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Eau : le CESE réclame un virage agroécologique
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) veut faire d’Ecophyto le tremplin à la « nécessaire sortie des pesticides ». Il réclame également la généralisation des Projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE). Et se prononce contre les « méga-bassines » alimentées par les nappes.
Dans un avis rendu le 11 avril, consacré à la gestion durable de l’eau sur fond de changement climatique, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) n’y est pas allé par quatre ruisseaux pour mettre l’agriculture face à ses responsabilités. A sa décharge, entre les crispations générées par les réserves de substitution des Deux-Sèvres et l’inventaire à la Prévert de l’Anses au sujet des pesticides présents dans l’eau du robinet, le sujet de l’eau n’est pas à proprement parler un long fleuve tranquille.
Le Cese a fait sans filtre. Ainsi, il préconise « d’accélérer, en l’accompagnant, la transition agroécologique pour réduire l’impact de l’agriculture sur la ressource en eau, de limiter au plus vite l’utilisation de produits pesticides et engrais azotés susceptibles de contaminer les eaux, et de préserver la qualité des sols ». Il appelle notamment à « accélérer le processus de nécessaire sortie des pesticides en agriculture, et à renforcer les actions et contrôles qui permettront d’atteindre les objectifs des plans Ecophyto ». A cette fin, il préconise une mobilisation des financements pour mettre en œuvre les alternatives existantes ou à créer.
Selon le ministère de la Transition écologique, la première cause d’abandon des captages d’eau potable (400 par an sur un total de 38.000) tient à la non-qualité de la ressource en eau dans 34% des cas, dont 41% pour cause de teneurs excessives en nitrates et pesticides.
Améliorer la gouvernance et le partage de la ressource
Le CESE appelle par ailleurs à rendre effective dans les meilleurs délais la mise en place généralisée de projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE). Définis par l’instruction du 7 mai 2019, les PTGE visent à définir, au sein d’un périmètre hydrologique cohérent, les conditions d’une gestion équilibrée et durable de l’eau entre les différents usages et usagers, en respectant la bonne fonctionnalité des écosystèmes et en anticipant le changement climatique, le tout par la voie d’une démarche locale concertée recherchant le consensus et l’engagement entre les différents acteurs du territoire.
Multi-acteurs, multi-usages, multi-leviers : telle est la devise des PTGE, instances au sein desquelles toutes les parties (agriculteurs, associations, institutions etc.) sont censées faire émerger des projets cochant toutes les cases de la durabilité, dans une démarche de co-construction, prévenant les risques de conflits et de recours. La réalité est un peu différente puisqu’une quinzaine de PTGE sont actuellement en situation de blocage. La Confédération paysanne estime de son côté que les PTGE sont « affranchis de la mainmise des irrigants et majoritairement pensés par les irrigants de manière à contrecarrer la baisse des prélèvements pourtant urgente ».
Contre les « méga-bassines »
Le CESE appelle en outre à la mise en œuvre d’une irrigation de « résilience ». Au sujet des réserves de substitution, que le CESE qualifie de « méga-bassines », la troisième assemblée constitutionnelle de la République appelle à « objectiver le débat » et préconise que soient rendus publics les volumes totaux prélevés et les stratégies d’irrigation agricole. Le CESE se prononce pour l’interdiction de leur subventionnement par des fonds publics, notamment de celles alimentées par pompage dans la nappe phréatique, qu’il assimile à de « l’accaparement de la ressource en eau » et qu’il accuse de d’entrainer « une dégradation de l’environnement, de la biodiversité et un risque pour la santé humaine ».
Au chapitre de la gouvernance toujours, le CESE propose de généraliser la mise en place de Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) dans les territoires non encore pourvus et que ceux-ci intègrent des objectifs de réduction des prélèvements. Selon Eaufrance, le service public d’information sur l’eau, en 2023, 46% du territoire français (métropole et outre-mer) n’est pas couvert par un SAGE.
Améliorer la connaissance
Outre la réutilisation des eaux usées traitées, la chasse aux fuites ou encore l’instauration d’une taxe à la surconsommation, le CESE préconise de renforcer les moyens de la recherche publique et privée, sur la climatologie et la connaissance des écosystèmes aquatiques. II propose, pour anticiper les crises, d’avoir un comptage en temps réel de tous les prélèvements, la connaissance permanente de l’état des nappes et d’accroître le nombre des péziomètres.