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La loi d’orientation agricole, un renoncement à la massification de la bio ?
A défaut d’avoir obtenu la suppression de l’Agence bio, les sénateurs ont tiré un trait sur l’objectif de 21% de SAU bio inscrit dans la Planification écologique à horizon 2030. La FNAB attend un « sursaut » de la Commission mixte paritaire, chargée de trouver un compromis entre les textes des sénateurs et des députés.
Le Sénat a adopté mardi à une large majorité le Projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture. Le texte reconnait le caractère « d'intérêt général majeur » de l'agriculture, acte la création du guichet unique « France Installation Transmission », instaure un diagnostic modulaire des exploitations, dépénalise certaines infractions environnementales non intentionnelles et établit une cartographie des règlementations applicables aux haies. Un texte pas du tout au goût des ONG environnementalistes, qui y voient « une fuite en avant » vers la productivité et la compétitivité » au mépris des transitions agroécologique, climatique et alimentaire.
En ce qui concerne l’agriculture biologique, les sénateurs ont effacé la trajectoire de développement de l’agriculture biologique qui figurait dans le texte adopté à l’Assemblée nationale en mai 2024, et qui reprenait à son compte la cible de 21% de SAU en AB à l’horizon 2030 (contre 10,35% en 2023), ni plus ni moins que la valeur inscrite dans la Planification écologique.
« Le cap disparait au motif qu’il ne serait pas atteignable alors qu’il l’est parfaitement, a réagi Philippe Camburet, président de la FNAB. La meilleure preuve, c’est qu’une majorité des candidats à l’installation souhaite s’installer en bio. Autrement dit, la bio permet d’atteindre deux objectifs à la fois : le renouvellement des générations et la transition écologique ». La FNAB est d’autant plus interloquée que les objectifs programmatiques de l’AB avaient été réitérés dans le Programme ambition bio 2027 dévoilé au SIA 2024, avec force outils pour structurer les filières et stimuler la demande, les deux principales fragilités de la filière.
De son côté, la FNH fustige le principe « pas d’interdiction sans solution économiquement viable » inscrit dans le projet de loi, la négation même de l’agriculture bio, selon l'ONG. Pour Lorine Azoulai, co-présidente du Collectif Nourrir, « on prend le problème à l’envers ». « On devrait décider du modèle agricole et alimentaire pour ensuite rendre ce modèle économiquement viable grâce à des politiques publiques de soutien, des politiques fiscales, des politique de réinternalisation des coûts cachés ».
La FNAB a décelé dans le texte des sénateurs un autre signal néfaste, avec l’abandon, dans les cursus de formation, « de la pleine et entière sensibilisation des enjeux agronomiques, déterminants pour préserver l’environnement ». « Se passer de pesticides et d’engrais de synthèse, cela exige de la technicité et une formation digne de ce nom, or la loi ne prévoit rien sur l’agroécologie », fustige Philippe Camburet. Au lieu de cela, on a un bachelor qui va fabriquer des agricultrices et des agriculteurs qui n’auront de cesse de viser une plus grande productivité et toujours un accès aux marchés mondiaux dans un monde ultra compétitif ».
La FNAB mise sur un « sursaut » de la Commission mixte paritaire pour apporter des correctifs au texte des sénateurs qui, dans le cadre de la proposition de loi visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur », avaient décrété la suppression de l’Agence bio, avec un « avis de la sagesse » de la ministre de l’Agriculture, avant que le gouvernement ne rétropédale.