- Accueil
- Biodiversité : le trio gagnant des labels à réel impact
Biodiversité : le trio gagnant des labels à réel impact
Demeter, Agriculture biologique (AB), Nature & Progrès : tels sont les trois certifications garantissant le meilleur respect de la biodiversité, selon une étude de l’INRAE et de l’Ifremer. Laquelle pourrait contribuer à nourrir le futur affichage environnemental des produits alimentaires, promis par la loi Climat et résilience d’août 2021 mais qui se fait désirer.
« L’analyse des cahiers des charges atteste de l’effet positif sur la biodiversité des labels d’agriculture biologique, à savoir le règlement européen AB et les certifications privées Demeter et Nature & Progrès, car ce sont ceux qui intègrent le plus de pratiques identifiées comme favorables, de manière exigeante et ambitieuse ». Telle est la conclusion de l’étude BiodivLabel réalisée par l’INRAE et l’Ifremer, publiée le 30 avril. Pendant plus de deux ans, 29 experts affiliés à 9 organismes ont étudié près de 1200 références bibliographiques (articles scientifiques et documents techniques, rapports institutionnels ou d’ONG), pour faire un état des connaissances sur l’impact des modes de production labellisés sur la biodiversité. L’analyse a porté sur 10 labels agricoles et sur 3 labels en usage dans les secteurs de la pêche et de l’aquaculture, préalablement ciblés par les ministères de la Transition écologique et de l’Agriculture, ainsi que l’Ademe.
Les analyses des pratiques et labels agricoles ont porté sur des résultats favorables à l’augmentation de la biodiversité sauvage à partir du niveau de référence de l’agriculture dite conventionnelle. Les 10 labels ont été passés au crible de 8 pratiques jugées comment étant favorables avec une « confiance forte », à savoir : la présence, dans le paysage agricole, d’éléments semi-naturels d’une part, et de prairies d’autre part, les rotations diversifiées, l’absence de traitement pesticide de synthèse, la réduction du travail du sol, la fertilisation organique, l’implantation de couverts végétaux et les cultures associées. Le classement ne porte pas sur la taille de l’effet mais sur sa documentation sur plusieurs dimensions de la biodiversité.
Et c’est donc le Demeter qui emporte la mise. Créé en 1979, le label Demeter, qui se définit comme le label de la biodynamie, mais qui pose comme préalable la certification AB, coche en effet 5 cases du 8 avec la mention « pratique ambitieuse et obligatoire ». Il pêche par contre sur les cultures associées et sur la réduction du travail du sol, comme du reste l’ensemble des labels étudiés, à l’exception du RTRS, relatif au soja responsable. Le label AB, qui fête cette année ses 40 ans, se classe en seconde position, pénalisé par une impasse sur l’intégration d’habitats semi-naturels. Le label Nature & Progrès, qui remonte à 1972 et qui repose sur des cahiers des charges par type de production, complète le podium, avec la même lacune que l’AB sur les d’habitats semi-naturels et moins d’exigence sur les rotations diversifiées et les cultures associés.
Les 7 autres labels décrochent nettement, et avec eux le label HVE, que les défenseurs de la bio assimilent à du « greenwashing », et qui vire effectivement au vert pâle voire très pâle, à l’exception de l’intégration des habitats semi-naturels. « Les mesures obligatoires structurent généralement la cohérence et l’ambition du cahier des charges et ce sont celles dont les effets sont mesurables sur le terrain, lit-on dans l’étude. Le mode de fonctionnement des labels (gouvernance, définition du cahier des charges, contrôles, suivi des audits...) influe à la fois sur le nombre de producteurs volontaires et sur le niveau des exigences. De cet équilibre dépendent les changements réels vers des pratiques de production plus durables et les effets globaux sur la biodiversité ».
Quid de l’affichage environnemental ?
L’étude de l’INRAE et de l’Ifremer s’inscrit dans la perspective de l’affichage environnemental des produits alimentaires, prévu par la loi Climat et résilience promulgué en août 2021 mais dont la mise en œuvre se fait attendre. L’étude vise justement à combler les lacunes de l’Analyse du cycle de vie (ACV) apparues au cours de la construction de l’affichage, la biodiversité apparaissant comme le parent pauvre, à côté des émissions de gaz à effet de serre ou de la consommation d’eau. L’étude met du reste en exergue trois pistes méthodologiques (indicateur CONTRA-BiodivLabel, méthodes BVIAS et CSTEP) de nature à construire des scores agrégés de biodiversité.
Si l’étude fournit des clés d’analyse et de compréhension quant à l’impact des productions labellisées sur la biodiversité, elle met aussi en évidence certaines limites, qu’il s’agisse du choix de l’unité fonctionnelle la mieux appropriée pour évaluer l’impact des produits labellisés sur la biodiversité (par kg de produit ou par ha de surface utilisée en agriculture par exemple), des interactions entre pratiques ou de l'intégration des impacts à une échelle au-delà de la parcelle. L’étude a également soulevé des risques d’incohérence entre les politiques de protection de la biodiversité, les politiques agricoles et de la pêche et les politiques nutritionnelles. « Il appartient à présent aux pouvoirs publics, aux scientifiques, aux gestionnaires de labels et aux autres acteurs de s’emparer de ces enseignements », conclut l’étude.