Dégagez un revenu financier de vos haies

La Communauté de communes du Pays de Falaise s'est engagée résolument dans la préservation des haies bocagères, emblématiques de l'identité normande. En associant conservation patrimoniale et développement économique, elle offre aux agriculteurs une source de revenus tout en stimulant une filière bois locale florissante. Une initiative déjà bien rodée et innovante !

La haie est subie comme une contrainte par les agriculteurs, alors qu’elle peut être considérée comme un atout économique en étant valorisée en bois d’énergie”, explique Karl Goedtgheluck, chargé de mission Bocage et Bois-énergie à la communauté de communes du pays de Falaise. Le programme proposé par le territoire normand, sensibilise les agriculteurs au rôle multifonctionnel de la haie bocagère mais aussi à la population qui ne comprend pas toujours les travaux effectués par les agriculteurs sur ces clôtures végétales. 

Les intérêts de la haie

Elle protège les cultures des vents violents, limite l’érosion des sols, offre des zones ombragées au bétail, stocke du carbone, favorise l’infiltration et l’épuration dans les sols, abrite un écosystème riche et fournit du fourrage... Les intérêts de la haie sont connus et nombreux. Mais la réglementation les concernant est un véritable casse-tête. La gestion des haies a d’ailleurs été un point de tension régulièrement soulevé par les agriculteurs lors des dernières manifestations. Trop de contraintes ! Ce qui pousse certains agriculteurs à délaisser leur entretien, voire à les arracher (quand la loi le permet), malgré les aides disponibles. 

Les haies, une énergie renouvelable

Le territoire de la Communauté de Communes du Pays de Falaise (CCPF), avec le Syndicat Mixte du Bassin de la Dives (SMBD) a trouvé une alternative. En plus d’offrir de nombreux services écosystémiques pour le territoire, “la haie est un atout économique pour les exploitants agricoles. C’est une ressource en bois qui peut être valorisée en bois énergie pour la chaleur”, souligne Karl Goedtgheluck, à condition que les haies ne soient pas arrachées et qu'elles soient entretenues. Sur le territoire normand, elles sont déjà exploitées en étant transformées en bois de plaquettes pour alimenter la chaudière de Falaise. La ville s’est dotée depuis plusieurs années déjà d’un chauffage urbain alimenté au bois. Depuis 2023, sur 4000 tonnes de bois consommées par la chaudière de Falaise, ¼ provient de haies labellisées.

Agriculteurs, comment bénéficier de ce programme financé par la région ? 

Tout agriculteur.trice du Pays de Falaise et gestionnaire de haies peut en bénéficier. La CCPF et la SMBD proposent de financer des plans de gestion durable pour permettre aux agriculteurs de s’engager dans une démarche de labellisation (soit le Label Haie soit le Label Bas Carbone proposé par la plateforme Carbioz par exemple). Elle n’impose en rien cet engagement : un exploitant peut bénéficier d’un plan de gestion et ne pas être labellisé. Une fois le plan de gestion validé, un organisme indépendant met en place le Plan de Gestion Durable de la Haie. Un diagnostic est posé et l’organisme fournit un guide technique des bonnes pratiques d’entretien ainsi que des outils de planification de la haie pour 15 ans. “Ce sont des réponses uniques. Chaque haie est différente, rappelle Karl Goedtgheluck. En fonction des services rendus, les pratiques et les interventions sont adaptées : par exemple déplacer la clôture installée dans une haie pour pouvoir la tailler correctement ou encore, apprendre à bien identifier la haie sur sa parcelle, savoir quelle haie les agriculteurs peuvent tailler, car on ne peut pas tout couper au même moment.” 

Sensibilisation de la population aux haies et à leur gestion 

Le programme de sensibilisation appelé “Aux haies citoyen-nnes” mis en place par la CCPF, la SMBD avec le concours de la CPIE (Centre permanent d’initiatives pour l’environnement) vise également à mettre en avant l'importance des haies et à informer les citoyens. Les élus des communes sont encouragés à replanter. “Elles détiennent parfois du foncier qui pourrait être valorisé”, suggère Karl Goedtgheluck. Cependant, Les haies sont aujourd'hui au cœur de l’actualité et peuvent devenir un vrai sujet de crispation. Les habitants “ne comprennent pas toujours le travail des agriculteurs réalisé sur les haies. Du simple recépage peut être mal vécu, faute de connaissances”. Pour éviter toute tension, le programme a créé un réseau d'ambassadeurs de la haie, “ Nous avons une vingtaine de citoyens formés pendant 6 mois sur le sujet comprenant des aspects techniques”. Ils se déplacent dans les écoles où ils délivrent un temps de formation en classe. Après la partie théorique, place à la pratique. Les ambassadeurs accompagnent ensuite les enfants sur le terrain pour planter des haies. Cette démarche est à la fois ludique et éducative et elle permet aussi aux communes de respecter le programme d’actions du Plan-Climat-Air Énergie Territorial, obligatoire pour les métropoles et les intercommunalités de plus de 20 000 habitants pour adapter le territoire aux changements climatiques et lutter contre les dérèglements de l’écosystème. Ainsi, rien qu’au mois de février 2024, près de 300 arbres ont été plantés sur le territoire de la Communauté de Communes du Pays de Falaise.