Surfaces en AB, reliquats d’aides, réforme du PSN à mi-parcours : les impatiences de la FNAB

Alors que « la barre fatidique des 10% de SAU bio est en vue », le président de la FNAB réclame la publication des chiffres officiels, conditionnant les reliquats d’aide non consommés, voire le recadrage de Plan stratégique national. Avec dans les deux cas des réorientations toutes trouvées.

« La barre fatidique des 10% de SAU bio est en vue » : c’est ce que déclare Philippe Camburet, président de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB). « C’est un ressenti », admet l’agriculteur bio de l’Yonne, « mais on aimerait sortir du ressenti des uns et des autres et s’appuyer sur des chiffres officiels ». La FNAB voit d’un mauvais œil l’attentisme prêté du ministère de l’Agriculture, qu’il soupçonne de jouer la montre à deux mois d’une échéance tout sauf anodine : la notification à Bruxelles de la réforme à mi-parcours du Plan stratégique national, ouvrant la possibilité de faire bouger les curseurs des différentes aides de la Pac. Même procès en procrastination à l’égard de la publication d’un rapport à 360° sur l’AB, commandité au Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et ses espaces ruraux (CGAAER). « J’y vois la volonté de ne pas allumer le feu dans les campagnes », devise Philippe Camburet.

1 milliard d’euros d’aides non consommées sur 2023-2027

A l’automne 2024, l’Agence bio avait communiqué des chiffres intermédiaires, faisant état d’une hausse de 30% du nombre de déconversions au premier semestre, tout en affichant un solde de 1167 producteurs bio supplémentaires. Mais rien au sujet des surfaces en jeu. En 2023, la SAU bio avait reculé de 2% alors que le nombre de producteurs certifiés AB avait progressé d’autant. Le taux de SAU bio s’était alors établi à 10,36% contre 10,50% en 2022, témoignant d’un coup d’arrêt historique.

Si le « ressenti » de la FNAB s’avère exact, le tassement des conversions va faire ressurgir, comme en 2024, le sujet de la réallocation des crédits non consommés. Au train où vont les choses, la FNAB évoque le montant d’un milliard d’euros sur la programmation Pac 2023-2027, l’enveloppe annuelle dévolue à la conversion bio étant de 340 millions d’euros. Autant dire que la manne aiguise les appétits, de l’Etat comme des Régions, notamment pour financer les Maec, avec un degré de transparence tout relatif sur la redistribution des budgets. « Même la Cour des comptes peinerait à y voir clair », juge le président de la FNAB, qui ne se satisfait pas de voir l’agriculture bio être ponctionnée de ses soutiens alors qu’elle est elle-même en souffrance. « A quand une évaluation de l’impact des Maec sur la biodiversité ou sur la qualité de l’eau », s’interroge par ailleurs Philippe Camburet, fort des nombreux rapports scientifiques et/ou officiels documentant les externalités positives de l’AB. Les enseignements du PSE Eau de Paris constituent un plaidoyer à lui tout seul de l'efficience de l’AB.

La réallocation des aides selon la FNAB

La FNAB ne manque pas d’idées pour réaffecter à « bio » escient les crédits non consommés : relever de 4500 à 6000 euros par exploitation le crédit d’impôt bio jusqu’en 2028, allouer 145 euros à l’écorégime bio, accorder un bonus bio au PCAE ou encore élaborer un programme opérationnel sur le lait bio pour aider la filière à se structurer. La FNAB aurait aimé que la réforme du PSN à mi-parcours fournisse le prétexte à un débat public, et non à une indifférence institutionnelle, sinon à une proposition de loi « anti-entraves », alors même que la loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture, promulguée le 24 mars dernier, a inscrit dans le marbre un objectif de 21% de SAU bio à horizon 2030. Pour Philippe Camburet, « il faut décréter l’état d’urgence bio ».