ai décidé, après consultation des présidents de groupe du socle commun, de faire une déclaration à l’Assemblée nationale suivie d’un débat et d’un vote sur ce projet d’accord. ». C’est ce qu’a annoncé sur le réseau X le Premier ministre Michel Barnier le 19 novembre à la mi-journée. Quelques minutes plus tard, sur le même réseau, le président de la République présent au G20 à Rio de Janeiro (Brésil) se posait en défenseur de l’agriculture française. « J’ai toujours protégé nos agriculteurs. Sur l’accord UE-Mercosur, nous sommes fermes et clairs : nous avons une agriculture de qualité qui a fait beaucoup d’efforts. Comme beaucoup d’autres Européens, nous souhaitons la préserver », a-t-il affirmé.
Vers à un rejet à l’unanimité à l'Assemblée nationale, et après ?
Les forces politiques constituant le socle commun (LR, Renaissance, Modem) étant hostiles à la signature du traité de libre-échange entre l’UE et le Mercosur, tout comme les groupes d’opposition, du RN à LFI en passant par le PS et LIOT, l’Assemblée nationale devrait le rejeter avec une unanimité à faire pâlir une majorité sous le couperet constant d’une motion de censure.
Le 6 novembre dernier, 622 parlementaires (députés, sénateurs, eurodéputés) avaient, dans une lettre ouverte à Ursula von der Leyen, déclaré ne pas concevoir que la Commission et le Conseil « s’assoient sur l’opposition de la France, grand pays fondateur de l’Union »., une situation susceptible d’engendrer une « déflagration démocratique dans notre pays qui se trouve déjà sous la menace politique d’un populisme anti-européen ». Reste à savoir quels effets ces incantations produiront sur la négociation intra-européenne, la France peinant à rallier d’autres pays à sa cause pour atteindre la minorité de blocage, constituée d'au moins quatre pays et représentant au moins 35% de la population de l’UE.
Une course-poursuite aux rattrapages à tout-va
Au plan intérieur, le gouvernement s’est lancé dans une course-poursuite aux rattrapages à tout-va en matière de reconnaissance, de reconsidération, de revalorisation, de régénération, de libéralisation, de non-surtransposition. Rassemblés dans 62 puis 70 engagements, greffés pour certains au projet de Loi d’orientation agricole alors en cours de finalisation, la dissolution de l’Assemblée nationale a stoppé net le mouvement alors qu’au même moment, céréaliers et viticulteurs enregistraient les pires récoltes depuis des décennies, sur fond de cours atones, tandis que les éleveurs se débattaient avec la FCO et la MHE. Ces derniers jours, l’exécutif a ainsi décrété l’instauration du contrôle unique, enclenché le processus d’indemnisation des pertes de surmortalité induites par la FCO-3, relancé le comité des solutions sur le front des impasses phytosanitaires ou encore négocié avec les banques des prêts bonifiés jusqu’à 50.000€ ou garantis jusqu’à 200.000€ pour surmonter les difficultés conjoncturelles et structurelles. « Aujourd’hui pas un seul prêt n’a été fait, pas un seul centime n’a été débloqué » a toutefois taclé le président de la FNSEA.
Acte 2, jour 2
Si la FNSEA et les JA ont salué les prises de position de l’exécutif à Paris et à Rio ainsi que « l’expression politique transpartisane de l’ensemble de la classe politique française », les syndicats majoritaires font savoir que la « mobilisation continue », conformément à leur appel lancé le 13 novembre dernier, fixant le terme de l’acte 2 de la mobilisation, après l’acte 1 l’hiver dernier, à la mi-décembre. Un calendrier qui coïncide peu ou prou avec le sommet du Mercosur à Montevideo (Uruguay) les 6-8 décembre, où l’accord de échange pourrait être entériné s’il ne l’est pas à Rio. Sans occulter les arrière-pensées électoralistes courant jusqu’à fin janvier avec le scrutin des Chambres d’agriculture.
Ce 19 novembre, les agriculteurs ont poursuivi leurs actions dans 85 départements pour ce qui est de la FNSEA et des JA. Mais la journée a vu aussi enter en scène la Coordination rurale à l’origine de quelques actions d’éclat comme le blocage des camions sur l’autoroute A9 au Boulou (Pyrénées-Orientales) proche de la frontière espagnole, vidant les citerne de vin blanc de deux camions espagnols, l’occupation de locaux de l’OFB à Beauvais (Oise) et à Guéret (Creuse) ou encore le siège de la préfecture et l’aspersion de lisier de la MSA à Agen (Lot-et-Garonne). La CR menace par ailleurs de bloquer le « fret alimentaire », se démarquant de la FNSEA et des JA, qui ne souhaitent pas « affamer » les Français.