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Un fonds d’urgence de 8 millions d’euros pour l’agriculture audoise sinistrée par les flammes
Il inclut à la prise en charge ciblée de cotisations sociales à hauteur d’un million d’euros et des mesures complémentaires au bénéfice d’environ 200 exploitations, principalement viticoles, ravagées par l’incendie du 5 au 7 août, ayant parcouru 16.000 ha dans le massif des Corbières, au cœur de la première AOC du Languedoc.
Après la visite du Premier ministre François Bayrou le 6 août, la ministre de l’Agriculture s’est rendue jeudi au chevet des viticulteurs et agriculteurs meurtris par l’un des plus gros incendies de ces dernières décennies, ayant parcouru 16.000 ha, dont 13.000 ont brulé. Sur son passage, le feu a calciné des dizaines d’habitations et de véhicules et provoqué une victime, sur la commune de Saint-Laurent de la Cabrerisse. C’est là que s’est rendue Annie Genevard, plus précisément dans les installations de la cave coopérative Le Cellier des Demoiselles, fondée en 1914.
Selon un premier recensement encore provisoire réalisé par la Chambre de l’Agriculture de l’Aude, entre 1000 et 1500ha de vignes auraient été touchés par l’incendie, à des degrés divers, allant de l’échaudage à la destruction totale en passant par l’exposition aux produits retardants et au goût de fumée, pénalisant la vinification. Mais des exploitations d’élevage, de maraichage ou encore apicoles ont vu certaines de leurs infrastructures partir en fumée.
Le ministère évalue à 2000 hectares la surface de terres agricoles impactée, incluant plus de 1000 hectares de vignes et touchant environ 200 exploitations.
Un fonds d’urgence…
Le dispositif de soutien annoncé jeudi comprend un fonds d’urgence de 7 millions d’euros destiné à faire face aux difficultés de trésorerie les plus pressantes des agriculteurs touchés par des pertes de récoltes (raisins perdus ou soumis aux fumées et retardants), perte de fonds (vignes brûlées) et perte de bâtiments et de matériels agricoles. Ce fonds sera complété par une enveloppe de 1 million d’euros destinée à la prise en charge ciblée de cotisations sociales par la MSA pour les agriculteurs en difficulté. En complément, la ministre de l’Agriculture a annoncé le dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) pour les exploitants sinistrés et le recours à l’activité partielle pour les salariés des exploitations concernées.
… et des mesures complémentaires
Annie Genevard a également indiqué la possibilité de modification temporaire des cahiers des charges, en lien étroit avec l’INAO, pour faciliter la commercialisation des raisins touchés par les fumées. En réponse aux souhaits des professionnels, la ministre a enfin demandé aux administrations compétentes des douanes et de son ministère d’examiner des dérogations aux plafonds règlementaires actuels limitant l’achat de raisins, de moûts et de vin afin de préserver les marchés.
Un guichet de demandes d’avance de 10.000 € maxi dans les quinze jours
Sous l’égide du préfet, un guichet sera ouvert dans les 15 jours et permettra de verser en urgence une avance de trésorerie d’un maximum de 10 000 euros pour les agriculteurs qui en feront la demande dans les 16 communes sinistrées. Le préfet s’appuiera sur une cellule constituée des services de l’Etat mais aussi de la MSA, des assureurs et des banques, qui travaillera en étroite concertation avec la chambre départementale d’agriculture et les représentants professionnels agricoles.
Un département aux avant-postes du changement climatique
Avec les Pyrénées-Orientales voisines, l’Aude est aux prises à des déficits de précipitations engendrant un état chronique de sécheresse depuis plusieurs années, rabougrissant les rendements et les revenus. La déprise, le défaut d’entretien des fossés et chemins, le recul des activités cynégétiques, tendent à exposer davantage la vigne aux risques d’incendie et à favoriser leur propagation entre deux zones de combustibles.
Dans l’Aude, la vigne cède de plus en plus la place à la friche. Le département s’est en effet placé en tête des dernières demandes d’arrachage, à hauteur de 5000ha, s’ajoutant aux 5500ha perdus pendant la décennie 2010-2020, soit au total l’équivalent de 15% de la SAU viticole. « L’accès à l’eau est une condition essentielle à la résilience de notre agriculture. Il est indispensable de faciliter le stockage de l’eau et de débloquer les freins administratifs qui entravent encore trop de projets », a commenté Jérôme Despey sur le réseau X.
En attendant un « plan de sauvegarde et d'avenir »
Avant le méga-feu des Corbières, le département a connu quatre incendies majeurs depuis la fin du mois de juin, cumulant 3500 ha de végétation partis en fumée. Comparativement à la garrigue et à la forêt, la vigne a certes des propriétés de pare-feu mais elle n’est pas pour autant immunisée, contre les flammes en bordure immédiate des foyers mais aussi contre les radiations thermiques, susceptibles d’engendrer de la mortalité plus en profondeur des parcelles.
Lors de sa visite, le Premier ministre avait évoqué un « plan de sauvegarde et d'avenir » dont « les Corbières pourraient être le laboratoire ». En juillet 2024, le ministère de l’Agriculture avait lancé le Plan Agriculture climat Méditerranée, destiné à faire émerger 50 projets labellisés « aires agricoles de résilience climatique », portés par une contractualisation entre agriculteurs, transformateurs, collectivités territoriales et Etat. « Je suis là aujourd’hui pour les aider [les agriculteurs] à surmonter. Je reviendrai demain pour les aider à reconstruire », a promis Annie Genevard.