Contrôles en exploitation, armement de l’OFB : démystifier les peurs, rétablir la confiance

[Edito] Deux rapports, interministériel et sénatorial, démontent la théorie d’une profession harcelée et opprimée par l’Administration, et en appellent aux Chambres d’agriculture pour expliciter les normes et leur pendant que sont les contrôles. Un socle commun aux professions de foi des candidats aux prochaines élections ?

D’un côté, pas moins de quatre inspections ministérielles, à savoir l’Agriculture, la Transition écologique, l’Intérieur et la Justice, qui examinent la réalité comptable des contrôles en exploitation, ainsi que le poids et la fréquence des sanctions pouvant éventuellement en découler. De l’autre, un rapport de sénateurs qui, sans effraction, pénètrent l’Office français de la biodiversité (OFB) pour évaluer le positionnement d’un jeune établissement public doté de prérogatives de police environnementale. Conclusions ? « La mission constate un écart notable entre le ressenti des exploitants agricoles d’une pression de contrôle élevée assortie d’une sévérité des sanctions et des peines en découlant, et la réalité des contrôles réalisés et des sanctions et peines effectivement prononcées ». Voilà pour le premier rapport. « Les données communiquées à la mission ne témoignent pas d’un acharnement des inspecteurs de l’environnement à l’égard du monde agricole », lit-on dans le second rapport.

L’oppression non, la pression oui

Pour autant, les deux rapports ne mésestiment pas la pression pesant sur les exploitants, susceptibles d’être contrôlés par pas moins d’une douzaine d’administrations et d’établissements publics. Compte tenu de ses incidences financières, la Pac et sa conditionnalité concentrent évidemment une grande partie de la charge administrative et mentale, accessoirement pécuniaire en cas de sous-traitance, empirant à chaque nouvelle programmation. Ainsi, la mise en place du système de suivi satellitaire des surfaces en temps réel en 2023, ainsi que la notification des anomalies relevées en vue de l’exercice du droit à l'erreur, donnent-elles le sentiment aux agriculteurs d’être placés sous une surveillance continue et d'être davantage sollicités par l'Administration. Pis : la dernière réforme a accouché du « contrôle du contrôle », avec le principe de « re-performance », consistant à aller sur le terrain pour vérifier que les résultats d'un contrôle réalisé à distance sont confirmés par la réalité observée. Confrontés aux aléas du vivant et aux méfaits du changement climatique, les exploitants dénoncent une Administration hors-sol, un cadre juridique complexe, mouvant et au final insécurisant, ainsi que des contrôles déshumanisés et piégeux.

L’acculturation plutôt que l’instrumentalisation

Rajoutez-y un aloyau brésilien hormoné, hors-norme et adoubé par Bruxelles et vous avez là tous les ingrédients du désarroi, du dépit, de la rancœur et malheureusement parfois de la malveillance, sur fond d’instrumentalisation. Déréalisée sinon disproportionnée, la stigmatisation des contrôles tient lieu d’exutoire à la crise de revenu et de reconnaissance sociale, avec en victimes collatérales les agents publics, OFB en tête, qui se défendent d’être des « cow-boys » en dépit de leur 9 mm à la ceinture. Tout en reconnaissant que le port d’arme peut constituer un facteur de tension lors des contrôles, la mission sénatoriale s’oppose catégoriquement au désarmement des inspecteurs de l'environnement, pour des motifs de légitimité et de sécurité. Elle préconise, sous condition, d’invisibiliser l’arme et d’user, sans sommation, de l’arme de la pédagogie sur la question de l’acceptation de la norme environnementale. Afin de « mieux correspondre à leur mission de service public », les sénateurs invitent ainsi les Chambres d’agriculture à renforcer leur rôle dans la diffusion et l’explication de la réglementation et des contrôles. Un socle commun aux professions des foi des futurs candidats aux élections à venir ?