ZNT riverains : combien d’hectares dans la balance ?

Une étude évalue à 0,2% de la SAU la proportion les cultures présentes à moins de 10 mètres des habitations, avec une forte prééminence des prairies permanentes, peu traitées. La proportion grimpe à 29% à 150 mètres, distance incriminée dans certaines études d’impact des produits phytosanitaires, avec une surreprésentation de la vigne et des vergers, aux IFT potentiellement élevés.

Quel serait l’impact d’un élargissement des Zones de non traitement (ZNT) sur la surface agricole utile ? Une étude de l’Université Paris-Saclay d’AgroParisTech et de l’INRAE en donne un aperçu, en évaluant, à l’échelle nationale, la part des cultures situées à des distances de 10, 50, 100 et 150 mètres des zones résidentielles. Résultats ? La proportion de la SAU s’élève respectivement à 0,2%, 5%, 16% et 29% pour les quatre périmètres en question. Environ la moitié de cette surface agricole est composée de cultures non traitées, quelle que soit la distance aux bâtiments résidentiels. Les terres agricoles représentent de 4% (10 m) à 46% (150 m) de toutes les utilisations des terres autour des zones résidentielles, et les zones agricoles traitées représentent de 1% (10 m) à 21% (150 m) de toutes les utilisations des terres autour des bâtiments résidentiels.

Prairies permanentes, puis blé et maïs

Les prairies permanentes sont les cultures dominantes présentes autour des bâtiments résidentiels. Elles représentent 56% de la SAU à 10m et moins, et 38% à 150m et moins. Arrivent ensuite le blé, à hauteur de 7% et 13% à respectivement 10m et 150m, puis le maïs (6% et 11%), les prairies temporaires (5% et 6%), l’orge (2% et 4%), le colza (2% et 4%), la vigne (3% et 3%). Ces différentes cultures représentent 80% de la SAU autour des bâtiments résidentiels.

« Parce qu'il s'agit de cultures non traitées, on peut s'attendre à ce que la prédominance des prairies à proximité des habitations contribue à une diminution de l'exposition des riverains aux pesticides agricoles, lit-on dans l’étude. Cependant, l'importance des cultures traitées comme le blé, l'orge, le maïs et le colza à moins de 150 m des bâtiments résidentiels nécessite une attention particulière pour leur effet potentiel sur l'exposition des résidents aux pesticides. En effet, des effets positifs significatifs de la superficie des grandes cultures à moins de 10m–1000m du domicile ont été trouvés sur les niveaux de pesticides dans les poussières domestiques en France et aux USA, bien que les effets sur la santé humaine soient très difficiles à estimer ».

Vignes et vergers surreprésentés

Si l’on considère, par culture, la proportion de la SAU située à 150m des zones résidentielles, le classement est différent du précédent, avec une prépondérance marquée des cultures pérennes. Dans un périmètre de 150m autour des habitations sont ainsi localisés 58% de la SAU d’oliviers, 56% de celle de fruits à coques, 53% celle d’arbres fruitiers, 45% de celle de vigne, contre 31% pour le maïs, 22% pour le blé, 20% pour l'orge et 19% pour le colza.

L’étude s’attarde sur le cas de la vigne en particulier, qui se classe 4ème au rang des IFT (12,4 en 2019), derrière la pomme (29,5), la pêche (18,4) et la pomme de terre (16,5). Faisant référence à une analyse du réseau Dephy, faisant état une réduction de 19% du rendement en lien avec une réduction de 33% de l'utilisation des pesticides (sur 10 ans et 12 régions viticoles), l’étude pointe l’impact que revêtirait la mise en place de zones tampons sans pesticides sur une filière qui représente environ 20% de la valeur économique de la production agricole nationale totale. Les impacts de grandes zones tampons sans pesticides pourraient également être importants pour d'autres cultures comme le maïs, le blé, l'orge et le colza, pour lesquelles 19% à 31% de la superficie nationale se trouve à moins de 150m des bâtiments résidentiels.

Des zones tampons sans pesticides ?

Pour rappel, l’arrêté du 25 janvier 2022 a partiellement redéfini le sort des Zones de non traitement (ZNT), en étendant aux personnes travaillant régulièrement à proximité des zones traitées le respect  des distances de sécurité s’appliquant jusqu’ici aux riverains. En dehors des produits concernés par des ZNT de 20 mètres ou au contraire exemptés (produits de biocontrôle, produits utilisables en AB), les ZNT communes sont de 10 mètres pour les cultures hautes (arbres fruitiers, vigne, arbres et arbustes, forêt, petits fruits, cultures ornementales de plus de 50 cm de hauteur, bananiers, houblon) et de 5 mètres pour les autres cultures, dont les céréales notamment). Les chartes départementales d’engagement permettent de réduire les ZNT de 5 à 3 mètres en cultures basses et de 10 à 5 mètres voire 3 mètres en cultures hautes, moyennant le recours à des dispositifs anti-dérive certifiés.

« En raison de l'accumulation de preuves montrant que les non-agriculteurs vivant à proximité des zones agricoles sont exposés à des niveaux de pesticides plus élevés que les résidents vivant plus loin, il semble pertinent d'examiner si des mesures spécifiques visant à encourager la réduction des pesticides pourraient être appliquée aux zones cultivées proches des habitations », conclut l’étude.

Outre les stratégies agronomiques de réduction, les chercheurs évoquent une option consistant à cultiver préférentiellement des cultures à faible intensité d'utilisation de pesticides à proximité des habitations, hors cultures pérennes bien entendu. L’étude relève que la conversion en agriculture biologique des 2 millions d’ha de SAU situés à moins de 100 mètres des habitations et recevant des traitements ajouterait 7% de SAU bio...