[L’AB en 2040 – 2/2] Les conditions d’une reprise de la croissance

A supposer que la France maintienne son objectif de 18% de SAU bio en 2027 (contre 10,1% en 2024) inscrit dans son Plan stratégique national et de 21% en 2030 tel que mentionné dans la loi d’orientation agricole promulguée en mars dernier, une étude commanditée le ministère de l’Agriculture, FranceAgriMer et l’Agence Bio identifie 7 leviers d’action pour percer le plafond de « vert ».

« Quels avenirs pour le secteur bio français d’ici à 2040 ? » : tel est l’intitulé de l’étude réalisée par les bureaux d’études Ceresco et Crédoc pour le compte du ministère de l’Agriculture, de FranceAgriMer et de l’Agence Bio. Objectifs : établir un diagnostic du secteur après 20 ans de croissance annuelle à deux chiffres précédant l’irruption d’un plafond de « vert » en 2022, que les années 2023 et 2024 n’ont pas percé, et échafauder des « avenirs probables » à horizon 2040, en agissant sur différents curseurs tels que la géopolitique internationale, l’acuité des crises climatique et environnementale, les arbitrages politiques (aux plans national et européen) ou encore les aspirations des citoyens-consommateurs.

Du non-consentement à payer

S’agissant du diagnostic, l’étude conclut que le différentiel de prix entre les produits bio et conventionnels constitue une élément « déterminant » limitant l’élargissement du marché de la bio, une problématique pas spécifique à la France. « Le consentement à payer est dégradé par une perception de plus-value trop faible par le consommateur, une dégradation de la confiance qu’il inspire, une concurrence par de multiples autres démarches aux allégations environnementales pouvant jouer sur les attentes liées à la bio et une préférence forte de la part du consommateur pour la notion de proximité géographique qui n’est pas toujours mise en avant pour les produits bio », lit-on dans le rapport.

Tenir ou pas les objectifs du PSN et de la LOA

A supposer que la France maintienne son objectif de 18% de SAU bio en 2027 (contre 10,1% en 2024) inscrit dans son Plan stratégique national et de 21% en 2030 (le Green deal fixe le taux européen à 25% en 2030) tel que mentionné que la loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture, promulguée en mars dernier, l’étude inventorie 7 leviers d’action susceptibles de déplafonner le taux suivants, peu ou prou équivalents à ceux de 2022 et de 2023 :  en 2024, l’AB représente 14,9 % des exploitations, 16 % des emplois agricoles, 10,1 % de la SAU et 5,7 % des ventes de produits alimentaires.

Les 7 leviers d’action

À partir du diagnostic et de l’analyse des scénarios, Le Ceresco et le Crédoc ont identifié les sept leviers d’action suivants :

- des actions relevant de la politique européenne ou internationale en matière d’environnement, de commerce (clauses miroir et négociations de traités internationaux, etc.), ou pouvant faire évoluer le label biologique européen

- la communication et la vulgarisation concernant la parole scientifique et l’éducation à l’alimentation en général, et spécifiquement sur l’agriculture biologique

- la prise en compte des externalités positives et négatives du système alimentaire (concernant l’environnement ou la santé publique), en réfléchissant à des mesures innovantes telles que des systèmes de péréquation, voire des détaxations ou taxations différenciées, permettant d’internaliser les coûts environnementaux

- le soutien à l’offre et aux filières, en s’appuyant sur les dispositifs existants, notamment ceux mis en place dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), ou des expérimentations de paiements pour services environnementaux (PSE), et en faisant évoluer les orientations de la recherche, de la formation et du conseil technique en faveur de la transition agroécologique, notamment de l’agriculture biologique

- l’amélioration de la gouvernance et du pilotage des filières, en les dotant d’outils de suivi des marchés et en intégrant davantage la grande distribution

- une meilleure accessibilité des produits biologiques en répondant à la principale contrainte actuelle, à savoir le prix, en agissant sur le modèle économique des filières ou en envisageant des soutiens directs aux consommateurs, conditionnés à la consommation de produits biologiques, par exemple

- la disponibilité de l’offre biologique pour le consommateur, en agissant pour renforcer l’exposition des produits biologiques dans les grandes surfaces, par exemple.

« Les scénarios produits et les recommandations qui en découlent devraient faire l’objet d’une poursuite du débat, auprès d’un public plus large que celui issu du groupe de travail rassemblant des acteurs œuvrant dans le secteur biologique, recommandent les auteurs de l’étude.  Certains leviers identifiés pourraient contribuer à des actions de court terme, mais la plupart s’inscrivent dans une perspective plus longue. Les sujets abordés concernent le système alimentaire en général, et induisent parfois de nouveaux modèles de société. Les questionnements et pistes soulevés dans cette étude pourraient ainsi alimenter les réflexions sur l’évolution de l’agriculture en général et de l’agriculture biologique en particulier ».